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L'Assemblée a adopté mercredi soir le projet de Budget 2011, après un bras de fer entre François Baroin et les députés

Ce budget est marqué par la volonté du gouvernement de ramener coûte que coûte le déficit de l'Etat de 152 à moins de 92 milliards d'euros en un an, en attendant la réforme fiscale du printemps 2011.Le ministre du Budget François Baroin a endossé le costume de "cost killer" à l'affût du moindre million d'économie pour diminuer le déficit.
Article rédigé par France2.fr avec AFP
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François Baroin (archives) (AFP/Lionel Bonaventure)

Ce budget est marqué par la volonté du gouvernement de ramener coûte que coûte le déficit de l'Etat de 152 à moins de 92 milliards d'euros en un an, en attendant la réforme fiscale du printemps 2011.

Le ministre du Budget François Baroin a endossé le costume de "cost killer" à l'affût du moindre million d'économie pour diminuer le déficit.

Sans surprise, le projet de loi de finances a été adopté avec les voix de la majorité UMP-Nouveau centre (169) face à l'opposition de gauche (68 voix), et peut partir en navette pour un examen au Sénat.

Dans la dernière ligne droite, François Baroin a suscité la colère des députés, y compris dans son propre camp, en demandant une seconde délibération sur 39 d'amendements adoptés contre son avis pendant les longues heures de discussion budgétaire. Par un vote unique, le ministre voulait revenir sur ces mesures parlementaires qui compromettaient, à ses yeux, sa politique de réduction des déficits.

Mercredi après-midi à l'Elysée, le Premier ministre François Fillon avait également mis en garde les députés UMP contre l'addition d'amendements privant l'Etat de quelques centaines de millions d'euros.

A l'Assemblée, des députés ont cependant fait observer que certaines remises en cause par le gouvernement pouvaient rapporter des recettes à l'Etat (par exemple, un nouveau mode de calcul de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises).

Des concessions aux députés de sa majorité
Après une longue suspension de séance, François Baroin a fait quelques concessions et sa majorité a entériné la seconde délibération puis l'ensemble du projet de budget pour 2011. Pour amadouer ses troupes, François Baroin a par exemple promis que le gouvernement ne reviendrait pas sur l'exonération de cotisations sociales bénéficiant à certains emplois dans les zones de revitalisation rurale (ZRR).

Colère de l'opposition
"Le remaniement passe, le piétinement du Parlement continue", ont dénoncé de leur côté les députés PS et apparentés dans un communiqué. "La manière dont le gouvernement a fait passer la loi de finances à l'Assemblée est une honte. Il a fait disparaître, au détour de la nuit, les 40 amendements que les députés avaient eu le front d'adopter contre sa volonté. Ces amendements étaient souvent le fruit d'un consensus transpartisan et visaient même pour certains à faire des économies budgétaires."

Au moment du vote, la gauche a réitéré ses critiques contre un budget de rigueur qui n'ose pas dire son nom, avec des mesures d'austérité à la charge des classes moyennes, selon l'opposition.

En dépit de débats parfois virulents (comme sur le prêt logement à taux zéro renforcé ou le maintien de l'avantage fiscal jeune marié), le projet de budget 2011 a un caractère provisoire puisqu'il sera remanié en profondeur avec la réforme fiscale du printemps confirmée mardi par le chef de l'Etat qui a affirmé devant les députés UMP: "Je supprimerai le bouclier fiscal. Je vais supprimer l'impôt sur la fortune."

Dans un scénario institutionnel bien rôdé, le député UMP Michel Piron s'est réjoui par avance de cette réforme. Et pour cause: c'est lui qui avait lancé le débat par voie d'amendement.

Le maintien de l'avantage fiscal "jeunes mariés" rejeté
Mercredi, lors de l'examen des derniers articles du projet de loi de finances pour 2011, l'amendement du député UMP Hervé Mariton a été repoussé alors que les "pour" et les "contre" ont obtenu le même nombre de voix (48), ce qui vaut rejet.

Hervé Mariton souhaitait maintenir dans le budget 2011 l'avantage fiscal accordé jusqu'ici aux jeunes mariés l'année de leur union (double déclaration), alors que le gouvernement veut le supprimer dans la nouvelle loi de finances. Cet avantage qui devrait disparaître était également reconnu aux couples qui divorcent, se pacsent ou se dépacsent. Pour le député UMP, "Le mariage est une institution qui apporte de la solidité à la société : il est donc légitime qu'il présente des avantages, notamment par rapport au Pacs". "L'impôt a pour vocation à encourager des choix utiles à la société", a-t-il insisté en séance publique, en vain.

"Le gouvernement considère qu'il n'y a pas lieu de distinguer sur le plan fiscal les mariés et les pacsés. La famille a changé", a déclaré le secrétaire d'Etat au Logement, Benoist Apparu, qui représentait le gouvernement. "On se 'dépacse' moins que l'on ne divorce", a lancé pour sa part le rapporteur général du Budget, Gilles Carrez. "L'ordre moral sous-tend l'amendement Mariton", a critiqué de son côté le député PS Jean-Pierre Balligand.

Les époux ou pacsés seront donc soumis à une seule déclaration d'impôt, et non plus plusieurs, l'année de leur union, si le Sénat ne tente pas à son tour de revenir sur cette mesure du gouvernement.

Quelques autres mesures votées dans le budget
Le projet de loi de finances prévoit de ramener le déficit public de 7,7% du produit intérieur brut fin 2010 à 6% fin 2011, l'objectif étant d'atteindre un déficit de 3% fin 2013.

Au chapitre des recettes, le projet de budget prévoit notamment de porter de 5,5 à 19,6% le taux de TVA sur les offres "triple play" regroupant télévision, téléphone et internet, ce qui devrait faire entrer 1,1 milliard d'euros dans les caisses de l'Etat.

Le texte comporte également une réduction de 50 à 25% du crédit d'impôt pour les investissements dans les équipements photovoltaïques (panneaux solaires) et la suppression de ce crédit outre-mer.

Après une réunion des députés de la majorité avec le ministre du Budget, le gouvernement a accepté de revenir sur quelques-unes de ses demandes. Mais il a imposé par exemple que les pensions de retraite des anciens combattants soient revalorisées d'un point à partir du 1er juillet 2011 et non pas de deux comme l'avaient décidé à l'unanimité les députés. En signe de protestation, le groupe du Nouveau centre a refusé de participer au vote de ces amendements gouvernementaux de suppression tandis que les élus communistes et apparentés quittaient l'hémicycle.

Plusieurs amendements de la commission ont été entérinés comme celui qui limite le montant des indemnités de départ, ou "parachutes dorés", au double de la plus élevée des indemnités de départ prévue en cas de licenciement par les accords d'entreprise ou de branche. Le montant des retraites "chapeau" a été limité à 30% du montant de la rémunération reçue la dernière année d'exercice pour certains dirigeants de société. Un autre amendement ramène de 75 à 50% la réduction de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) au titre des investissements dans les PME.

En ce qui concerne la seconde partie du budget, celle des dépenses mission par mission, plusieurs amendements ont été également retenus comme celui qui rend payant (30 euros) et plus difficile l'accès à l'Aide médicale d'Etat (AME) destinée aux personnes en situation irrégulière.

Ou encore, contre l'avis du gouvernement, celui qui maintient la publicité en journée avant 20h00 pour le groupe public France Télévisions.

Un amendement de l'UMP Richard Mallié a été également voté qui gèle les crédits pour 2011 de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE) et qui supprime donc l'augmentation prévue de 350.000 euros du budget de cette instance pour l'année prochaine.

Enfin, le gouvernement s'en remettant "à la sagesse" de l'Assemblée, un amendement du centriste Charles de Courson a été adopté qui prévoit que les indemnités de plus d'un million d'euros perçues au titre du préjudice moral sur décision de justice seront imposées. Cet amendement, qui ne le touche pas car il n'est pas rétro-actif, est appelé par certains "amendement Tapie": Bernard Tapie a reçu 45 millions d'euros au titre d'un préjudice moral dans le cadre du litige avec le Crédit Lyonnais à propos de la revente d'Adidas en 1993.

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