"Ambitieux", "dynamique", mais aussi "sanguin" et "susceptible"... Laurent Wauquiez peut-il rassembler les Républicains ?
Officiellement candidat à la présidence des Républicains, Laurent Wauquiez, président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, s'annonce comme le grand favori dans cette course. Portrait d'un ambitieux dont la ligne conservatrice effraie l'aile la plus modérée du parti.
Il a promis le "rassemblement", mais a aussitôt ajouté le rassemblement d'une droite "vraiment de droite". A Châteaurenard (Bouches-du-Rhône), mercredi 30 août, Laurent Wauquiez a lancé son offensive pour prendre la présidence du parti Les Républicains, dont le vote aura lieu les 10 et 17 décembre. Le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes a, dans la foulée, annoncé sa candidature, dans la soirée du jeudi 31 août, au Figaro.
A 42 ans, celui qui a connu une ascension fulgurante et longtemps marché dans les pas de Nicolas Sarkozy terminera la semaine par sa traditionnelle ascension, dimanche 3 septembre, du mont Mézenc, en Auvergne. Ses soutiens annoncent d'ailleurs deux fois plus de monde que l'an dernier, histoire de montrer aux autres candidats qui est vraiment le patron. Car après le retrait de Xavier Bertrand et de Valérie Pécresse, l'issue du vote ne fait guère de doute : Laurent Wauquiez a toutes les cartes en main pour devenir le prochain président de sa famille politique. Mais saura-t-il vraiment rassembler ? La partie s'annonce ardue.
"Il reprend le créneau de Sarkozy... sans le charisme"
Lui tente évidemment de rassurer. "Tout le monde s'attend à ce que je fasse la nuit des Longs Couteaux. Je vais les suprendre", a-t-il lâché dans L'Opinion. "La famille des Républicains sera unie et il n'y aura pas de divisions entre nous", a garanti Laurent Wauquiez à Châteaurenard. Mais "il faut qu'il y ait une droite en France et qu'elle soit vraiment de droite", a-t-il précisé, avant d'ajouter : "Je n'ai pas peur des différences, quand elles sont au service d'une même vision et d'une colonne vertébrale".
Or sa vision, celle d'une droite conservatrice et "fière" de ses valeurs, fait peur à une partie des Républicains, celle de la frange la plus modérée. "S’il reste sur cette ligne dure, il est clair que cela va poser une difficulté majeure au sein du parti Les Républicains", a, par exemple, mis en garde, sur franceinfo, Dominique Bussereau, président LR du Conseil départemental de Charente-Maritime.
Passer de Barrot à la droite conservatrice montre une échine souple. Or, les “grands” chefs ne cédent pas leur pensée pour séduire un électorat
Un ex-député LRà franceinfo
Plus problématique pour Laurent Wauquiez : sa personnalité semble également refroidir certains sarkozystes ou fillonistes. "Je ne suis pas spécialement convaincu de la sincérité des convictions de Laurent Wauquiez, qui reprend le créneau de Nicolas Sarkozy… sans le charisme !", assure à franceinfo Lionnel Lucas, vice-président du Conseil général des Alpes-Maritimes, expliquant se "retrouver davantage dans la candidature de Florence Portelli", même si son choix n'est pas encore arrêté.
Le député de l'Oise Eric Woerth estime, lui, que Laurent Wauquiez "a toutes les qualités" pour présider Les Républicains (LR), mais met aussi en garde. Le parti ne peut pas se reconstruire "uniquement à partir d'un noyau dur", assure-t-il. "Il doit désormais prouver ses capacités de rassemblement", confie à franceinfo le député du Nord Sébastien Huyghe, qui n'en doute néanmoins pas.
Il aime "diviser pour mieux régner"
Ses "capacités de rassemblement" sont mises à l'épreuve à la région Auvergne-Rhône-Alpes, dont il est le président depuis janvier 2016. Pour gagner, ce dernier a monté une liste avec des Républicains mais aussi des centristes, qu'ils soient UDI ou MoDem. Et visiblement, si sur le projet le contrat est pour l'instant respecté, sur la forme, c'est bien plus compliqué. "C'est quelqu'un qui a un exercice très centralisé du pouvoir, qui est extrêmement autoritaire et qui peut parfois être très violent", rapporte à franceinfo un conseiller régional centriste, décrivant encore un homme "extrêmement dynamique" mais aussi "pressé", "assez sanguin" et "très susceptible".
Ce même conseiller centriste pointe que "c'est déjà compliqué au sein même de l'exécutif des Républicains de la région où Laurent Wauquiez a concentré les pouvoirs sur le cabinet, impose les choses et va donner parfois de l'eau froide, parfois de l'eau chaude".
Il aime bien utiliser les uns pour taper sur les autres. Bref, diviser pour mieux régner
Un conseiller centriste de la région Rhône-Alpes-Auvergneà franceinfo
"C'est une bête politique qui est tendue vers un seul but : être président de la République", renchérit un élu de la Haute-Loire qui le connaît très bien et le décrit comme "un opportuniste", qui "met toute son énergie dans les batailles électorales". Sur le rassemblement du parti, ce dernier est circonspect : "C'est difficile à dire car il sait très bien faire des gestes pour aller chercher des alliés. Il pèsera le moment venu l'opportunité pour lui de rassembler ou d'adopter une ligne forte, quitte à perdre du monde en route".
Un parti resserré sur son noyau le plus dur ?
Cette idée de rassembler le parti fait soulever quelques sourcils chez les proches et soutiens de Laurent Wauquiez. "Ça dépend de quoi vous parlez. Si vous rassemblez avec le plus petit dénominateur commun, ça ne sert à rien, relève un très proche du candidat. Il faut d'abord rassembler les adhérents et pas M.Tartempion, qui est député." Une position partagée par Nadine Morano, qui annonce à franceinfo qu'elle "soutiendra Laurent Wauquiez sans aucun état d'âme". La députée européenne fustige "ce syndrome du 'tout sauf lui' dont souffre notre famille politique".
Le rassemblement à tout prix, ça sert à rien, si c'est pour faire de l'eau tiède
Nadine Morano, députée européenneà franceinfo
"Laurent Wauquiez a un positionnement qui plaît au noyau dur de la droite, analyse pour franceinfo le chercheur CNRS au Cevipof, Bruno Cautrès. Son pari, c'est bien sûr de faire appel au rassemblement, mais c'est aussi de resolidifier la base. L'idée derrière, c'est : 'Au moins, on saura exactement qui on est, même si on perd des gens en route'". Si Laurent Wauquiez accepte de perdre des électeurs et sympathisants, c'est aussi parce qu'il "fait l'analyse qu'ils sont déjà partis chez Emmanuel Macron".
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.