Elections européennes : trois questions sur la convocation par la police de la candidate LFI Rima Hassan pour "apologie du terrorisme"

La militante franco-palestinienne est convoquée à la fin du mois "afin d'être entendue librement sur des faits d'apologie publique d'un acte de terrorisme, commise au moyen d'un service de communication au public en ligne".
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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L'avocate franco-palestinienne Rima Hassan s'exprime lors de la "Convention de l'Union populaire", à Villepinte (Seine-Saint-Denis), le 16 mars 2024. (BERTRAND GUAY / AFP)

Rima Hassan dénonce "des manœuvres purement politiciennes". Au lendemain de la double annulation d'une conférence de Jean-Luc Mélenchon et de la militante franco-palestinienne sur le Proche-Orient à Lille, la candidate aux élections européennes, présente en septième position sur la liste de La France insoumise (LFI), a été convoquée vendredi 19 avril par la police pour "apologie du terrorisme". Pour l'intéressée, cette mesure vise à la "discréditer" et à entraver sa "liberté d'expression". Franceinfo revient sur cette affaire en répondant à trois questions.

Qui est Rima Hassan ?

Rima Hassan est spécialiste de la question des réfugiés, qu'elle connaît intimement puisqu'elle est née dans un camp en Syrie en 1992, avant de venir en France à l'âge de 10 ans. Cette juriste en droit international de 31 ans était connue dans les milieux militants, mais moins du grand public, jusqu'à sa désignation à la septième place de la liste LFI conduite par Manon Aubry, dévoilée début mars. Cette place est a priori éligible, ce qui a provoqué de vives réactions à droite, à l'extrême droite, et au sein de la majorité.

Ces dernières semaines, Rima Hassan a pris une importance assez inédite dans la campagne de LFI au regard de sa position sur la liste. Elle a notamment pris la parole dimanche dernier à Montpellier, lors du deuxième meeting de campagne des insoumis, aux côtés de Manon Aubry et du coordinateur du mouvement, Manuel Bompard, avant de participer mercredi à un autre meeting, avec Jean-Luc Mélenchon, à Roubaix.

Quels sont les faits reprochés à Rima Hassan ?

Selon la convocation, révélée par le journal Le Monde et consultée par l'AFP, la militante controversée est convoquée à la fin du mois "afin d'être entendue librement sur des faits d'apologie publique d'un acte de terrorisme, commise au moyen d'un service de communication au public en ligne". Les faits qui lui sont reprochés auraient été commis entre le 5 novembre et le 1er décembre, selon le document, qui n'apporte pas d'autres précisions.

La candidate est pointée du doigt par plusieurs camps politiques depuis que sa présence sur la liste LFI a été annoncée. Elle "est la représentante des idées que véhicule le Hamas", a notamment dénoncé le président du groupe Renaissance à l'Assemblée nationale, Sylvain Maillard. "Elle porte un projet qui n'est (...) pas porteur d'une solution politique et de paix", a ajouté sur CNews-Europe 1 le communiste Fabien Roussel. En cause notamment, une interview au média Le Crayon (supprimée depuis, comme l'analyse le site Arrêt sur images), donnée après les attaques terroristes du Hamas en Israël, où elle répond "vrai" à l'affirmation "Le Hamas mène une action légitime".

Autre déclaration polémique de Rima Hassan : son utilisation du slogan "de la rivière [Jourdain] à la mer [Méditerranée]", "From the river to the sea" en anglais. Une expression associée par les uns à la revendication d'un Etat où les Palestiniens pourraient vivre libres et par d'autres à la destruction d'Israël, comme le développent Le Figaro ou Libération. "From the river to the sea. On veut libérer tous les Palestiniens, écrivait-elle le 5 novembre sur X. Ceux des camps, ceux de Gaza, ceux de Jérusalem, ceux de la Cisjordanie, ceux d'Israël et tous ceux de la diaspora. Ce n'est qu'à cette condition que l'on pourra parler d'Etat palestinien, de peuple palestinien." 

Que répond la candidate LFI ?

Concernant l'interview au Crayon, Rima Hassan évoque un extrait tronqué, a-t-elle répondu sur X, regrettant "une censure" de ses "développements et réponses étayées" et précisant avoir qualifié le Hamas de "groupe terro". "On peut dire que le Hamas a une légitimité dans un contexte de lutte pour l'autodétermination. C'est un parti politique qui a été élu. Mais quand ils commettent des crimes, ils sont en dehors du cadre prévu par les Nations unies", explique-t-elle aussi à Arrêt sur images. De plus, "la convocation fait référence à des publications de novembre. Pour ceux qui pensent qu'il est question de l'interview accordée au Crayon, vous vous trompez, celle-ci a été publiée en janvier", a souligné Rima Hassan sur X.

"Je me sens sereine et combative", a-t-elle ajouté auprès de l'AFP. "Sereine, car j'estime n'avoir rien à me reprocher, m'être toujours exprimée de manière critique à la fois envers le Hamas et son mode opératoire terroriste mais aussi d'Israël. Et je suis très combative, car je crois que ce sont des manœuvres politiciennes", a-t-elle ajouté en marge d'un "café citoyen" à Marseille, où elle s'est exprimée devant quelque 300 personnes qui ont à plusieurs reprises scandé leur soutien.

"On est six mois après. Une convocation pour apologie du terrorisme, c'est quand même assez lourd, urgent généralement, on ne met pas six mois pour convoquer quelqu'un", appuie-t-elle. "Rima Hassan s'est toujours conformée à la loi, il n'y a strictement aucune infraction pénale qui serait caractérisée en lien avec ses différentes publications sur la question de Gaza", a ajouté samedi sur franceinfo son avocat Vincent Brengarth.

VIDEO. L'avocat de la candidate LFI Rima Hassan

Dans cette convocation, La France insoumise voit aussi "une tentative d'intimider et de criminaliser toutes les voix qui se lèvent face aux massacres en cours à Gaza". "Contrairement aux propos qui lui sont imputés, Rima Hassan n'a jamais dit que les actions du 7 octobre étaient légitimes", ajoute dans son communiqué le mouvement de gauche radicale, qui a fait de la dénonciation des opérations militaires israéliennes à Gaza l'un des principaux axes de sa campagne pour les élections européennes du 9 juin. Depuis Marseille, le coordinateur de LFI a, lui, demandé à ce que "soit immédiatement mis fin à cette campagne de dénigrement" envers Rima Hassan.

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