Affaire Nyssen : "C'est la manière de procéder qui est insupportable", estime le président de l'association "Sites et Monuments"
L'association Sites et Monuments n'exclut pas de se porter civile en cas de procédure judiciaire. Son président, Alexandre Gady, juge que la ministre est dans une "situation impossible".
La ministre de la Culture Françoise Nyssen est au cœur d'une enquête préliminaire ouverte jeudi par le parquet de Paris, concernant des travaux au siège d'Actes Sud à Paris, la maison d'édition qu'elle dirigeait auparavant. Selon les révélations du Canard enchaîné, ces travaux auraient été réalisés "sans autorisation", "ni déclaration au fisc."
L'association Sites et Monuments avait annoncé son intention de porter plainte. Elle attend désormais les résultats de cette enquête, et n'exclut pas de se porter partie civile en cas de procédure judiciaire, parce que ces travaux, réalisés en 1997 et à partir de 2012, ont eu lieu dans des bâtiments classés. "Nous essayons de choisir des combats pédagogiques", a expliqué sur franceinfo, Alexandre Gady, son président et professeur d'histoire de l'art moderne, spécialisé en architecture à la Sorbonne. "On a une ministre de la Culture qui a la garde de la loi sur le patrimoine, du droit du patrimoine, qui doit porter un discours d'exemplarité, et ce qui nous a frappé dans ce dossier, c'est que madame Nyssen est dans une situation impossible. Elle devrait, elle, interpeller la personne qui a fait les travaux sans autorisation, mais comment peut-elle s'autoréguler elle-même ?"
franceinfo : Qu'est-ce qu'on lui reproche concrètement, vous qui connaissez bien le droit du patrimoine et les règles d'urbanismes dans des bâtiments classés ?
Tout simplement de s'en être affranchie. D'après les informations du Canard enchaîné, il est clair que Mme Nyssen n'a pas fait ce que vous ou moi nous devrions faire. Nul n'est censé ignorer la loi et donc là il y a un manquement très grave. Et c'est encore plus grave quand on entend la ministre dire 'oh ben ce n'est pas grave, on va régulariser'. Mais régulariser quoi ? Ça veut dire qu'on va remettre les bâtiments dans l'état d'avant ?
Actes Sud va se mettre en conformité, ça ne suffit pas à clore l'affaire selon vous ?
Non parce que dans les deux cas, Arles et Paris, il y a des modifications substantielles d'une certaine partie des édifices, donc ça veut dire quoi régulariser ? On met en papier en disant 'c'est bon' et on passe à autre chose ? On reprend la procédure depuis le début ? Ou modifier ce qui a été réalisé sans autorisation ? C'est quand même très compliqué. Et qui va appliquer ça ? Des fonctionnaires du ministère dont Mme Nyssen à la garde. On tourne en rond.
Les bureaux de la maison d'édition sont situés dans le quartier Latin à Paris, apparemment ce sont des mezzanines en bois qui ont été installées, est-ce que ça a endommagé irrémédiablement les bâtiments ?
Heureusement non, ce sont les volumes qui ont été bouleversés. Mais c'est cette manière de procéder qui est insupportable, c'est justement ce que le ministère est censé défendre face au citoyen. Les règles du droit du patrimoine sont fortes, et il faut les appliquer. Comment dire à des gens : 'Vous faites des travaux illégaux, je vais sévir' quand vous êtes vous-même pris la dedans ?
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