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Tueries aux États-Unis : "On ne peut pas toujours s'abriter derrière la folie individuelle ou la lâcheté"

La politologue Marie-Cécile Naves est revenue sur le profil des tueurs de masse, alors que les États-Unis ont connu deux nouvelles fusillades pendant le week-end.

Article rédigé par franceinfo
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Des forces de l'ordre à la sortie d'un Wal-Mart où une fusillade s'est produite à El Paso, au Texas (États-Unis), samedi 3 août 2019. (JOEL ANGEL JUAREZ / AFP)

"On ne peut pas toujours s'abriter derrière la folie individuelle ou la lâcheté", a affirmé Marie-Cécile Naves, auteure de Trump, la revanche de l'homme blanc, politologue et chercheuse à l'Iris, dimanche 4 août sur franceinfo. Une nouvelle tuerie de masse a fait 20 morts samedi dans un centre commercial d'El Paso, au Texas, aux États-Unis. Une deuxième fusillade s'est déroulée dans la nuit à Dayton, dans l'Ohio, qui a fait au moins 10 morts, dont le tireur.

>> DIRECT. Etats-Unis : un tireur fait neuf morts avant d'être abattu à Dayton, dans l'Ohio, moins de 24 heures après la tuerie d'El Paso

franceinfo : À propos de la tuerie d'El Paso, quand les autorités américaines évoquent un crime motivé par la haine, cela veut-il dire une tuerie raciste ?

Marie-Cécile Naves : Il faut voir comment l'enquête va évoluer, car pour l'instant, on n'a pas trop de certitudes. Ce que la police soupçonne, en effet, c'est un crime à caractère raciste. S'il est confirmé que le long texte qui a été trouvé, que le tireur aurait rédigé sur internet est bien de lui, et dans lequel il parle d'une invasion hispanique au Texas, d'un refus du métissage, cela est possible. Dans cette partie du Texas, la population est composée à 80% d'Hispaniques ou de personnes d'origine sud-américaine, donc effectivement la motivation raciste est à vérifier.

Mais heureusement, tous les gens qui sont racistes ne tirent pas dans la foule, sinon il y aurait beaucoup plus de tueries de masses et de meurtres. La motivation raciste, si elle existe, ne suffit pas à expliquer ce geste. On retrouve très souvent ce profil masculin, blanc. Ce serait bien que les politiques publiques en démocratie se posent la question de la masculinité toxique dans ces fusillades de masse. On retrouve très souvent un passé de violence envers les femmes et/ou de haine contre la communauté LGBT dans le profil des tireurs. On est sans doute, à vérifier, dans un cas de motivation raciste contre le multiculturalisme, mais il y a aussi sans doute une question de violence de genre. On ne peut pas toujours s'abriter derrière la folie individuelle ou la lâcheté, comme l'a dit le président Trump. C'est exceptionnel que ce ne soit pas des actes commis par des hommes.

La rhétorique de Donald Trump alimente-t-elle ce genre de violences ?

C'est une question que l'on peut effectivement se poser. Ce n’est évidemment pas Donald Trump qui tenait un fusil d'assaut dans ses mains, mais au moment où vous avez les plus hautes autorités, le président en tête, qui relaient des paroles racistes, il y a un certain nombre de personnes qui peuvent se sentir un peu plus légitimes pour agir et avoir eux-mêmes des actes de violences racistes. C'est comme si on donnait un chèque en blanc aux racistes. Cela ne crée pas un climat de sérénité si vous avez les autorités qui entretiennent un climat de haine et de division raciale.

Finalement, une partie de la population a du mal à accepter que le pays, d'ici trente ans, ne soit plus majoritairement blanc. Pour une très petite minorité de gens, c'est absolument insupportable. Le passage à la violence peut être une manière d'exprimer cette frustration, ce refus d'une évolution démographique. On est dans un climat de division que le président entretient. Nous sommes dans une campagne électorale et peut-être encore plus qu'en 2016, Donald Trump va axer sa campagne sur le thème de l'identité, l'identité blanche américaine qui est menacée.

Cette fusillade va-t-elle une nouvelle fois relancer le débat sur le port d'arme aux États-Unis ?

C'est toujours la même question. Il y a plus d'une fusillade de masse par jour aux États-Unis, plus de 250 déjà depuis le début de l'année. C'est toujours le même sujet. Le pouvoir en place, à la fois au Texas et au niveau fédéral, est contre toute forme de régulation. Peut-être que ce sujet de la régulation du port d'arme va venir un peu plus dans la campagne présidentielle du côté des démocrates. Elle est déjà là, elle est portée par la jeunesse américaine, la génération qu'on appelle post-Columbine. Est-ce que ça va devenir un sujet très fort sur l'agenda démocrate pour la prochaine présidentielle ? C'est tout à fait possible.

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