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Syrie : au moins 33 soldats turcs tués près d'Idleb, Erdogan annonce des représailles contre le régime de Bachar Al-Assad

Avec le soutien de l'aviation russe, le régime syrien a déclenché en décembre une offensive pour reprendre le dernier bastion rebelle et jihadiste d'Idleb.

Article rédigé par franceinfo avec AFP et Reuters
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Des rebelles syriens soutenus par les Turcs tirent des missile anti-aériens, le 24 février 2020, dans la province d'Idleb.  (OMAR HAJ KADOUR / AFP)

Escalade brutale entre la Turquie et le régime syrien. Au moins 33 soldats turcs ont été tués, jeudi 27 février, dans des raids de Damas sur la province d'Idleb (nord-ouest de la Syrie), selon un bilan communiqué dans la nuit par le gouverneur de la province turque de Hatay, frontalière de la Syrie. Outre les 33 morts, une trentaine de militaires turcs ont été blessés dans les frappes aériennes. Ils ont été rapatriés en Turquie pour être hospitalisés. L'armée turque a immédiatement annoncé le bombardement de plusieurs positions du régime de Bachar Al-Assad en représailles.

"Des militaires turcs, se trouvant au sein d'unités combattantes de groupes terroristes, ont été pris sous le feu des soldats syriens", a affirmé vendredi le ministère russe de la Défense. Celui-ci affirme que la Turquie n'avait pas communiqué la présence de ses troupes dans la zone concernée et qu'elles "n'auraient pas dû s'y trouver". "Les forces aériennes de la Russie n'ont pas été utilisées dans cette zone", poursuit son communiqué. 

Le ministère assure qu'aussitôt que la Russie a été informée de la présence des militaires turcs dans la zone, elle a pris "toutes les mesures pour un cessez-le-feu total de la partie syrienne, assurant l'évacuation des morts et des blessés en toute sécurité vers le territoire de la Turquie".

La communauté internationale s'inquiète

Le porte-parole des Nations unies, Stephane Dujarric, a appelé "à un cessez-le-feu immédiat"

A défaut d'agir rapidement, le risque d'une escalade encore plus grande augmente d'heure en heure.

Stéphane Dujarric

Lors d'une conversation téléphonique avec le chef de la diplomatie turque, le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, a condamné les frappes aériennes "aveugles du régime syrien et de son allié russe". Il a "exhorté toutes les parties à une désescalade" et "à éviter que ne s'aggrave davantage la situation humanitaire épouvantable dans la région", selon un porte-parole de l'alliance nord-atlantique. Vendredi matin, Jens Stoltenberg a annoncé une réunion en urgence des ambassadeurs des 29 pays membres de l'organisation. 

"Nous soutenons notre allié de l'Otan, la Turquie, et continuons d'appeler à un arrêt immédiat de cette offensive odieuse du régime d'Al-Assad, de la Russie et des forces soutenues par l'Iran", a déclaré pour sa part un porte-parole du département d'Etat américain.

Des semaines d'escalade à Idleb

Le président de la Turquie, Recep Tayyip Erdogan, a convoqué un conseil de sécurité extraordinaire à Ankara. Signe que la situation risque d'empirer, la présidence a annoncé que l'armée turque bombardait dans la nuit de jeudi à vendredi des positions du régime de Bachar Aal-Assad. "Toutes les positions connues du régime ont été prises sous le feu de nos unités terrestres et aériennes", a affirmé le directeur de la communication de la présidence, Fahrettin Altun, dans un communiqué. 

Nos valeureux soldats seront vengés.

Fahrettin Altun

Par ailleurs, le président turc a exhorté la communauté internationale – y compris la Russie et l'Iran  – à "prendre [ses] responsabilités" pour "faire cesser les crimes contre l'humanité que commet le régime". Vendredi, Ankara a exhorté la communauté internationale à mettre en place une zone d'exclusion aérienne dans le nord-ouest de la Syrie, pour empêcher les avions du régime syrien et de son allié russe de mener des frappes.

Ces lourdes pertes essuyées par Ankara interviennent après des semaines d'escalade à Idleb. Avec le soutien de l'aviation de Moscou, le régime syrien a déclenché en décembre une offensive pour reprendre le dernier bastion rebelle et jihadiste d'Idleb. Ces dernières semaines, la Turquie a dépêché plusieurs milliers d'hommes et du matériel lourd dans cette région du nord-ouest de la Syrie pour épauler les rebelles pro-turcs, qui cherchent à repousser l'offensive menée par les forces gouvernementales syriennes.

Menaces de crise migratoire

Si la Turquie s'intéresse d'aussi près à Idleb, c'est notamment parce qu'elle redoute un nouvel afflux de réfugiés sur son sol, où quelque 3,6 millions de Syriens vivent déjà. Dans le cadre d'un accord conclu en 2016 avec l'Union européenne, Ankara s'était engagé à empêcher les passages de migrants vers l'Europe, notamment via la Grèce.

Mais la Turquie utilise depuis des années la crise migratoire comme un argument de négociations avec Bruxelles. Vendredi, un haut responsable turc a assuré à l'AFP que la Turquie n'empêcherait plus les migrants essayant de se rendre en Europe de franchir la frontière. La décision d'"ouvrir les portes" a été prise lors du conseil de sécurité extraordinaire présidé par Recep Tayyip Erdogan dans la nuit. 

Selon les médias turcs, des groupes de migrants se dirigeaient vendredi matin en direction de la frontière avec la Grèce dans l'ouest de la Turquie. L'agence de presse DHA a ainsi rapporté qu'environ 300 migrants syriens, irakiens ou encore iraniens étaient arrivés dans la province d'Edirne, à la frontière grecque.

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