Manuel Valls devant l'Assemblée : hommage, émotion et annonces
Devant un hémicycle plein à craquer, Manuel Valls avait le ton grave ce mardi, celui qui sied à l'hommage rendu aux 17 victimes des attentats de Paris, la semaine dernière. Le Premier ministre a fait se lever à plusieurs reprises les deux côtés de l'Assemblée, son discours long de 45 minutes a été ponctué de nombreuses acclamations. Un discours conclu par une phrase : "La fierté d'être Français, ne l'oublions jamais ". Une fierté illustrée par le geste spontané des députés qui, quelques minutes plus tôt, avaient entonné une Marseillaise. C'était la première fois depuis 11 novembre 1918 que l'hymne retentissait dans l'hémicycle.
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Pour autant, malgré beaucoup d'envolées saluées, une émotion palpable, Manuel Valls a également dévoilé quelques pistes pour lutter contre le terrorisme en France. Des mesures à plus ou moins longue échéance, qu'il s'agira de voter le moment venu.
Des "mesures exceptionnelles " face au terrorisme
Création d'un fichier recensant les personnes condamnées pour terrorisme ou "membres d'un groupe de combat " : Manuel Valls a indiqué avoir demandé aux ministres de la Justice et de l'Intérieur "d'étudier les conditions juridiques de mise en place " de ce dispositif. Jusqu'à présent, ces personnes figuraient seulement dans le fichier des personnes recherchées.Mise en place du dispositif français sur les échanges de données des passagers européens , système dit PNR (pour "Passenger Name Record"). Des données fournies par les transporteurs aériens. Selon Manuel Valls, le dispositif français, dans le cadre de la mise en place d'un système européen, sera prêt en septembre prochain. Le Premier ministre en a profité pour mettre la pression au Parlement européen, appelé à "prendre enfin toute la mesure de ces enjeux, et à voter, comme nous le lui demandons depuis deux ans, avec l'ensemble des gouvernements, à adopter ce dispositif qui est indispensable ".Des "quartiers spécifiques " pour les djihadistes dans les prisons . Manuel Valls a évoqué une date, "avant la fin de l'année ", alors que cette expérience inédite dans les prisons françaises est menée actuellement à la prison de Fresnes.Création d'une unité spéciale de renseignement au sein de la direction de la Protection juidiciaire de la jeunesse (PJJ) . Le Premier ministre a simplement appelé de ses voeux la mise en place de cette unité.Renforcement des moyens des services de renseignements . Pas de chiffres avancés, mais Manuel Valls s'est montré catégorique : il faut "prendre conscience que la situation change en permanence et que les services en charge du renseignement intérieur et la juridiction antiterroriste doivent être régulièrement renforcés ". Le Premier ministre cible également Internet et les réseaux sociaux, c'est pourquoi il dit avoir demandé au ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve de lui faire des propositions "sous huit jours ".
La protection des cultes
Très grave, Manuel Valls a aussi longuement abordé les questions de l'antisémitisme et de l'islamophobie en recrudescence dans le pays, alors que les quatre victimes d'Amedy Coulibaly ont été inhumées ce mardi à Jérusalem. Selon le Premier ministre, "l'Histoire nous l'a montré, le réveil de l'antisémitisme, c'est le symptôme d'une crise de la démocratie, d'une crise de la République ". "Sans les juifs de France, la France ne serait plus la France ", a-t-il notamment affirmé, parlant également d'un "nouvel antisémitisme qui est né dans nos quartiers ". Une certitude, pour le Premier ministre très applaudi par l'hémicycle : "Nous ne nous sommes pas assez indignés ! "
"Des risques sérieux et très élevés demeurent [...] À aucun moment, nous ne devons baisser la garde"
Manuel Valls a enchaîné : "L'autre urgence, c'est de protéger nos compatriotes musulmans. Ils sont aussi inquiets ". Depuis la semaine dernière, les actes anti-musulmans se sont multipliés dans le pays, en réaction aux attentats menés au nom de l'islam. Le Premier ministre avait commencé son discours en précisant que "la France n'est pas en guerre contre une religion, la France protégera [...] tous ses concitoyens ". Non, "la France est en guerre contre le terrorisme, l'islamisme radical ".
Dieudonné, sans le nommer...
Le discours contre l'antisémitisme s'est prolongé sur un fait, ou plutôt un personnage, d'actualité. Sans jamais le nommer, Manuel Valls a sévèrement condamné Dieudonné, auteur d'une sortie polémique après les attentats de la semaine dernière ("Je me sens Charlie Coulibaly "). Manuel Valls, très applaudi une nouvelle fois, a brocardé ces "prédicateurs de la haine " à l'égard desquels il faut se montrer "implacable " : "Quelle honte que de voir un récidiviste de la haine tenir son spectacle dans des salles bondées au moment même où, samedi soir, la Nation porte de Vincennes se recueillait ".
"Quand on s'attaque aux juifs de France, on s'attaque à la France, on s'attaque à la conscience universelle"
Pour le Premier ministre, la réponse se trouve en premier lieu à l'école : "Comment peut-on accepter que dans certains établissements, on ne puisse pas enseigner la Shoah ? [...] C'est cette bataille que nous devons gagner, celle de la pédagogie auprès de notre jeunesse ".
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