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"On ne partira pas d'ici" : à Kobané, les Kurdes sous la menace d'une attaque de l'armée turque

La ville du nord de la Syrie, symbole de la résistance kurde face à l’État islamique, est devenue une enclave placée sous protection de l’armée du régime syrien.

Article rédigé par Valérie Crova - édité par Timour Ozturk
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Un combattant kurde observe un drapeau turc de l'autre côté de la frontière, depuis la ville de Kobané, en octobre 2019 (AFP)

À l'entrée de Kobané se dresse une imposante statue blanche. Elle représente une femme, deux ailes d'ange dans le dos, bras levés vers le ciel. "C'est la place de la femme libre, c'est pour les femmes kurdes qui se sont battues contre Daech", raconte un habitant. Kobané, la ville où les Kurdes ont arrêté l'expension de l'Etat islamique en 2015 avec l'appui de l'aviation américaine, est désormais l'une des dernières villes le long de la frontière avec la Turquie à échapper à l'offensive d'Ankara : dans les rues des villes kurdes d'Afrin, de Ras Al-Aïn et de Tel Abyad, début février 2020, des milices fidèles aux Turcs patrouillent. 

Le drapeau de Bachar flotte aujourd'hui sur Kobané

Sur un bâtiment, à l'autre bout de la ville de Kobané flotte le drapeau de la République arabe syrienne, celui des forces de Bachar Al-Assad. Le déploiement de l'armée syrienne à Kobané reste discret. Un jeune Kurde croisé dans le centre-ville donne son opinion sur cette présence : "C'est une très bonne chose que l'armée syrienne soit à Kobané, mais juste dans certains points de la ville, pas dans toute la ville. C'est surtout pour protéger notre frontière. La présence de l'armée syrienne, c'est bien pour ça."

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Quand la Turquie a lancé son offensive le 9 octobre 2019 dans le nord de la Syrie, les Kurdes, qui avaient établi une administration autonome à la faveur du conflit syrien, ont demandé l'aide de Damas. Ils n'avaient pas d'autre choix. Convaincus qu'une guerre peut éclater à tout moment avec la Turquie, la population de Kobané perce des tunnels. Partout dans la ville, des marteaux piqueurs creusent dans la roche des galeries souterraines. Autour de Kobané, il n'y a pas de montagnes pour se réfugier en cas d'offensive.

Ces travaux, c'est pour notre sécurité, au cas où il y aurait des attaques, pour qu'on se protège des frappes aériennes. On pourra se mettre à l'abri à l'intérieur. Parce que nous, on ne partira pas d'ici.

Un habitant de Kobané

à franceinfo

À Kobané, on redoute maintenant que la montée de tension entre les forces d'Ankara et de Damas sur le front d'Idleb ne précipite un assaut de la Turquie. Que vont devenir la ville et ses habitants alors que le territoire du Rojava fait l'objet de tractations entre Moscou, allié du régime syrien, et Ankara ? La Turquie a déjà jeté sur les routes des dizaines de milliers de civils kurdes lors de son opération d'octobre 2019. Les habitants de Kobané, eux, jurent qu'ils n'abandonneront pas leur ville et qu'ils sont prêts à de nouveaux sacrifices. 

Le reportage de Valérie Crova dans la ville kurde de Kobané

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