Les Ă©lections municipales et le risque de l'abstention
"Les Ă©lecteurs me le
disent, tous les jours: 'Je ne vais pas aller voter pour des branquignoles'Â !
Ăa va ĂȘtre trĂšs difficile !" A l'image de ce responsable du Parti
socialiste, le gouvernement craint que l'abstention ne soit extrĂȘmement nĂ©faste
Ă la gauche. Le professeur de sciences politiques, Jean-Yves Dormagen, auteur
(avec CĂ©line Braconnier) de La DĂ©mocratie
de l'Abstention explique d'ailleurs que "depuis 1978 aucune
majorité sortante n'a gagné une élection, à part en 2007, probablement parce
que les électeurs de la majorité qui gouvernent ont tendance à s'abstenir,
parce qu'ils sont déçus. C'est difficile de parler d'une grande inconnue
puisqu'on sait qu'on s'oriente de toutes façon vers une abstention entre 35 et
45%".
En 2008, un nouveau record a été pulvérisé avec le taux de
participation le plus faible depuis 1959Â : 66,5% au premier tour et 65,2%
au second. Selon un récent sondage Ipsos seuls 60% des personnes interrogées se déclarent persuadées d'aller voter ce
dimanche et le suivant. "Il y a énormément de gens qui changent de
villes, de régions, de départements. Ces personnes sont mal inscrites,
connaissent trĂšs mal la vie politique locale et sont, par exemple, trĂšs souvent
des abstentionnistes précise Jean-Yves Dormagen. Vous avez énormément de
phénomÚnes qui jouent, le grand vieillissement de la population aussi, les trÚs
ùgés ne votent pas. Mais, bien sûr, ce qui nourrit fondamentalement
l'abstention, c'est celle des plus jeunes, les 18-35 ans, qui votent
particuliĂšrement peu, notamment pour les Ă©lections locales."
La démobilisation chez les jeunes
Ces jeunes, justement pourraient ĂȘtre vraiment dĂ©mobilisĂ©s
ce dimanche. Sur une vingtaine d'électeurs rencontrés à Paris ces derniers jours, seuls
cinq ont prévu de voter. A 27 ans, Marie l'avoue "je suis toujours
inscrite sur les listes Ă ChĂąlons-en-Champagne, je n'ai jamais fait le
changement alors que ça fait quatre ans que je vis à Paris. Si c'était plus
simple peut ĂȘtre par internet, ce serait plus facile." A ses cĂŽtĂ©s,
Marc fronce les sourcils et puis sourit, les deux amis viennent d'en parler et
lui confie que, mĂȘme s'il va voter au premier tour, il ne passera surement pas
le rideau de l'isoloir au second. Pour le jeune actif "y'en a marre
des choix par défaut, si je vote pour quelqu'un, c'est que j'ai envie de
voter pour lui ! Je préfÚre ne pas voter, au moins aprÚs, je peux
rùler !"
à 23 ans, Benoßt lui n'a jamais "été trÚs vote. Je
n'y ai jamais cru précise-t-il et si jamais je vais voter, ce sera
blanc !" En attendant le début de son cours de Yoga Camille,
elle, s'agace, "j'ai 22 ans, mes copines elles ne s'intéressent pas du
tout à tout ça, elles me disent ah non, surtout on n'en parle pas. Elles ne vont
pas voter... moi je ne comprends pas, on a le droit de vote, il faut en
profiter !"
Abstention plus forte dans les grandes villes
Autre critĂšre : la taille de la commune. Plus la ville est
grande et plus l'abstention est forte. En 2008, les abstentionnistes Ă©taient
37,83% dans les communes de plus de 3.500 habitants et jusqu'Ă 43.11% pour les
villes de plus de 100.000 habitants, mĂȘme 55,58% Ă Lille au second tour.Â
Une inconnue tout de mĂȘme, le vote frontiste qui reste
difficile à estimer pour les analystes. Le FN présente 600 listes et pourrait
gagner entre dix et quinze villes. Si le Front National pourrait bénéficier de
l'abstention, c'est la droite qui en pĂątirait le plus puisque "le FN
prend l'essentiel de ses Ă©lecteurs Ă l'UMP et donc peut-ĂȘtre qu'en
l'affaiblissant, cela pourrait permettre Ă la gauche de rester majoritaire dans
un certain nombre de villes" d'aprĂšs Jean-Yves Dormagen.
A tout cela s'ajoute un climat détérioré par les récentes
affaires. Selon un sondage LH2 pour le Nouvel Observateur, elles profiteraient,
lĂ aussi, Ă l'abstention. Un Français sur dix se dĂ©clare prĂȘt Ă bouder les
urnes Ă cause de ces scandales
D'ailleurs, le responsable des Ă©lections du parti
socialiste, Christophe Borgel l'assume : "Dans un climat général
qui donne le sentiment aux Français qu'on s'occupe plus de nous que de leurs
problĂšmes, j'entends les Ă©lecteurs, y'a un cĂŽtĂ© "tous les mĂȘmes". En
réalité, ces affaires qui ne sont pas les nÎtres tirent la vie politique vers
le bas." Son homologue de l'UMP, Nadine Morano, Ă l'inverse juge que "tout
est mis en Ćuvre par le pouvoir en place pour Ă©cĆurer les gens d'aller voter. Et
d'enfoncer le clou : "Moi j'incite les déçus de François Hollande à se
mobiliser comme jamais, pour leur donner une leçon face à ce comportement
inacceptable de montage d'affaires qui n'en sont pas !"
Et, une fois n'est pas coutume, PS et UMP se retrouvent tout
de mĂȘme sur un point : la mĂ©tĂ©o. Les prĂ©visions annoncent un week-end trĂšs
nuageux, toujours plus favorable Ă la mobilisation que le beau temps...Â
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