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A Nice, "une cuvée imbuvable"

Vue de l'extérieur, une réunion de militants frontistes pourrait apparaître monolithique. Mais il n'en est rien. Si officiellement, tous font bloc derrière "Marine", les critiques ne manquent pas. Et quand les langues se délient, c'est stupéfiant.
Article rédigé par Catherine Rougerie
France Télévisions
Publié Mis à jour
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Une bouteille de Champagne Gaston Révolte, à l'effigie du fondateur du Front National, Jean-Marie Le Pen. (Catherine Rougerie)

Vue de l'extérieur, une réunion de militants frontistes pourrait apparaître monolithique. Mais il n'en est rien. Si officiellement, tous font bloc derrière "Marine", les critiques ne manquent pas. Et quand les langues se délient, c'est stupéfiant.

On trouve toutes sortes de choses aux "Journées d'été de Marine" qui se tiennent ce week-end, à Nice: des inévitables pin's, portes-clé, affiches, tracts, bons de souscription, drapeaux tricolores, etc. à des lots plus surprenants tels que cette cuvée du chef à l'effigie de l'ancien président du Front National (FN), Jean-Marie Le Pen.

Et à en croire le sommelier du jour, qui officie sur le point de vente où est proposé le cru à l'entrée de l'auditorium de l'Acropolis de Nice, le breuvage "est imbuvable". Il a mal vieilli. Sans doute.

Côté militants, les rencontres ne manquent pas non plus de piquant.

"Si Marine Le Pen a tout ce succès dans les médias, c'est qu'elle n'est pas dangereuse", explique un militant qui se définit "d'extrême-droite". Agé de 71 ans, et revendiquant plus de cinquante ans de militantisme, dont vingt au sein du Front National. Pourtant, il est "déçu". "Le FN est neutralisé par les mondialistes. Golldnish, lui, aurait fait quelque chose" (Bruno Golldnish a été battu par Marine Le Pen désignée présidente du FN, lors du Congrès de Tours en janvier 2011, ndlr)

On sent poindre la thèse, chère à l'hebdomadaire français d'extrême-droite, Rivarol, fondé en 1951 par René Malliavin. Dans le mille. Ce même militant, qui requiert l'anonymat, est un adepte du "révisionnisme" et réclame sur ce sujet, ni plus ni moins qu'un débat. "Nous avons des arguments, mais nous ne pouvons pas les exposer. Dans quel pays est-on ?", s'agace-t-il. "La preuve, si vous me citez, je risque la prison".

L'opposition de Marine le Pen aux différentes tentatives d'entrisme au sein du Front National (exclusion des cadres du mouvement antisémite et pétainiste de l'Oeuvre Française) ne lui a pas fait que des ami(e)s.

"La dédiabolisation est un monstre froid..."

Récemment exclu du FN et proche de Bruno Gollnisch, Yvan Benedetti est de ceux-là. Il s'en est d'ailleurs pris à l'eurodéputée samedi, lors d'un point-presse dans un hôtel de Nice, non loin des "Journées d'été Marine Le Pen".

L'accusant d'avoir passé un accord secret pour la présidentielle et les législatives avec le Bloc Identitaire, des affirmations que la présidente du FN a aussitôt qualifiées de "sottises", il dénonce par ailleurs sa stratégie de "dédiabolisation du parti": "Marine Le Pen a coupé les têtes d'Alain Gabriac (autre élu exclu du FN pour une photo où il fait le salut nazi, ndlr) et de moi-même parce que la ligue de défense juive le lui a demandé".

L'élu de Vénissieux (Rhône) ne digère toujours pas son éviction pour deux ans en juillet, notamment pour des propos où il s'était déclaré "antisémite". Et il prévient: "La dédiabolisation est un monstre froid qui ne se contentera pas de nos têtes".

Une question de génération

A Nice, sont aussi présents les "résignés", ceux qui reprochent à Marine Le Pen "sa trop grande ouverture, notamment aux gaullistes". Pieds-noirs, originaires d'Oran, ils ne supportent pas la simple évocation du "Général de Gaule" (notamment parce que ce dernier a approuvé le principe du droit à l'autodétermination du peuple algérien, ndlr).

Viennent ensuite ceux qui auraient préféré Bruno Gollnish "pour l'homme et sa façon de parler". "Une question de génération", reconnaissent-ils, puis enfin ceux qui reprochent à l'actuelle patronne du FN d'avoir transformé le parti en un simple fan-club et supprimé la flamme de l'affiche.

A Nice, comme le dit Sidonie Gabrielle Colette: " Il est bon de traiter l'amitié comme les vins et de se méfier des mélanges".

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