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Marine Le Pen officiellement proclamée Présidente du FN recueille 67,65% des voix contre 32,35% pour son rival

Le résultat était attendu. L'annonce des scores n"a fait que confirmer le rapport de force entre les deux rivaux permettant à la nouvelle présidente de laisser éclater sa joie et d'afficher ses ambitions."Je me fixe dès à présent pour objectif" de faire du parti "l"instrument le plus performant qui soit dans notre stratégie de conquête du pouvoir".
Article rédigé par Catherine Rougerie
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 7 min
La nouvelle présidente du Front national, Marine Le Pen, à Tours, le 16 janvier 2011 (AFP PHOTO ALAIN JOCARD)

Le résultat était attendu. L'annonce des scores n"a fait que confirmer le rapport de force entre les deux rivaux permettant à la nouvelle présidente de laisser éclater sa joie et d'afficher ses ambitions.

"Je me fixe dès à présent pour objectif" de faire du parti "l"instrument le plus performant qui soit dans notre stratégie de conquête du pouvoir".


Convaincus les adhérents ? Assurément si l"on en juge à l"applaudimètre et au "Marine Président, Marine Président", scandé par les quelque 2.000 frontistes massés dans le Palais des congrès de Tours. Mais à quoi songeaient-ils exactement ces militants ? A la présidence du parti ou à celle de la République ?

Pour Paul, 32 ans, les deux objectifs sont intimement liés. "J"ai voté Marine car c"est elle qui est la plus à même de prendre le pouvoir et la plus déterminée". "Je ne suis pas un idéologue mais le constat est clair" assure-t-il.

Dans son collimateur notamment "l"inégalité devant l"impôt entre les petites et les grandes entreprises, la collusion entre l"Etat et les grosses sociétés qui explique "l"absence de concurrence". "Quelle est la différence avec le pouvoir soviétique si tout est décidé à l"avance" s"interroge-t-il dénonçant au passage "ceux qui complotent exactement comme dans la Fonction publique".

De là au "tous pourris".

Le discours de la nouvelle Présidente, Bernard Huet l'a trouvé "pertinent, percutant, actuel et d"avenir". Pour cet élu de Les Clayes-sous-Bois (Yvelines), le choix de Marine Le Pen s"est imposé. "Après avoir vu comment l'appareil UMP me considérait", l'édile, d'abord étiqueté divers droite, a adhéré au FN, il y a trois mois.

"Je souhaite gagner et je suis un real Politique". "Elle (ndlr, Marine Le Pen) est une femme, jeune et battante qui arrive à un moment où il y a un regain des idées nationales et patriotes". "L'histoire n'est pas écrite" poursuit-il. "La présidentielle, ce peut-être la rencontre d'une femme et des idées".

Gollnisch, loyal mais pas inféodé
Honneur au perdant, c"est Bruno Gollnisch qui, le premier, a pris la parole dimanche matin reconnaissant d'emblée sa défaite : "Le scrutin ayant désigné Marine Le Pen, c"est sans arrière-pensée et sans amertume que je me soumets à la volonté librement exprimée par la majorité de nos membres", a déclaré d"une voix tonique M. Gollnisch, longuement applaudi par les adhérents d"un Palais des Congrès archi comble.

"Je remercie du fond du cœur, tous ceux dont la confiance m"honore et qui ont participé à ma campagne", a-t-il poursuivi. Leur dévouement, leur amitié et même leur ferveur m"ont été un réconfort puissant dans lequel je continuerai de puiser les forces nécessaires à notre action car, je continuerai, n"en doutez pas un seul instant".


Sans grande surprise non plus, Bruno Gollnisch a confirmé qu"il restait fidèle au Front national : "Oui je continuerai naturellement à servir la cause que j"ai toujours servi" (…) car nous sommes tous embarqués sur le même navire" a-t-il asséné après avoir assuré les partisans de sa rivale de ses "sentiments d"amitiés et de fraternité".


Mais quel rôle exact y jouera-t-il ? Rien n"est tranché. Le député européen a refusé la vice-présidence que lui proposait Marine le Pen, assurant qu'il souhaitait que la nouvelle équipe ait les "coudées franches" et "fasse ses preuves".

Les pro-Gollnisch déçus mais pragmatiques

Nostalgiques du chef historique comme pro-Gollnish, tous soutiennent Marine même s"ils avouent à demi-mots, quelques regrets pour les uns, et des inquiétudes pour les autres : "Jean-Marie Le Pen, il sera toujours là", affirme ce militant de la première heure dans les coursives du Palais de congrès de Tours, et pour lequel l"image du FN est irrémédiablement liée à celle de son fondateur.

"Je suis entrée en politique avec Jean-Marie Le Pen et j"ai fait tous les meetings", raconte Christiane, pimpante octogénaire originaire de Montpellier. "Les gens attendent de voir ce qui va se passer mais sont un peu inquiets", ajoute-t-elle, reconnaissant cependant que "pour le peuple, Marine Le Pen, c"est mieux".

Question charisme médiatique, Marine Le Pen n"a en effet rien à envier à son père. Même assurance, même éloquence, même sens de la répartie. Sur le fond, l"héritage du chef historique est aussi assuré. Le cœur de la doctrine du FN "le refus du multiculturalisme", selon les termes du chercheur Yves Camus, demeure.

Mais la "dédiabolisation" entreprise par Marine Le Pen soucie une partie des militants. "J"ai peur que cela puisse changer légèrement l"orientation du parti", explique Rudy, vingt ans, adhérent du FN depuis trois ans et pro-Gollnisch. Originaire de Saint-Etienne, et particulièrement sensible aux questions de sécurité, le jeune homme craint que la nouvelle Présidente "soit beaucoup moins ferme" que son malheureux rival.

"J"ai plusieurs membres de ma famille qui se sont fait violemment agressés et se sont retrouvés à l"hôpital. Mais rien n"a été fait", déplore-t-il. "La liberté de la police a régressé. Désormais, c"est elle qui doit prouver qu"elle est en légitime défense. Elle doit réfléchir à deux fois avant d"intervenir", poursuit-t-il dénonçant un "flicage de la police".

Autre sujet de préoccupation, pour Rudy, la question morale. "Je crains que la révocation de la loi Veil (ndlr, autorisant l"avortement) ne fasse plus partie du programme. Je suis catholique et donc pas vraiment pour". Pas Vraiment ? "Franchement contre même".

Cap sur 2012

Un peu plus loin cet autre frontiste ne s"encombre pas d"autant de nuances. "C"est toujours le petit qui morflera (…). La droite, la gauche, c"est tous les mêmes. On est les seuls dans la bataille", s"emporte Henri, français d"origine arménienne. Agé de 71 ans et ancien policier, il s"en prend pêle-mêle à la classe dirigeante et à la magistrature: "Eux aussi on les connait". Originaire de Marseille, Henri a fait le trajet spécialement pour le congrès mais assure que "c"est pas pour moi que je me bats, c"est pour toute la jeunesse et pour ma fille", sa fille qui n"a pas pu venir ce week-end, mais qui est aussi adhérente du FN.

Un FN qui va entrer dans une nouvelle ère. L"ère Marine qui, à la différence de son père, entend bien participer au pouvoir. Comment ? Sans doute en mariant les droites, même si, officiellement "aucune alliance n"est envisagée, ni envisageable".

Pour l"heure. Mais demain… qui sait.

Principaux extraits du discours de Marine Le Pen

"Il faut faire du Front national un outil, un outil pour reprendre le pouvoir des mains de ceux qui ont traîné notre si beau pays jusqu'ici, dans l'état où il se trouve"

"Nous voulons mettre en oeuvre une politique basée sur la remise en ordre de l'Etat-nation par une souveraineté recouvrée"

"Restaurer la souveraineté nationale, cela signifie d'abord sortir du carcan étouffant et destructeur de Bruxelles dans lequel on nous a enfermé malgré nous et qui nous prive de tout marge de manoeuvre dans des champs entiers de l'action politique : la monnaie, la législation, la maîtrise de nos frontières, la gestion de l'immigration..."

"Notre souveraineté monétaire c'est-à-dire notre capacité de défendre nos emplois, a été sacrifié à des dogmes :

- le dogme européiste

- le dogme de l'euro

- le dogme de l'ultralibéralisme"

"Ma conviction profonde est que la France et le peuple français nt plus que jamais besoin d'un Etat fort"

"Malheureusement, comme aux pires moments de notre histoire, notre Nation est en proie à la dislocation"

"Le drapeau tricolore est brûlé publiquement et remplacé par des emblèmes étrangers"

"La puissance publique se contente d'un rôle d'arbitre, laissant libre court au déni de justice, à la prolifération des mafias criminelles"

"Le Président doit être le Chef de l'Etat et cesser d'être le Chef d'un clan, le gouverneur d'un protectorat américain, un candidat en campagne ou, même comme on l'a vu, l'agent d'nue chanteuse au succès déclinant"

"L'Etat doit reconquérir tous les territoires perdus de la République et réinstaurer sa totale souveraineté sur les zones de non droit"

"En politique, la faiblesse est autant l'opposé de la vertu que le vice". Face à cette délinquance qui évolue non pas à l'américaine, comme on le croyait il y a quelques temps, mais à la brésilienne, nous n'avons plus le droit de ne pas être inflexibles : la réponse de l'Etat doit être policière, judiciaire, carcérale, administrative pour les reconduites systématiques à la frontière et éducative"

"Le besoin de transparence, d'équité, de simplification et d'efficacité nous amèneront à proposer aux Français une révolution fiscale"

"Nous le voyons, nous le sentons, nous sommes au bout d'un système"

"Le Front national incarne l'esprit de Résistance"

"Les élections cantonales des 20 et 27 mars seront la première étape de notre marche vers le pouvoir"

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