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Donald Trump : les trois recettes d'une campagne explosive

A force de déclarations chocs et de propositions improbables, l'homme d'affaires s'est hissé en tête des sondages dans la course à l'investiture républicaine aux Etats-Unis. Une recette qu'il applique depuis toujours. 

Article rédigé par Marie-Adélaïde Scigacz
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
  (SCOTT OLSON / GETTY IMAGES NORTH AMERICA)

Si la chaîne Fox a explosé les audiences, c'est grâce à lui. Donald Trump, l'excentrique milliardaire américain, candidat à l'investiture républicaine à la présidentielle de 2016, a assuré le show, dans la nuit du jeudi 6 au vendredi 7 août, lors du premier débat de la saison électorale, retransmis en direct à la télévision. A la fois bouffon de première catégorie et tout puissant magnat de l'immobilier (entre autres), l'homme d'affaires a provoqué rires, huées et applaudissements, à grand renfort de déclarations fracassantes, coups de gueule et autres provocations dont il a le secret. 

A 69 ans, cet ex-enfant ingérable placé à l'Académie militaire à l'âge de 13 ans, n'a rien perdu de sa capacité à jouer les trublions. Décidé à briguer la Maison Blanche, l'homme qui vaut 4 milliards (de dollars, selon Forbes) mène depuis depuis début juin une campagne qui lui ressemble. En voici les ingrédients. 

Un ego surdimensionné

Ce gagnant dans l'âme a sous-entendu jeudi qu'il pourrait se présenter sans étiquette s'il n'était pas investi par le parti Républicain, convaincu de la supériorité de sa candidature sur celle des autres. Humilité ? Connaît pas : "Je sais que certains d'entre vous pensent que je suis dur et sévère, mais je suis quelqu'un plein de compassion (avec un QI très élevé) et beaucoup de bon sens", tweetait-il en avril 2013, très sérieux. Un mois plus tard, il remettait ça, toujours sur le réseau social : "désolé les perdants et les rageux, mais mon QI est l'un des plus élevé, et vous le savez tous ! Merci de ne pas vous sentir bête ou de ne pas perdre confiance en vous, ce n'est pas de votre faute." 

Pour quelqu'un qui porte une escalope de dinde dorée à la poêle en guise de coiffure, Donald Trump ne manque pas d'amour-propre. Mégalo assumé à la tête de sa Trump Organization, il a hérigé une tour en plein Manhattan dès 1983, l'imposante "Trump Tower", suivie en 2001 par la "Trump World Tower" (alors la plus haute tour d'habitation du monde), la "Trump Place", toujours à New York, et enfin plusieurs "Trump International Hôtel" à travers les Etats-Unis. Trump, c'est aussi des barres de chocolats en forme de lingots d'or, des golfs luxueux, "Trump Golf", un caviste, "Trump Winery" et toute une floppée de marques éphémères (Trump l'eau minérale, Trump la compagnie aérienne, Trump le parfum, etc), développées puis abandonnées au cours de ces trente dernières années. L'entrepreneur revendique un libéralisme arrogant et sans complexe, résumé dans cette publicité de 1989 pour son propre jeu de société (devinerez-vous son nom ? ) : "ce qui compte, ce n'est pas ce que vous gagnez ou perdez, c'est de gagner."

Même philosophie dans son émission de télé-réalité, The Apprentice, diffusée en 2004 sur la chaîne NBC. Producteur du show, il proposait à des jeunes hommes et femmes d'affaires surmotivés de se soumettre à des épreuves pour décrocher un emploi dans sa firme. Sans bouder son plaisir, il a "licencié" plusieurs dizaines d'Américains sous le regard de toute la nation. 

Un sens de l'humour très personnel

Agacé par ses provocations, le Huffington Post américain a décidé en juillet de traiter l'actualité de la campagne du magnat de l'immobilier à la rubrique "Divertissement", au lieu de "Politique". Est-il pour autant le clown que moquent ses opposants ? "Ce que je dis est souvent drôle", a-t-il rappelé lors du débat de jeudi. Mais chez les libéraux, il fait rire à ses dépens. Lorsqu'il se fait violemment épingler au dîner annuel des correspondants à la Maison Blanche par l'humoriste Seth Meyer en mai 2011 (à partir de 1 min 45, en anglais), par exemple. Le même mois, il a pourtant tenté de faire preuve d'auto-dérision en participant à l'émission de la chaine Comedy Central "Roast", dont le concept est de laisser des stars tailler un short à un invité d'honneur. Se jouant de son orgueil, il gratifie le public en guise d'introduction d'une authentique "Trumperie" : "Quel honneur [silence] cela doit être pour vous de m'honorer ce soir", lance-t-il, taquin, avant de tenter une blague : "Connaissez-vous la différence entre un raton laveur mouillé et les cheveux de Donald Trump ? Un raton-laveur mouillé n'a pas sept p***** de milliards de dollars à la banque. Ah ah !" Pour voir Donald Trump mouillé, il faudra attendre 2014, et la vague des Ice Bucket Challenge.

S'il peine à se moquer de lui-même, il sait s'amuser des autres. Dans cette vidéo datée de 2007, tournée à l'occasion d'un match de catch opposant les poulains de célèbres millionnaires, il monte sur le ring, ricanant, pour raser la tête de son rival du jour, le patron de World Wrestling Ententainment, Vince MacMahon. Sept ans auparavant, il jouait déjà le décalage dans une vidéo humoristique présentée lors d'un dîner de charité, au côté du maire de New York, Rudy Giulani, travesti en femme :  pour la (mauvaise) blague, l'homme d'affaire plonge sa tête dans ses (faux) seins. 

 

Les femmes et les minorités dans son viseur

"Si Hillary Clinton ne peut pas satisfaire son mari, qu’est-ce qui lui fait croire qu’elle peut satisfaire l’Amérique ?" En retweetant cette phrase, Donald Trump a donné un avant-goût de ce que serait une course à la Maison Blanche disputée entre lui-même et la favorite du camp démocrate. Lorsqu'il parle des femmes, le Républicain oscille entre malaise ("si ce n'était pas ma fille, je sortirai peut-être avec", a-t-il dit de son ainée) et propos carrément violents. De la chanteuse Cher, à la journaliste Ariana Huffington ("Je comprend vraiment que son mari l'ait quitté pour un homme") en passant par l'animatrice Rosie O'Donnell, il trouve l'inspiration pour ses attaques dans leur physique et leur vie privée.

En tant que président de l'organisation Miss Univers, ce docteur ès beauté autroproclamé s'est permis de traiter Angelina Jolie de laideron sur CNN ("Je connais bien la beauté, et ce n’en est pas une") et Kristen Stewart de femme volage, le tout dans une série de tweets surréalistes, datés de 2012. A l'époque, il conseille à son ex, Robert Pattinson, de "ne pas la reprendre. Tu peux faire mieux." 

"Sexiste", il est aussi qualifié par ses détracteurs d'"oncle raciste de l'Amérique." Lors de l'annonce de sa candidature, le 16 juin, il s'est en effet attaqué aux migrants mexicains. "Quand le Mexique nous envoie ses gens (...) ils envoient ceux qui posent problèmes. Ils apportent avec eux la drogue. Ils apportent le crime. Ce sont des violeurs". Sa solution ? Construire, "un grand mur sur notre frontière sud", payé par le gouvernement mexicain. Pas sur que ces déclarations lui accordent les faveurs des latino-américains. 

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