Olivier Metzner, pénaliste renommé et homme secret

Le célèbre avocat pénaliste Olivier Metzner, retrouvé mort dimanche 17 mars près de son île privée du golfe du Morbihan, à l'âge de 63 ans, laisse le barreau sous le choc. Alors qu'une autopsie doit être effectuée lundi, la thèse du suicide est privilégiée : une lettre évoquant sa volonté de mettre fin à ses jours a été retrouvée chez lui. 

Un avocat pénaliste de talent

On ne compte plus tous les grands dossiers passés entre les mains du pénaliste, qui a défendu entre autres Jérôme Kerviel, Bertrand Cantat ou l'ancien dictateur panaméen Manuel Noriega. Il était également le conseil de Dominique de Villepin dans l'affaire Clearstream, de l'homme d'affaires Loïk Le Floch-Prigent dans le dossier Elf, de l'ancien patron de Vivendi Jean-Marie Messier ou encore de Rachida Dati. Notre confrère de France 2 Dominique Verdeilhan a salué "un redoutable praticien du droit", qui "s'immergeait littéralement dans les dossiers avec ses collaborateurs" et dont le "cabinet, rue Saint-Dominique, ne désemplissait pas".

Le futur bâtonnier de Paris, Pierre-Olivier Sur, livre un autre aspect de son travail. Il estime qu'Olivier Metzner "a fait de son nom une marque" et inventé "la défense de procédure, de même que Jacques Vergès avait inventé la défense de rupture". Il devait une bonne part de sa réputation à sa capacité à traquer les nullités de procédure. Selon lui, Olivier Metzner a transformé le pénaliste "en avocat moderne sur le mode de l'avocat d'affaires". Plusieurs grandes entreprises s'étaient attaché ses services. Avocat historique de Bouygues, il représentait également l'organisme de certification maritime Rina dans le dossier de l'Erika, ainsi que la compagnie Continental pour le crash du Concorde.

Un homme secret

Cette fin tragique a surpris nombre de ses confrères. "Je suis abasourdi. Les conditions de sa mort me permettent de voir qu'Olivier Metzner avait lui aussi ses fragilités", a confié Me Georges Kiejman, qui lui livrait un duel "féroce", écrit Le Figaro. Autre avocat pénaliste, Me Patrick Maisonneuve s'est avoué "consterné et assez choqué" : "Je le connaissais depuis trente ans, (…) je lui ai encore parlé jeudi, nous devions entreprendre une démarche commune sur un dossier, il parlait alors encore d'avenir". Comme de nombreux proches du ténor du barreau, il reconnaît "un homme secret, qui ne partageait pas vraiment sa vie personnelle".

Son entourage professionnel n'en savait pas davantage sur le personnage. Emmanuel Marsigny, qui travaillait avec lui depuis vingt ans, a regretté "que quelqu'un d'aussi talentueux que lui n'ait pas réussi à trouver les ressources pour se défendre de lui-même et contre lui-même". L'avocat Jean-Yves Le Borgne, lui, a côtoyé Olivier Metzner pendant quarante ans. "Je dirais 'côtoyer' car c'était un homme solitaire et secret, et bien qu'étant dans un rapport amical, je ne savais pas grand-chose de lui."

Sur sa page Facebook, le journaliste Denis Robert raconte un épisode troublant, qui s'est déroulé lors d'un entretien tourné avec l'avocat en 1997. "C'était une très bonne interview. Et puis, sans prévenir, une larme a coulé. Puis deux, puis un flot de larmes. Il a demandé de couper la caméra. Il pleurait comme un bébé en s'excusant", se souvient le journaliste, qui détaille : "Il nous a alors expliqué qu'il avait raté sa vie. Son vrai bonheur eût été d'être marin et de partir en mer. Le boulot d'avocat le minait."

Une figure médiatique 

Des critiques étaient parfois adressées à cet avocat de renom sur "le prix de ses honoraires" et sur ses "duels d'homme à homme contre certains confrères", concède Pierre-Olivier Sur. Mais "jamais on a entendu dire qu'il aurait triché ou qu'il aurait confondu son métier avec celui de certains de ses clients".

Inscrit au barreau de Paris depuis 1975, il avait commencé sa carrière en défendant des truands. Depuis, sa silhouette était bien connue de ses confrères et des journalistes. Ce grand amateur de cigares avait pour habitude d'en allumer lors des suspensions de séance, en haut de l'escalier monumental du palais de justice. Il était régulièrement pris de quintes de toux. Certains le disaient fatigué.

Pour autant, Olivier Metzner savait mieux que quiconque orchestrer la parole dans les médias. "Je planifie tout à l'avance. Quand je communique, les instructions sont respectées : une agence fait un communiqué au jour dit, un journal publie l'info à un autre moment convenu d'avance, pareil pour les radios ou les télés", expliquait-il, selon les propos rapportés par Le Nouvel Observateur.