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C'est dans ma tête. La pédophilie dans l'Église catholique : le procès du père Preynat s'ouvre lundi à Lyon

Après l'affaire Matzneff qui a occupé la Une des médias ces dernières semaines, un procès important s'ouvre à Lyon, ce lundi 13 janvier, le procès du Père Preynat, accusé d’agressions sexuelles sur de jeunes scouts.

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Photo non datée du père Bernard Preynat diffusée par "Complément d'enquête" en avril 2016. ("COMPLEMENT D'ENQUETE" / FRANCE 2 / BAPTISTE BOYER / FRANCEINFO)

Ce lundi 13 janvier, un procès important s'ouvre à Lyon devant le tribunal correctionnel, celui du Père Preynat, accusé d’agressions sexuelles sur de jeunes scouts. Depuis que ses agissements ont été révélés, beaucoup d’adultes, agressés dans leur enfance par des prêtres, ont révélé ce qui leur était arrivé. Et il semble que les affaires de pédocriminalité soient nombreuses au sein de l’Église catholique...

franceinfo : Comment pensez-vous, Claude Halmos que l’on puisse l’expliquer ?

Claude Halmos : La première raison est que les pédophiles choisissent en général des activités en rapport avec les enfants. L’Église en organise, le statut de prêtre peut être une bonne "couverture". Et l’Église a, de plus, longtemps maintenu, sur ces affaires, une tradition de silence, qui pouvait leur laisser espérer l’impunité.

Cela veut dire qu’un pédophile est tout à fait conscient de ce qu’il fait ?

Oui. La pédophilie fait partie de ce que l’on appelle les "perversions". Et un pervers n’est pas "fou". Une personne atteinte de troubles psychotiques graves, un "fou" peut, parce qu’il est tout à coup traversé par une pulsion qui le dépasse, agresser sexuellement quelqu’un, ou le tuer. Mais un pervers est un chasseur conscient et organisé. Il choisit ses terrains de chasse, et il choisit ses proies.

Comment expliquer que l’on devienne pédophile ?

Un pédophile recherche, comme tous les pervers, trois sortes de jouissances : celle de l’acte qu’il commet. Celle que lui procure la transgression d’un interdit : l’enfant est d’autant plus désirable qu’il est interdit. Mais aussi celle qu’il tire de la domination de sa victime, et surtout de son avilissement : le pédophile jouit de transformer l’enfant en un objet de consommation interchangeable, et sans valeur.
Et cette dimension de destruction est essentielle. Parce qu’elle est liée à son histoire personnelle.


Les pervers ont en général vécu (ou vu vivre par d’autres), dans leur enfance, des choses qui auraient pu les rendre fous, et les détruire. Et ils ont évité la folie parce qu’ils ont trouvé le moyen de jouir de l’horreur qu’ils subissaient. Cela leur a permis de retourner, à l’insu de leur bourreau, la situation ; et d’échapper, en partie, à son emprise. Mais cela les a conduits, aussi, à devenir dépendants de ce type de jouissance, et à la reproduire. Certains enfants, victimes de violences physiques, peuvent ainsi devenir des adeptes du masochisme ; et certains enfants abusés, des pédophiles.

Est-ce que le fonctionnement de l’Église peut jouer un rôle, par rapport à ces pathologies ?

L’obligation, faite aux prêtres, du célibat, joue certainement un grand rôle. La sexualité est une chose nécessaire aux humains. Si on la leur interdit, on les place dans une situation de frustration anormale, qui ouvre la porte à toutes les déviances, parce qu’elle les oblige à vivre dans la transgression et la culpabilité.
Et cela les ramène souvent à ce qu’ils ont déjà vécu, enfants, du fait d’interdits parentaux.


On ne peut donc qu’espérer que ce qui se passe conduise l’Église à s’interroger sur cette obligation de célibat, que beaucoup d’autres religions, d’ailleurs, n’imposent pas.

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