La stratégie numérique de Martine Aubry
Les réponses de la Première secrétaire du PS et candidate à la primaire socialiste à notre questionnaire sur sa vision d'Internet et des réseaux sociaux dans la campagne présidentielle.
Quelle sera votre présence sur le numérique et en particulier sur les réseaux sociaux pour votre campagne électorale ? Utilisez-vous déjà Twitter et/ou Facebook ?
Les réseaux sociaux représentent une formidable opportunité pour échanger et diffuser à chacun de l'information, des prises de position, des idées, selon un rythme, une proximité et des codes qui ne sont pas ceux des médias traditionnels. Avec mon équipe de campagne, j'anime au quotidien ma page Facebook et . J'utilise également la Coopol, le réseau social du Parti socialiste.
Pensez-vous que l'élection présidentielle puisse se jouer sur internet ?
Aujourd'hui, la différence entre Internet et le terrain est de plus en plus difficile à définir. Lorsque des volontaires de ma campagne utilisent Internet pour s'organiser, recevoir des argumentaires, entrer en contact, et finalement organiser un porte-à-porte ou une distribution de tracts, est-ce de l'Internet ou du terrain? On voit bien qu'aujourd'hui, et c'est une différence par rapport à 2007, les deux dimensions sont imbriquées plus qu'elles ne s'opposent.
Je ne crois donc pas que l'élection va « se jouer » sur Internet, pris comme un univers à part: bien plus largement, je suis convaincue que la présence et la mobilisation sur le web est indispensable pour optimiser et favoriser l'action sur le terrain.
Evidemment, grâce aux réseaux sociaux, aux bloggeurs, aux médias en ligne, Internet s'est aussi constitué comme un lieu de débat très dynamique. Ces débats sont le reflet de ceux qui traversent la société. Internet n'est pas une autre planète, tout en s'articulant autour de tropismes propres, comme toute communauté.
A vos yeux, le débat démocratique dans le monde virtuel est-il au moins aussi important que dans le monde réel ?
Je n'opposerai pas « monde virtuel » et « monde réel ». Regardons les exemples égyptiens et tunisiens: les manifestants ont utilisé les réseaux sociaux pour organiser une mobilisation concrète. Internet est donc un outil qui peut être au service du débat démocratique.
Néanmoins, je vois au moins deux conditions à ce rôle démocratique d'internet : il faut qu'il demeure un réseau inclusif (c'est à dire que tout le monde puisse participer) et qu'Internet soit un réseau neutre et ouvert.
C'est pourquoi je propose de réduire la fracture numérique, en instaurant un droit à la connexion pour tous et une éducation renforcée aux technologies et aux usages du numérique. C'est pourquoi je défends la neutralité d'internet, face aux risques de confiscation de ce bien commun par des intérêts particuliers et exclusivement marchands très puissants. C'est pourquoi je souhaite que la France apporte son soutien à la cyber-démocratie dans le monde, en soutenant une fondation indépendante, agissant au côté des ONG, pour faciliter l'hébergement des sites censurés et sécuriser l'Internet des militants poursuivis.
Que pensez-vous des considérations qui veulent qu'internet soit une poubelle à rumeurs, une caisse de résonnance pour tout et n'importe quoi, ou bien un réseau d'intelligence sociale ?
Là encore, ne soyons pas manichéens : comme dans la presse écrite ou audio-visuelle, le meilleur peut côtoyer le pire. Internet est un moyen de circulation de l'information: il n'est pas intrinsèquement bon ou mauvais. Nous devrons faire de la lutte contre la cyber-criminalité une priorité, qu'il s'agisse de pédophilie, de contrefaçon, de piratage ou de détournements financiers.
Internet nous ouvre des perspectives fascinantes en matière d'éducation, de savoir collaboratif - regardez la vivacité du secteur des logiciels libres -, de vie quotidienne. C'est une chance pour résoudre des problèmes très concrets en matière de santé, d'environnement ou de développement.
Êtes-vous pour ou contre une régularisation du web ? Êtes-vous pour ou contre un amendement ou un prolongement de la loi Hadopi ?
Il faut avant tout défendre les droits des auteurs et des artistes, de manière juste et efficace. La loi Hadopi met en place un dispositif injuste et inefficace, je suis favorable à son abrogation.
A la place, je propose d'imaginer et de mettre en place des modèles économiques modernes, rémunérateurs et redistributifs pour les créateurs. Il faudra adapter et renforcer les droits d'auteur. De nouveaux financements pour la création pourront être fondés sur une contribution, forfaitaire et d'un montant modeste, des internautes et sur un prélèvement qu'acquitteront les opérateurs et les fournisseurs d'accès.
Les modalités de ce prélèvement sont à définir dans le cadre d'un dialogue loyal avec toutes les parties prenantes. Ce sera un apport massif pour soutenir la culture en France. Enfin, je l'ai dit, nous lutterons avec détermination contre la contrefaçon commerciale.
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