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Municipales 2020 : après sa percée, quelle stratégie pour Europe Ecologie-Les Verts au second tour ?

Article rédigé par Mathilde Goupil
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Le secrétaire national d'Europe Ecologie-Les Verts, Julien Bayou, et l'eurodéputé du même parti, Yannick Jadot, lors d'un congrès à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), le 30 novembre 2019. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

Fusion avec les listes de gauche arrivées en tête, désistement en cas d'extrême droite forte... Malgré ses bons résultats dans certaines grandes villes, le parti dirigé par Julien Bayou ne compte pas chambouler sa stratégie habituelle.

L'information est presque passé sous les radars, tant la crise du coronavirus a pesé sur le premier tour des élections municipales. Avec une percée dans plusieurs grandes villes (Lyon, Strasbourg, Nantes...), Europe Ecologie-Les Verts s'est affirmé, lors du scrutin de dimanche 15 mars, comme une nouvelle force politique à ne pas sous-estimer. Et pas seulement aux élections européennes, où le parti avait décroché la troisième place, à la barbe des Républicains.

L'évolution des listes EELV au premier tour des élections municipales. (FRANCEINFO)

A Grenoble, où le maire écologiste sortant Eric Piolle arrive en tête avec plus de 46% des voix, mais aussi à Lyon où La République en marche partait divisée, ou encore à Strasbourg, malgré une candidate inconnue voilà quelques semaines, Europe Ecologie-Les Verts est sorti en tête du premier tour. Dans d'autres communes, le candidat vert talonne le premier arrivé, comme à Bordeaux, où le candidat divers-droite Nicolas Florian (34,55%) ne devance l'écologiste Pierre Hurmic (34,38%) que d'une poignée de voix.

Répéter la stratégie grenobloise

"Quand il y a un maire sortant de gauche, les écologistes arrivent souvent en deuxième position, comme à Nantes, Rennes ou Lille. Mais dès qu'il y a un maire de droite, ce sont les Verts qui captent le potentiel de l'alternance, ce sont vers les Verts que se tournent les électeurs pour battre la droite", analysait dès dimanche soir pour franceinfo Simon Persico, professeur de sciences politiques à Sciences Po Grenoble

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Une position de force que le secrétaire national d'EELV, Julien Bayou, compte bien utiliser. En dépit de l'incertitude qui pèse sur la tenue du second tour, dimanche 22 mars, ce dernier rappelle que les listes souhaitant fusionner avec celles d'Europe Ecologie-Les Verts devront faire des concessions. "Quand l'écologie arrive en tête, les discussions pour les alliances se font sur la base de ce projet, c'est le projet du candidat écologiste qui fait foi", martèle-t-il à franceinfo.

Une stratégie qui "avait valu au parti de conquérir sa première mairie, à Grenoble", en 2014, rappelle Daniel Boy, spécialiste de l'écologie politique au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof). La liste d'Eric Piolle, arrivée en tête au premier tour avec 29% des voix, avait remporté le scrutin avec plus de 40% des voix, contre 27% pour son opposant socialiste. Depuis, la ville a servi de laboratoire à EELV, et les décisions radicales de la mairie écologiste (suppression des panneaux publicitaires, réduction de la vitesse de circulation, nombreuses rues piétonnisées...) ont assuré la publicité du parti. Visiblement avec succès : lors du premier tour de 2020, Eric Piolle a fait mieux que son score au second tour en 2014. 

Des alliances à gauche mais pas avec LREM

Pour autant, les bras seront ouverts à tous ceux qui se reconnaîtront dans le programme écologiste. A Lyon, les appels de pied de l'ex-LREM Georges Képénékian, ancien successeur de Gérard Collomb à la mairie, qui s'est finalement présenté en dissident, pourraient ainsi être entendus. "Si des anciens 'marcheurs', ou d'autres, choisissent de rejoindre des listes écolos, ça présume d'un pas de côté par rapport au programme d'Emmanuel Macron au niveau national", justifie Julien Bayou.

L'inverse n'est pas vrai : lorsqu'il n'est pas arrivé en tête, pas question pour Europe Ecologie-Les Verts de soutenir "un parti de droite", y compris LREM, rappelle le secrétaire national du parti. "Il s'agit d'une stratégie habituelle du parti, que même Yannick Jadot va, me semble-t-il, admettre", souligne Daniel Boy, alors que l'eurodéputé a à de nombreuses reprises plaidé pour que l'écologie politique s'ouvre aux partis extérieurs à la gauche.

En revanche, les fusions avec la gauche arrivée devant la liste écologistre resteront de mise. Y compris dans les communes où EELV réalise de très bon scores, comme à Nantes (19,58% des voix).

L'enjeu est de transformer la confiance des électeurs en rapport de forces dans le mandat qui vient, et le meilleur moyen de le faire, c'est en fusionnant avec la liste de gauche qui arrive en tête, moyennant un accord programmatique.

Julien Bayou

à franceinfo 

"On peut imaginer que ces villes [où EELV est derrière une liste de gauche] rentrent dans les négociations pour des alliances dans d'autres villes où EELV serait en tête, suivi du PS", avance dans Le Parisien le chercheur Simon Persico. Le Parti socialiste pourrait ainsi se retirer dans une ville où il arrive second, en échange d'un retrait d'EELV dans une autre ville.

Enfin, lorsque la mairie risque de revenir à l'extrême droite, la liste écologiste se désistera, promet Julien Bayou, qui refuse que "Europe Ecologie-Les Verts soit le parti par lequel l'extrême droite arrive au pouvoir". Interrogé le 9 février, lors de l'émission "Le Grand Jury" diffusé par RTL, LCI et Le FigaroYannick Jadot avait lui aussi exprimé cette volonté... tout en soulignant qu'en 2014 à Perpignan (Pyrénées-Orientales), une telle stratégie contre le candidat frontiste Louis Aliot n'avait pas "amélioré les choses".

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