Au Japon, des avocats réclament un débat sur la peine de mort
Il y a actuellement plus de 100 détenus promis à l’échafaud dans les prisons du Japon. Chaque année, plusieurs accusés sont condamnés à mort et plusieurs sont exécutés presque tous les ans. La peine capitale est appliquée dans les cas de meurtres multiples particulièrement cruels. Dans la plupart des cas, les condamnés font appel de la sentence et cette dernière ne devient définitive que des années après, sur décision de la Cour suprême. À partir de cette confirmation, le seul recours possible est la demande de révision de procès, mais c’est exceptionnel et les condamnés dont la peine est confirmée peuvent être pendus à tout moment.
Selon la loi, les condamnés à mort doivent être pendus dans les six mois suivant la confirmation de la sentence, mais en pratique cela n’arrive jamais. Ils passent des années ou des décennies dans l’antichambre de la mort, avec l’angoisse permanente d’être exécuté. Cela les rend souvent déments, car ils ne sont prévenus que le matin même, à l’aube, en étant conduits vers la salle de pendaison. Leur famille et avocats ne sont informés qu’après leur décès.
Un processus opaque
Il n’y a aucune explication donnée sur qui décide des exécutions et dans quel ordre, tout cela est fait en l'absence totale de transparence. Il n’y a pas non plus de bourreau au Japon, ce sont les gardiens de prison qui exécutent les condamnés à mort, ce qui en général est pour eux aussi un traumatisme à vie.
Le Japon est une des dernières grandes démocraties qui continuent de condamner à mort et d’exécuter. Alors que les responsables politiques n'ont pas l'intention de l'abolir, et que l'opinion est encore majoritairement pour la peine de mort, un comité de réflexion pluridisciplinaire emmené par des avocats exige l’ouverture de discussions sur la peine capitale.
Jusqu’à présent, il n’y a même pas de réel débat politique sur le sujet, parce que le gouvernement le refuse, comme l’a confirmé encore très récemment le ministre de la Justice à notre correspondante : "Dans certains cas de meurtres particulièrement cruels, les tribunaux estiment inévitable la condamnation à mort du coupable. Et nous pensons que pour le moment l’abolition de la peine capitale ne serait pas opportune", a-t-il dit. Même réponse à la question écrite et adressée au Premier ministre.
Une erreur judiciaire qui ébranle l'opinion
Mais si les avocats entreprennent maintenant des démarches fortes pour l’abolition, c’est parce que très récemment, un Japonais de 88 ans, Iwao Hakamata, condamné à mort en 1968, il y a 56 ans, et qui a passé près d’un demi-siècle dans le couloir de la mort, a été totalement acquitté après des analyses d'ADN qui ont semé le doute. Or, cette terrible erreur judiciaire est de nature à faire évoluer l’opinion, qui était jusqu’à présent favorable à la peine capitale.
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