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C'est dans ma tête. Croire aux fake news

La commissaire européenne au numérique, Mariya Gabriel, présentera le 25 avril des mesures pour mieux traquer les fake news.

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Clavier de "fake-news"...

 (PETER DAZELEY / PHOTOGRAPHER'S CHOICE / GETTY IMAGES)

Mariya Gabriel, la commissaire européenne à l'économie et à la société numériques va présenter dans quelques jours, le 25 avril, des mesures pour mieux traquer les fake news. La psychanalyste Claude Halmos revient aujourd'hui sur cette question.

Comment expliquer que tant de gens, et particulièrement tant de jeunes, soient prêts à croire à ces fake news ?    

Je crois que l’on peut d’abord rappeler que les fake news procèdent d’une manipulation. Et que la réussite d’une manipulation dépend toujours de deux choses : elle dépend d’une part de l’habileté du manipulateur, et des armes dont il dispose. Et d’autre part des points faibles de sa - ou de ses - victimes, dont il va se servir.

Dans le cas des fake news les manipulateurs disposent de l’arme d’internet, qui leur permet non seulement de toucher un très grand nombre de gens, mais aussi d’accréditer - par la répétition - leurs mensonges. On peut à ce propos rappeler la phrase de ce spécialiste de la manipulation qu’était Goebbels : "Plus le mensonge est gros, plus il passe. Plus de fois il est répété, plus le peuple le croit." 

À quoi serait due la crédulité des victimes ?

D’abord à l’ignorance. Et, s’agissant de jeunes, cela pose évidemment la question de l’école, qui ne leur a pas suffisamment appris à réfléchir. Et ensuite à la croyance fantasmatique - que les fake news s’emploient à renforcer - en une instance, très puissante et très maléfique, qui organiserait des complots.     

D’où viendrait cette croyance ?  

Elle est certainement due, pour beaucoup, à la dépolitisation. Parce que, quand on a conscience des souffrances sociales que l’on subit et que l’on ne peut se référer, pour les expliquer, à aucune théorie économique ou politique, on est obligé d’en revenir aux seuls mécanismes que l’on connaît, parce que l’on en a l’expérience : ceux des relations interpersonnelles. Et d’imaginer que le monde, dans son ensemble, fonctionne sur ce mode.

Avec par exemple, cachées quelque part, des individualités mauvaises qui se regrouperaient pour porter préjudice à leurs semblables. Et l’on va se sentir persécuté par ces ennemis imaginaires, comme on pourrait l’être par des voisins malveillants.    

Pensez-vous qu’une prévention soit possible ?  

Je pense que l’éducation peut jouer un rôle central dans la prévention, parce qu’elle est un élément essentiel de la construction d’un enfant. Quand des parents enseignent à leurs enfants les règles de la vie civilisée et leur imposent de les respecter, ils ne leur apprennent pas seulement à se conduire correctement. Ils leur permettent aussi de faire la différence entre l’imaginaire, où tout est possible, et la réalité qui obéit, elle, à des lois précises dont il faut tenir compte.  

Et c’est indispensable pour que ces enfants puissent comprendre, plus tard, qu’une information n’est pas forcément vraie parce que l’on imagine qu’elle l’est. Et qu’il convient de la vérifier. Ce qui suppose de se mettre au travail. Et donc de renoncer au sentiment de toute-puissance et à la jouissance que procure toujours le fait de s’autoriser à affirmer, sans aucune limite, n’importe quoi.  

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