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Terrorisme : "Les images des manifestations sociales en France sont reprises par les jihadistes qui les manipulent à leur sauce"

L'universitaire, titulaire de la chaire Moyen-Orient Méditerranée de l'École normale supérieure, analyse la menace terroriste qui pèse sur la France, après l'attentat perpétré mardi soir, ce jeudi 13 décembre sur franceinfo. 

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Gilles Kepel, professeur des Universités, directeur de la Chaire Moyen-Orient Méditerranée de l'École normale supérieure, invité du 8h30 Fauvelle-Dély de franceinfo, le 13 décembre 2018.  (JEAN-CHRISTOPHE BOURDILLAT / FRANCE-INFO)

Invité de franceinfo ce jeudi, Gilles Kepel, spécialiste de l'islam et du monde arabe contemporain, explique que l'auteur présumé de l'attentat de Strasbourg n'avait pas forcément "reçu d'instruction" pour passer à l'acte. "Le climat a été construit" de façon à ce qu'un individu "décide d'aller tout seul tirer dans la foule".

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Cela n'exclut pas qu'il y ait une revendication de l'attentat de Strasbourg "plus tard", "qu'elle soit vraie ou fausse, d'ailleurs, ça n'a aucune importance", souligne l'universitaire.

Instaurer un climat propice à la violence

Les jihadistes "essaient de transformer le climat qu'il y a en France en un climat propice à la violence", a expliqué Gilles Kepel. "Quand on regarde aujourd'hui les sites ou les télés en ligne des jihadistes français qui sont dans la région d'Idlib par exemple, ils ont suivi très attentivement les manifestations [des "gilets jaunes"] qui présentent "une image de la France comme un pays en faillite", poursuit l'universitaire. 

Selon lui, les images des manifestations sociales en France sont reprises par les jihadistes qui les "manipulent à leur sauce". "D'une certaine manière, ça les console, de la chute du califat et de Raqqa en octobre 2017, qu'ils perçoivent, sans le dire, comme ayant été un échec politique et militaire terrible. Tout d'un coup, d'une certaine manière, dans leur vision des choses, ces mouvements en France leur apparaissent comme un signe divin qui doit les encourager", analyse l'universitaire.

L'échec de la déradicalisation

Pour l'universitaire, la stratégie de déradicalisation mise en place en France depuis quelques années est un échec, car elle suppose "une islamisation de la radicalité plutôt qu'une radicalisation de l'islam"

Pour Gilles Kepel, c'est "sur l'idéologie qui s'est emparée de ces individus" qu'il faut travailler", mais "l'administration n'en a pas les moyens", déplore-t-il.

Traiter les "revenenants" des théâtres de combat 

Selon l'universitaire, il faut adapter le traitement des "revenants" à leur profil. Pour les enfants "une famille qui peut recomposer les choses", comme des grands-parents représente la meilleure solution. Concernant les femmes, "la politique a changé" affirme Gilles Kepel. Rarement emprisonnées à leur retour des théâtres de combat il y a encore quelques mois, elle le sont de plus en plus car elles étaient "très impliquées" sur place. Enfin pour les combattants, "ils doivent être judiciarisé, sinon ça ne peut pas fonctionner", estime enfin l'expert. 

Retrouvez l'intégralité de l'émission "8h30 Fauvelle-Dély" :

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