La Turquie est agitée par une vague de protestation des agriculteurs

Ces manifestations ne sont pas nouvelles, mais elles sont inédites par leur ampleur. Comme en France, les agriculteurs turcs se plaignent de ne plus vivre de leur travail.
Article rédigé par Marie-Pierre Vérot
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Des agriculteurs sèchent les tomates qu'ils récoltent sous une chaleur torride dans le district de Karaca Dag à Diyarbakir, en Turquie, le 23 juillet 2024. (MUSTAFA KILIC / ANADOLU)

Dans le même temps, les agriculteurs turcs sont étranglés par les négociants de l'agro-industrie qui les contraignent à vendre toujours moins cher, encore moins cher que l’an dernier. Le cas des producteurs de tomates de Konya dans le Sud-Est est emblématique, la Turquie en est l’un des principaux producteurs et exportateurs. Le coût de production est de 10 livres le kilo, soit environ 30 centimes d’euros. Mais les négociants n’offrent que 1,60 livre, alors même qu’ils l’achetaient 3,5 livres en 2023. En Thrace dans l’Ouest, un producteur de melons explique que les négociants lui proposent 1 livre le kilo pour les revendre 20 fois plus cher. Il les laissera pourrir dans son champ. De partout dans le pays monte la plainte des agriculteurs contre leur mort programmée, et ils en veulent à l’État et au ministre de l'Agriculture, dont ils demandent la démission.

Les agriculteurs se sentent abandonnés par l'État

L’État ne les soutient pas, c’est le cœur de la crise, selon les agriculteurs turcs. Pas d’aide, mais aussi un sentiment d’abandon. Ils sont seuls face aux agro-industries, faute de prix plancher. Il n’y a pas de planification dans la politique agricole. Ils sont seuls aussi face aux coopératives dont ils dénoncent la cupidité. Elles n’achètent leurs récoltes que s’ils acquièrent leurs semences à des prix prohibitifs, elles refusent les délais de paiement, tous s’endettent. Les taux d’intérêt, voire d’usure, s’envolent. De plus en plus d’exploitants vendent leur voiture, leur maison ou leur tracteur pour rembourser leur crédit et en prennent un nouveau dans la foulée. C’est une spirale sans fin. Ils sont seuls aussi face aux banques, qui saisissent les terres pour les vendre aux enchères. Entre un quart et un tiers des terres sont hypothéqués dans les régions de Manisa ou Aydin dans l’Ouest, les faillites se multiplient. C’est inquiétant quand on sait que le secteur emploie environ 18% de la population active.

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