Bruno Palier (CNRS-Sciences Po) sur le report de l’âge légal : "Il n’y a pas un danger absolu"
Bruno Palier, chercheur au CNRS rattaché à Sciences Po et spécialiste des retraites, était l’invité de Stéphane Dépinoy ce vendredi 20 mai.
"On a un modèle français que j’appelle d’hyper-productivité qui essaie de pressurer le plus possible les Français (…) ils en ont assez, pour beaucoup d’entre eux" déclare Bruno Palier, spécialiste des retraites au CNRS (Sciences Po) et invité de Stéphane Dépinoy ce vendredi. Il affirme que la hausse de l’âge légal de départ serait problématique pour les seniors qui ont arrêté de travailler (du fait d’un plan social par exemple), qui espéraient rapidement arriver à la retraite, mais devront attendre encore : "Plus on creuse l’écart entre l’âge où ils ont fini d’être en emploi et le moment où ils peuvent demander leur retraite, plus ils risquent de tomber dans le RSA, d’avoir une perte de revenus et de perdre encore des droits à la retraite".
Seulement 35 % des 60-64 ans exercent encore un métier. Pour faire face à cela, Bruno Palier appelle à une politique nationale de mobilisation des seniors comme l’a fait la Finlande, pour que les entreprises les gardent. Cela passerait par une mise en place d’une formation tout au long de la vie pour préserver les compétences, mais Bruno Palier ajoute qu’il est également nécessaire d’améliorer les conditions de travail pour que les gens travaillent plus longtemps… Ce qui nécessitera des investissements. "Les employeurs ne se sont pas tournés vers l’idée que, en, fait le cœur de la population active est en train de vieillir, et il faut s’y préparer" souligne le politologue. Le spécialiste des retraites ajoute que le modèle de l’hyper-productivité en relevant l’âge de la retraite n’est plus viable pour tout le monde : "Il y a les professions intellectuelles, les professions supérieures, les hommes politiques, les professeurs, ils ne souhaitent qu’une chose, c’est rester emploi, ce n’est manifestement pas le cas de toute la population".
Bruno Palier a enfin confirmé que le projet du report de l’âge légal d’Emmanuel Macron était dans le but de dégager des nouvelles recettes pour investir dans d’autres politiques. Car le système des retraites qui représente 14 % du PIB serait à l’équilibre avec les précédentes réformes : "Il n’y a pas un danger absolu". Il remarque par ailleurs un effet paradoxal des réformes qui visent à faire travailler les gens plus longtemps, ce qui les inciteraient à partir plus vite à la retraite pour éviter qu’ils ne soient concernés par celles-ci : "L’annonce d’une réforme, la succession des réformes, a engendré le souhait de départ le plus vite possible pour éviter de subir la prochaine réforme".
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