Intelligence artificielle : un clip musical entièrement généré par un logiciel signé OpenAI fait polémique aux États-Unis
La chanson s’appelle The Hardest Part, par l'artiste Washed Out, et son clip a été généré intégralement par une intelligence artificielle nommée Sora. Sora est issue de la technologie d’OpenAI, le créateur de ChatGPT. Le clip raconte l’histoire d’un jeune homme et d’une jeune femme qui se rencontrent au lycée et font leur vie ensemble. La vidéo enchaîne les séquences de vie et, comme le réalisateur voulait créer l’effet d’un zoom permanent, la caméra avance toujours, à travers un bus, les couloirs d’un lycée, la rue, une voiture, un restaurant, un appartement, un supermarché...
Le storytelling dans un clip peut avoir recours à ce genre de mise en scène originale, peut-être plus qu’un long-métrage. Le mouvement des personnages n’est pas toujours très naturel, quand ils marchent ou courent. Et les visages du jeune homme et de la jeune femme changent un peu dans chaque tableau, au point qu’on se demande si ce sont les mêmes. Mais dans l’ensemble, ça reste plutôt réussi et un peu troublant. Les images laissent une impression de réalité malgré tout.
Un côté images rêvées qui convient à la chanson
Le réalisateur, Paul Trillo, pensait à ce concept de zoom infini depuis dix ans. Mais il se disait que c’était impossible d’y arriver avec une caméra ou en 3D, avec les moyens financiers à sa disposition. Lorsqu'en février, OpenAI a présenté Sora, le projet lui est devenu accessible. Paul Trillo fait partie des artistes qui ont eu accès à Sora avant le grand public. Il dit que le côté images rêvées ou hallucinées dans les vidéos produites par Sora convenait parfaitement à sa vision et à la nostalgie de la chanson.
Sora est une version vidéo de ChatGPT en quelque sorte. Vous écrivez ce que vous voulez voir à l’image et la technologie génère une vidéo d’environ une minute. Paul Trillo a par exemple écrit "On zoome à travers une bulle de chewing-gum qui explose et on entre sur un terrain de football américain". Parfois, la vidéo générée le satisfaisait, parfois il la jugeait inutilisable. Il a fallu faire des compromis sur certains résultats, mais finalement pas moins que sur un clip traditionnel, où le manque de moyens vous oblige aussi à sacrifier des idées. En tout, pendant six semaines, l’IA a produit environ 700 vidéos. Le réalisateur en a gardé une cinquantaine.
Un outil qui inquiète les réalisateurs
À la réception de ce clip par le public, il y a eu suffisamment de critiques pour que Washed Out se sente obligé de se justifier sur son compte Twitter. "Cette vidéo ne dit rien, elle est moche, c’est le néant", a fustigé un autre artiste électro. Mais au-delà du contenu lui-même, beaucoup de créateurs s’inquiètent de voir un jour l’IA prendre leur place. C’était l’une des revendications lors de la grève des scénaristes à Hollywood l’an dernier. Washed Out et son réalisateur disent y voir un outil supplémentaire pour les artistes, en particulier ceux qui n’ont pas forcément les moyens financiers de leurs ambitions. Ils admettent également que le potentiel de la technologie impose de réfléchir à un cadre légal, ou au moins, à un usage responsable.
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