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Réforme territoriale : la France a ses 13 régions mais il reste une dernière bataille capitale

L'Assemblée nationale a défini une nouvelle carte, en dessinant les contours de 13 nouvelles régions en métropole. Et maintenant ? Les débats se poursuivent autour des capitales régionales.

Article rédigé par Mathieu Dehlinger
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
L'Assemblée nationale vote en première lecture, mercredi 23 juillet 2014, le projet de loi dessinant la carte des 13 nouvelles régions de France métropolitaine. (MAXPPP)

Les contours de la future carte de l'Hexagone se précisent. Après des débats passionnés dans l'hémicycle, l'Assemblée nationale doit adopter, mercredi 23 juillet, la réforme territoriale, qui redessine 13 régions en France métropolitaine, contre 22 actuellement.

Dans ce texte, qui doit désormais repasser entre les mains des sénateurs, l'Aquitaine se marie avec le Poitou-Charentes et le Limousin, le Nord-Pas-de-Calais avec la Picardie ou encore l'Alsace avec la Lorraine et la Champagne-Ardenne. Mais au-delà de ces frontières contestées, les élus locaux préparent une nouvelle bataille : quelles villes seront désignées capitales de ces "super-régions" ? Francetv info récapitule les enjeux du débat, qui promet d'être animé.

Etre capitale régionale, c'est quoi l'intérêt ?

Au-delà du prestige, l'intérêt est surtout économique. "Le choix du chef-lieu a des effets non négligeables en terme d'emplois", explique à francetv info Patrick Le Lidec, chargé de recherche au CNRS et spécialiste de la décentralisation. "Cela apporte des emplois administratifs, du fait de l'implantation des services du conseil régional, mais cela affecte aussi les commerces, l'hôtellerie, la restauration, etc."

Face à des élus locaux inquiets de perdre leur part du gâteau, Bernard Cazeneuve a voulu rassurer lors des débats à l'Assemblée. "Cela ne signifie pas qu'il y aura des déserts territoriaux administratifs là où il y a actuellement des capitales régionales", a-t-il prévenu, assurant que des centres administratifs pourront être installés en dehors du chef-lieu. "Une des idées évoquées pour atténuer les conséquences des fusions, c'est d'utiliser les services de l'Etat et de les implanter ailleurs, détaille Patrick Le Lidec. On peut imaginer par exemple que la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) ne s'installe pas dans la capitale régionale."

Une façon de contenter tout le monde en somme, mais "attention à ne pas multiplier les jeux de compensation", avertit Patrick Le Lidec. "Sinon, on risque de perdre une partie voire la totalité des économies recherchées de la réforme territoriale." Car de telles guerres d'influence ne sont pas sans conséquences concrètes : RTL cite le cas de l'université de Corse, installée à Corte pour éviter de trancher entre les rivales Ajaccio et Bastia.

Comment les capitales seront-elles choisies ?

Une fois la réforme territoriale définitivement adoptée par le Parlement, la bataille pourra officiellement commencer. Le texte amendé par les députés prévoit qu'un chef-lieu provisoire sera fixé par décret avant fin 2015, après avis du conseil municipal de la commune envisagée et des conseils régionaux affectés.

Après un rapport d'experts et un nouvel avis des conseils régionaux, les capitales définitives seront fixées par décret au Conseil d'Etat avant juillet 2016. Pour Patrick Le Lidec, "il n'y a pas vraiment de débat à avoir" : "La logique, c'est d'implanter les chefs-lieux dans les métropoles, dont on a déjà la liste." Toulouse, Lille, Strasbourg ou encore Rouen doivent bénéficier de ce statut nouvellement créé de "métropole" à partir de janvier 2015. Sauf que tous les élus locaux ne sont pas de cet avis.

Quels sont les grands points de discorde ?

Alsace-Lorraine-Champagne-Ardenne : Strasbourg ou Metz ? C'est la panique à Strasbourg, à en croire l'édition locale de Rue89. Prédestinée à devenir capitale régionale en cas de fusion entre l'Alsace et la Lorraine, son avenir semble plus incertain dans un grand ensemble avec la Champagne-Ardenne. Trop excentrée à l'est, la ville pourrait alors se faire voler la vedette par Metz. C'est en tout cas ce pourquoi le président UDI de la communauté d'agglomération de Metz milite, explique Lor'Actu. D'après Rue89 Strasbourg, le maire PS de la ville, Dominique Gros, compterait sur l'influence d'une de ses conseillères municipales, la ministre Aurélie Filippetti, pour l'emporter.

Mais Strasbourg conserve le soutien de trois présidents de conseils généraux lorrains : la Meurthe-et-Moselle, la Meuse et les Vosges ne veulent pas de Metz et soutiennent leur voisine alsacienne. "N'entretenons aucune controverse sur la ville capitale de notre future région, écrivent-ils dans un communiqué. Strasbourg est légitime. (...) Les Alsaciens doivent être rassurés sur ce point."

Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon : Toulouse ou Montpellier ? Le combat réveille de vieilles rivalités cathares, écrit La Dépêche du Midi. Le président PS du conseil régional de Midi-Pyrénées est confiant : "Toulouse sera très certainement la capitale de cette nouvelle région", assure Martin Malvy à France Bleu. La ville, qui doit bénéficier du statut de métropole, est en effet plus peuplée que sa concurrente Montpellier.

Mais cette solution ne convient pas au président divers-gauche du Languedoc-Roussillon : "A part Toulouse, là-bas, c'est le désert, affirme Christian Bourquin à L'Indépendant. Moi, je n'ai pas fait un désert à Montpellier." Philippe Saurel, le maire divers-gauche de la ville, assure au Midi Libre se battre, "bien sûr", pour qu'elle soit capitale de la "super-région".

Normandie : Caen, Rouen... ou Le Havre ? Pour le président PS de la Haute-Normandie, Nicolas Mayer-Rossignol, l'affaire est entendue. Rouen sera la seule métropole de la Normandie réunifiée : "Evidemment, elle doit être la capitale." La solution est plébilscitée par le président de la communauté d'agglomération, explique France 3, qui voit en Rouen "le point d'ancrage et la locomotive du territoire normand".

Mais sept parlementaires élus de la Basse-Normandie voisine ont écrit à Manuel Valls pour lui faire part de leur inquiétude. "Enlever à Caen sa fonction de capitale la mettrait grandement en danger, estiment-ils. Cela risquerait de la dévitaliser peu à peu en lui retirant des services publics et toutes les activités associées." Le maire UMP du Havre, Edouard Philippe, propose sur France Bleu une troisième possibilité : faire de sa ville la capitale de la future région.

Bourgogne-Franche-Comté : Dijon, Besançon... ou Dole ? Avant même l'examen de la réforme territoriale, les deux régions avaient joué les bons élèves, engageant les discussions en vue d'un rapprochement. Mais sans pour autant trancher la question de la future capitale. Ce n'est pas "l'important", assurait le président bourguignon. "Il n'y aura pas une capitale qui sera Besançon ou Dijon, il y aura une métropole entre Dijon et Besançon", prévenait sa collègue franc-comtoise.

Reste un outsider. "Plutôt que de choisir une des deux capitales existantes qui poserait forcément problème à l'autre, il existe une troisième voie", assure à La Gazette de Côte-d'Or le maire UMP de Dole, une agglomération de 25 000 habitants. Pourquoi pas sa ville ? "C'est une ancienne capitale de région, observe-t-il. Elle a donc un rôle essentiel à jouer dans une fusion."

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