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"François déçoit les plus progressistes" : le bilan en demi-teinte du pape, dix ans après son élection

"Le pape a toujours dit des choses très intéressantes, mais il n'a rien fait", dénonce Lucetta Scaraffia qui a dirigé un magazine pour les femmes au Vatican.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Le pape François à Rome le 6 mai 2018, lors d'une visite pastorale. (VINCENZO PINTO / AFP)

"Si une personne est gay, qui suis-je pour la juger ?" Le pape François avait immédiatement marqué sa différence quand il a été élu il y a dix ans, le 13 mars 2013 à Rome. Il s'agissait d'un changement d'époque pour l'Église, qui voyait pour la première fois un non-Européen devenir pape, un pape jésuite des Amériques. Dix ans après, que retient-on ? Quelles réformes ont réellement abouti ? Le pape François est-il un vrai réformateur sur les questions de société ?

Ce pape, venu de l'autre bout du monde, ne juge pas : il accueille, prône la miséricorde. C'est sa marque de fabrique, selon le vaticaniste Antonio Pelayo, prêtre et conseiller de l'ambassade d'Espagne. "Il a un regard différent : l'homosexualité est une réalité, on ne peut pas ignorer que beaucoup d'hommes et de femmes sont homosexuels, sont nés homosexuels. François pense que l'Église ne peut pas les laisser dehors, éloignés pour toujours de l'église."

Un pape qui reste prudent sur les réformes de l'église

Sauf que dans le catéchisme de l'église catholique l'homosexualité reste intrinsèquement désordonné. Pour le théologien Philippe Bordeyne, président de l'Institut Jean-Paul II sur la famille à Rome, ce pape réformateur sait, en fait, rester, prudent. "Cela peut être son rôle de remettre en cause le catéchisme, puisqu'il a changé, comme sur la peine de mort par exemple. Mais je pense que François est conscient, aussi, des risques de division de l'Eglise", analyse-t-il.

D'un côté il y une partie de l'Église plus conservatrice, qu'il ne veut pas voir s'éloigner, et de l'autre, si François multiplie les ouvertures, cela ne suit pas ensuite : le dogme, la doctrine ne changent pas, et donc, François déçoit les plus progressistes. L'historienne Lucetta Scaraffia, qui a dirigé le premier magazine pour les femmes du Vatican, Donna Chiesa Mondo, mais a jeté l'éponge il y a quatre ans, dénonce pour sa part :"Je suis très déçue parce que le pape a toujours dit des choses très intéressantes qui donnaient beaucoup d'espoir, mais il n'a rien fait !"

"Il n'y a jamais eu de mesures concrètes pour les femmes. Je pense que c'est un pape qui a très bien réussi à se construire une image médiatique progressiste, mais sans passer à l'action."

Lucetta Scaraffia

à franceinfo

"Finalement, il n'y aura jamais de bon pape pour les femmes. Elles devront se faire une place dans l'église en l'exigeant ou en s'imposant comme elles l'ont fait dans le reste de la société", avance l'historienne.

Une avancée tout de même : il y a dix ans, moins de 20% des employés du Vatican et du Saint-Siège étaient des femmes. C'est presque un quart maintenant, et le pape a nommé des femmes à des postes de direction, c'est une première. Il y aura même une numéro 1 dans un ministère avant deux ans, a promis le pape François.

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