Chroniques du ciel. Les carburants d'aviation durables ou SAF (sustainable aviation fuel)
Aujourd’hui, dans la série de l’été sur l’avion du futur, nous nous penchons sur les SAF, (en anglais sustainable aviation fuel), les carburants durables, avec le patron de Total, Patrick Pouyanné.
Le secteur de l’aviation représente aujourd’hui une consommation, à l’échelle de la planète, de l’ordre de six millions de barils de pétrole par jour, soit environ 6% de la consommation mondiale.
Avec l’augmentation du trafic aérien, cette consommation va sans doute doubler dans les prochaines années, les SAF (sustainable aviation fuel), les carburants durables, sont peut-être une solution.
La "décarbonation"
Face au réchauffement climatique, le salut de cette industrie passera donc par sa "décarbonation" avec l’utilisation des carburants d’aviation durable, les fameux SAF. Patrick Pouyanné, PDG du groupe Total Energy.
Derrière le concept des SAF, il y a de nombreuses possibilités. L’une d’entre elles, ce sont les biocarburants liquides, on l’a fait pour les véhicules légers, les biodiesels, les bioéthanols, on cherche à le faire pour les avions sur la base de graisses animales ou d’huiles de fritures, on sait les raffiner avec de l’hydrogène, ensuite il y aura une question de volume.
Patrick Pouyanné, PDG du groupe Total Energy
"Après on regarde les déchets végétaux et ça c’est très compliqué, ça marche en labo mais le passage à l’échelle industrielle est complexe. Total on a dû investir en R&D environ 500 millions d’euros, et nous n’avons pas encore de résultats probants à l’échelle industrielle", précise le PDG de Total.
Industrialisation des carburants synthétiques : pas avant 2040-2050
"Ensuite, il faut aller vers un graal, un 'efuel', on prend de l’hydrogène vert et on le combine avec du CO2, et là, on fait un carburant synthétique. C’est complexe, ça coûte cher, l’hydrogène vert, c’est trois à quatre fois le prix de l’hydrogène normal. Le CO2, il faut le capturer, on travaille sur ces pistes, mais c’est à moyen et long terme, pas avant 2040-2050.
On sait le faire, mais pas l’industrialiser. La décennie à venir, elle est sur des biocarburants à base de graisses animales, ajoute Patrick Pouyanné. On va pouvoir accompagner ce passage de 1% puis 2%, 3% et 5% avec nos capacités de production, notamment à la Mède, ensuite il faudra trouver autre chose, mais pour l’hydrogène, ce sera pour des avions au court rayon d’action pas plus de 1000 miles."
Mais Patrick Pouyanné prévient : réduire l’empreinte carbone du transport aérien renchérira le prix des billets d’avion. Cette transition énergétique et écologique ne se fera pas sans un impact économique.
Le passager ne veut pas payer beaucoup plus cher, mais fournir un biocarburant liquide, c’est quatre fois plus cher que le kérosène normal.
Patrick Pouyanné
"Si on introduit 1% ce n’est pas trop grave, précise le PDG de Total, mais si on en met 10 à 15%, le prix du billet augmente considérablement, de l’ordre de 4 à 5 euros pour un Paris-Montréal par exemple. On est dans des équivalents de taxe carbone de 300 à 400 dollars la tonne, quand les gens râlent pour une taxe à 30 dollars, vous voyez le gap."
D’ici l’an prochain, la France va rendre obligatoire l’incorporation de 1% de SAF au départ de l’Hexagone, taux qui montera à 2% en 2023 et à 5% en 2030.
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