"Indigent", "enfumage", "vigilance" : les réactions après le discours de politique générale de François Bayrou

Le Premier ministre a prononcé un discours de près d'une heure et demie appelant notamment au "ressaisissement" national pour écarter "l'épée de Damoclès" du surendettement.
Article rédigé par franceinfo
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François Bayrou à la tribune de l'Assemblée nationale, mardi 14 janvier, à l'occasion de son discours de politique générale. (THOMAS SAMSON / AFP)

François Bayrou a prononcé sa déclaration de politique générale, mardi 14 janvier, devant l'Assemblée nationale. Le Premier ministre a notamment indiqué qu'il remettait la réforme des retraites "en chantier, avec les partenaires sociaux" sans "aucun tabou", mais sans la suspendre. En revanche, faute d'accord, la réforme actuelle continuera de s'appliquer, a indiqué le Premier ministre.

LFI et les écologistes voteront la censure

En réaction, les insoumis ont d'ores et déjà annoncé qu'ils voteront la censure. "Puisque M. Bayrou refuse le vote de confiance, nous lui imposons un vote de défiance. Celles et ceux qui ne voteront pas cette motion de censure seront complices des ravages de la politique macroniste", peut-on lire dans un message partagé par le groupe La France insoumise sur Instagram et partagé par les ténors du parti, Manuel Bompard ou encore Mathilde Panot.

Le leader des Insoumis, Jean-Luc Mélenchon, qui a suivi la déclaration de politique générale de François Bayrou depuis l'Assemblée nationale, a quant à lui partagé un message sur X : "Bayrou : discours d'enfumage", écrit-il. La député LFI-NFP Clémence Guetté a également réagi sur Instagram. "Bayrou est mauvais. Il a confirmé qu'il ne bougerait sur rien. Le cirque est terminé : les négociations n'ont servi qu'à humilier ceux qui y ont participé. C'est maintenant la censure ou le déshonneur", prévient-elle. Pour Eric Coquerel, président de la Commission des finances, "c'est un discours dans lequel il n'y a rien. Et ça doit nous convaincre encore plus de le censurer. (...) On verra bien ce que font les socialistes, mais je ne vois pas comment un opposant conséquent peut laisser un sursis à ce gouvernement. Et a fortiori si c'est un opposant du NFP."

Le groupe écologiste et social a également annoncé qu'il votera "dans deux jours" la censure contre le gouvernement de François Bayrou, a assuré la présidente du groupe, Cyrielle Chatelain, "atterrée" par un "discours indigent" et "flou". "Tant que ce gouvernement s'obstine, reste sectaire et refuse de prendre des mesures pour changer la vie des Français, nous le censurerons, dit Cyrielle Chatelain. Dans deux jours, nous voterons la censure." Même tonalité pour le député de la Somme François Ruffin, qui siège avec le groupe écologiste et social : "Ni annulation, ni abrogation, ni gel, ni suspension... Ce sera donc la censure du gouvernement Bayrou", a-t-il tranché.

Du côté des communistes, Fabien Roussel exprime sur les réseaux sociaux le sentiment de "revivre le même film, un jour sans fin". "Tout ça pour ça ! Nous sommes très loin du compte sur les retraites, le pouvoir d'achat, les salaires, l'emploi, les services publics, l'industrie. L'austérité encore et toujours."  

Ultimatum posé par les socialistes

Mardi soir sur TF1, le Premier secrétaire du PS Olivier Faure a déclaré que le parti censurera Bayrou, sauf s'il obtient "une réponse claire" sur son exigence de soumettre au Parlement la question des retraites. "Ce que je demande au Premier ministre, c'est qu'il soit clair et qu'il dise que, qu'il y ait accord ou pas accord entre les partenaires sociaux, le Parlement sera saisi de la question des retraites sur la base des propositions qui auront été faites par les uns et par les autres", a-t-il développé. 

Un peu plus tôt, le président du groupe socialiste Boris Vallaud a jugé que "le compte n'y (était) pas" après le discours de François Bayrou. Face à l'annonce que tout était "négociable" sur la réforme des retraites, y compris l'âge de départ à la retraite à 64 ans, il s'est réjoui de voir sa "demande" satisfaite : "la perspective d'une loi avant l'été, nous la prenons", a-t-il déclaré. Mais "notre objectif demeure l'abrogation", a poursuivi Boris Vallaud devant l'Assemblée. 

"Aucune garantie n'a été donné au PS", avait également réagi le député PS Philippe Brun devant la presse à l'Assemblée nationale. "On peut voter la censure dès jeudi, c'est le souhait de beaucoup de nos collègues", avait-t-il également prévenu.

La droite se félicite, mais reste "vigilante"

"Je me félicite que la réforme des retraites n’ait été ni abrogée, ni suspendue. Mais nous devons rester vigilants pour empêcher de creuser la dette. Maintenant, place aux actes sur la débureaucratisation, la décentralisation et la baisse de la dépense publique", réagit sur X la présidente LR de la région Ile-de-France Valérie Pécresse sur X.

A la tribune, le président du groupe, Laurent Wauquiez, a prévenu que LR s'opposerait à la proportionnelle proposée par le Premier ministre, tout en apportant un "soutien exigeant, texte par texte" au gouvernement. "La proportionnelle, c'est la garantie que le désordre politique exceptionnel que nous connaissons aujourd'hui deviendra la règle", a-t-il dit.

Sur franceinfo, le député Les Républicains Vincent Jeanbrun a également salué le fait que François Bayrou "a compris qu'il y avait une nécessité de sérieux budgétaire". Sur la question des retraites, il se dit "très heureux d'avoir été entendu et de ne pas avoir basculé dans le grand bazar économique". Il estime que "la droite républicaine se satisfait d'avoir entendu beaucoup de thématiques que l'on porte et que l'on défend : la revalorisation du travail, l'ordre avec la politique de sécurité et l'agriculture."

"On ne peut pas dire que le Premier ministre ait été d'une extrême précision. On jugera sur les actes", a pour sa part déclaré le député LR Olivier Marleix à la presse à l'Assemblée nationale, évoquant "un discours qui ne fâche personne".

Ensemble pour la République salue "une position courageuse"

Le président du groupe macroniste Ensemble pour la République (EPR), Gabriel Attal, a salué la "position courageuse" de François Bayrou sur la réforme des retraites, qu'il juge "vitale" même si, selon lui, "être responsable politiquement, c'est avoir le courage de dire qu'aucune réforme n'est parfaite". Dans son discours, Gabriel Attal s'est également adressé aux députés socialistes, en les encourageant à "se détacher de la gauche la plus radicale" : "Si vous vous engagez à ne pas voter la censure, je crois que les Français pourront reprendre espoir (...) Espoir d'une vie politique qui n'est plus l'otage de l'extrême droite". 

"On va réatterrir sur une retraite à points, ce qui est plus juste", prévoit le député Modem du Loiret Richard Ramos. Il s'agira ensuite de savoir "comment en trois mois - ce sera toute la magie de François Bayrou - on passe d'un système à un autre, qui est celui à points." Le sujet d'autant plus crucial que "c'est ce qui fera que le PS sera [ou non] arrimé avec nous", précise l'élu.

"Déception" pour le RN, mais pas de censure

"Au terme d'un discours lénifiant, François Bayrou a démontré qu'il n'était pas l'homme de la rupture, mais celui de la continuité molle, du bavardage et de la concertation "sans fin". Rien sur le pouvoir d'achat, rien sur l'insécurité, rien de concret sur l'immigration : la vie des Français est la grande absente de cette allocution pour rien", écrit sur X le président du Rassemblement national, Jordan Bardella.

Parmi les orateurs qui ont défilé à la tribune, le député RN Jean-Philippe Tanguy a également fustigé "les gros machins et gros bidules" annoncés par le Premier ministre, parlant d'une "déception". Ce discours "n'a pas vocation à nous rassurer", pour autant, le RN ne va "pas aujourd'hui", voter la censure, a déclaré sur franceinfo Sébastien Chenu, député RN. "Nous pouvons nous réserver de voter la censure sur des actes budgétaires", même si "là nous avons un Premier ministre peu entraînant, très éloigné de l'ambition qu'on devrait avoir pour notre pays". "C'est un discours qui manque d'ambition, de souffle, qui reste très abstrait", a fustigé Sébastien Chenu. "Un discours si long, si soporifique, on ne s'attendait pas à grande chose, on est quand même très déçus".

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