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Avec Trump, l’Amérique du charbon rêve de renouveau
La Virginie-Occidentale en rêve. L’élection de Donald Trump annonce peut-être le retour du charbon roi. Durant la campagne, le nationalisme du président et sa position climato-sceptique ont donné de l’espoir aux habitants de l’Etat. Selon les statistiques officielles, 700 emplois de mineurs ont été créés au cours du dernier trimestre 2016 et la tendance se confirme.
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On dirait une chanson de Bruce Springsteen. La complainte de la classe ouvrière qui pleure les temps heureux où le travail ne manquait pas. Le charbon a longtemps été le pilier de l’économie de l’Etat de Virginie-Occidentale, troisième producteur des Etats-Unis. En 1948, il faisait travailler 125.000 personnes.
Comme dans d’autres bassins miniers dans le monde, on voue à l’industrie du charbon une vénération étonnante. Et même si des familles ont payé un lourd tribut fait de blessés, d’infirmes et de morts, il n’y a «ni amertume ni colère». C’est le journal canadien La Presse qui le dit. Il a rencontré Tasha, une jeune femme de 24 ans vivant à Madison, au cœur du bassin minier. Son grand-père, son père et un oncle ont été mineurs. «J’aime cette industrie, dit-elle. Elle m’a tout donné: le linge pour m’habiller, un toit au-dessus de ma tête et de la nourriture sur la table.» Et les drames, pourrait-elle ajouter…
La mine nourricière
Mais la mine donne du travail et la mine paye des taxes. Aussi, dans le pays, on n’est pas regardant sur les méthodes employées, en particulier le Mountain top removal. Il s’agit d’araser le somment des collines pour faciliter l’extraction du minerai et gagner en compétitivité. Selon Les Inrocks, en vingt ans, 500 sommets des Appalaches ont ainsi disparu.
En revanche, on en veut beaucoup aux démocrates et à Barack Obama. L’énergie propre, les normes d’émissions polluantes sont aux yeux des habitants de Virginie-Occidentale une des causes du déclin de l’industrie du charbon. La production, nous dit l’AFP, est retombée à son niveau de la fin du XIXe siècle. L’Etat ne cesse de perdre des habitants et la houille ne fait plus travailler que 13.000 personnes. Selon Les Echos, un mineur américain sur quatre travaille en Virginie-Occidentale. Mais le journal rapporte qu’il reste moins de 100 mines en exploitation, il y en avait trois fois plus il y a dix ans.
Contre Obama
Alors, les habitants de cet Etat traditionnellement démocrate, se sont jetés dans les bras de Donald Trump et ont voté pour lui à 68%. Et ils espèrent bien que le «America First» passera aussi dans le coin. Cela a bien commencé du reste. En février 2017, le Sénat a détricoté la «Stream Protection Rule». Une réglementation pour limiter les rejets des mines de charbon dans les cours d’eau. En fait, les eaux de ruissellement se chargent de métaux lourds en passant sur les déchets de minage.
La réglementation, voulue par Obama, imposait une zone tampon entre les rivières et les mines de charbon. Une bien faible contrainte pour les sociétés, mais c’était déjà trop. David McKinley, élu républicain de l’Etat, s’est félicité de ce vote. «Heureusement, avec le président Trump, nous avons maintenant un partenaire à la Maison Blanche qui comprend à quel point ces excès bureaucratiques peuvent être irresponsables et nuisibles.»
Le gaz naturel leader
Pourtant, les spécialistes n'imaginent pas un renouveau. Investir, exploiter à ciel ouvert ou assouplir la réglementation, ne réduira pas la concurrence des autres énergies. En particulier celle du gaz de schiste dont les techniques de fracturation hydraulique ont fait chuter les prix de ce mode d'énergie. Ainsi, dans les Etats du Nord-Est, le gaz naturel atteint 41% de la consommation d’énergie, une part qui a doublé en dix ans, quand, dans le même temps, celle du charbon passait de 31 à 11%.
Enfin, dans les Appalaches, les meilleurs filons de houille ont été exploités, et celui du Wyoming est bien moins coûteux à extraire. Mais les Américains ont ce sens inouï de la prise de risque. Certains industriels investissent et embauchent afin d’être les premiers à profiter d’un éventuel redémarrage. Un pari risqué, et pour l’instant ce n’est qu’un pari.
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