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"Le mage du Kremlin" de Giuliano da Empoli et "Chien 51" de Laurent Gaudé, deux romans cultes de 2022

Gilbert Chevalier nous propose en ce premier jour de l'année 2023, une sélection de romans sortis en 2022. Des romans que l’on aurait eu tort de ne pas lire. 

Article rédigé par Gilbert Chevalier
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Les livres cultes de 2022. (Illustration) (MONTICELLO / FOTOLIA)

Parmi les livres et romans parus en 2022, et dans le contexte actuel de la guerre en Ukraine Le mage du Kremlin de Giuliano da Empoli, publié chez Gallimard au printemps dernier a été une révélation pour beaucoup de lecteurs.  

L’auteur italo-suisse a reçu le Grand Prix du roman de l'Académie française pour un roman qui décrypte les mécanismes du pouvoir en Russie, au cours des 30 dernières années. Le livre est présenté comme les confessions d'un conseiller fictif du Kremlin, Vadim Baranov, qui s'inspire du parcours d’un vrai conseiller, Vladislav Sourkov, cofondateur du parti Russie Unie de Vladimir Poutine.  

Dans la même veine, un autre roman pour décrypter ce monde russe ?  

Je conseille très vivement Oligarque d'Elena B. Morozov chez Grasset. Oligarque se veut un portrait-robot, celui d'un oligarque russe, tels qu'ils existent aujourd'hui. Le portait et le parcours de l'oligarque imaginé par Helena B. Morozov pourrait être celui de beaucoup d'oligarques réels : un être hybride, un peu Abramovitch, un peu Kodhorkovski, un peu Berezovski  et d’autres encore.

Et dans ce roman de pure fiction nous suivons l’ascension d’un certain Grigori Yurdine, jeune orphelin depuis la Russie soviétique en pleine décomposition, jusqu’aux plus hautes sphères de la finance internationale décomplexée. Un demi-siècle d'une vie qui  accompagne la chute d’un monde ancien : l’Urss et la naissance d’un monde nouveau, celui impitoyable et cruel de la Russie d’Eltsine et ensuite de Poutine.     

Enfin je signale l’ouvrage collectif publié chez Stock, Hommage à l’Ukraine, où l’on retrouve une quinzaine de textes d’auteurs ukrainiens contemporains qui nous racontent leur pays que l’on connaît également très mal.      

Autres livres que l’on aurait tort de rater ?    

Un homme sans titre de Xavier Le Clerc, publié chez Gallimard. Xavier le Clerc nous dresse le portrait de son père, travailleur immigré en Normandie avec sa  famille nombreuse. Une vie âpre qui prend ses racines dans la misère qu’a vécue la Kabylie pendant l'Algérie française.   

Vie difficile qui se prolonge ensuite dans la France des travailleurs immigrés des années 70 et 80. Une France méprisante et bien peu reconnaissante pour ces travailleurs, des hommes sans titre. Un livre touchant et plein de nuances d’une grande justesse de ton. Et un livre qui se termine par un plaidoyer étonnant de l'auteur qui explique pourquoi il a changé de nom. Il s’appelait Hamid Aït-Taleb, il est devenu Xavier Le  Clerc.      

Autre roman que vous devez lire si jamais vous l'avez raté en septembre dernier, Chien 51 de Laurent Gaudé chez Actes Sud. Laurent Gaudé, prix Goncourt 2004 pour Le Soleil des Scorta, nous propose une  dystopie percutante. L’auteur nous emmène dans une mégapole gérée par une multinationale qui, comme d’autres, rachètent des états en ruine.  

Dans ce monde, deux flics vont mener une enquête autour de deux morts retrouvés atrocement mutilés dans les quartiers pauvres de la mégapole. Fausses pistes, guerre des polices, manipulations politiques, tout y est. Et Laurent Gaudé mène tout cela de main de maître. L'écriture subtile et raffinée et l’humanisme de Laurent Gaudé y font beaucoup.  

Pas très loin de l’univers de Laurent Gaudé avec L’armée des hommes libres, Franck Darcel, le guitariste du groupe rennais de la fin des années 70 et du début des années 80, Marquis de Sade, propose une dystopie, un thriller géopolitique difficile à enfermer dans un genre. Franck Darcel imagine une Europe dévastée en 2030, après plusieurs pandémies et un conflit mondial.    

Et  puis je ne voudrais pas oublier Plus Bas dans la Vallée de Ron Rash, publié chez Gallimard et Faire bientôt éclater la terre d'un autre américain, Karl Marlantes, chez Calmann-Lévy. Des nouvelles de Ron Rash et un roman qui ont en commun la nature et son exploitation sans mesure et parfois violente par l’homme aux Etats-Unis et les conflits et luttes sociales qui ont  accompagné la construction de ce pays tout au long du XXe siècle. On retrouve dans Plus Bas dans la Vallée, la finesse habituelle de Ron Rash.  

Une précision d’écriture, voire une lenteur que l’on retrouve chez Karl Marlantes. L’auteur américain nous parle d’abord de la Finlande de ses origines, à travers trois jeunes Finlandais qui fuient la domination russe et émigrent au début du XXe siècle aux Etats-Unis, dans une colonie de bûcherons au Nord de la Californie. C’est une grande saga familiale.  

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