"L’humanité a besoin de plus de temps libre", estime José Mujica, ancien président de l’Uruguay, dans une interview au "New York Times"

Marchand de fleurs ambulant dans les rues de Montévidéo dans sa jeunesse, guérillero, très longtemps emprisonné, José Mujica pense notamment que l’humanité, telle qu’elle va, est condamnée puisqu'elle est dominée par le marché.
Article rédigé par Marie Dupin
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
L'ancien président uruguayen José Mujica salue après avoir voté dans un bureau de vote lors des élections primaires, à Montévidéo le 30 juin 2024. (EITAN ABRAMOVICH / AFP)

José Mujica qu'on appelle Pepe Mujica, ébouriffant président de l’Uruguay de 2010 à 2015, à l’allure folklorique et la vie extraordinaire, a accordé vendredi 23 août, une interview exceptionnelle au New York Times (article payant). Il a dans sa vie tout connu. Tour à tour marchand de fleurs ambulant dans les rues de Montévidéo dans sa jeunesse, guérillero dans les années 60, partisan de la lutte armée, enfermé 15 ans durant dans les geôles de la dictature, torturé deux ans au fond d’un puits avec pour seuls compagnons des rats et des grenouilles, avec qui il partageait ses quignons de pain, et dont l’amitié l’aida à survivre.

On le connaît surtout pour avoir refusé de s’installer après son élection à la présidence dans le palais présidentiel. Cet immense bâtiment de quatre étages. À l’intérieur, il faut marcher l’équivalent de trois pâtés de maisons pour aller à la cuisine se faire un thé. Pepe Mujica n’a donc jamais cessé de vivre dans sa minuscule maison de 45 mètres carrés au toit de tôle avec sa femme et le chien à trois pattes qu'il avait adopté, un président fuyant les tapis rouges et les clairons, et professant une philosophie de vie simple en vue d’une société meilleure. 

À 89 ans, Pepe Mujica a encore quelques messages à adresser au monde. Il pense notamment que l’humanité, telle qu’elle va, est condamnée puisque les êtres humains, ces animaux à la fois intelligents et stupides, semblent aujourd’hui dominés par le marché, cette religion qui a fait d’eux des acheteurs voraces. Les humains vivent pour acheter, travaillent pour acheter, et vivent pour payer.

Donner un sens à la vie

L’Uruguay, par exemple, compte 3,5 millions d'habitants. Il importe chaque année 27 millions de paires de chaussures. Ainsi, tous, nous travaillons, dans la douleur, pour fabriquer des déchets. Nous consacrons nos vies à satisfaire des besoins qui se multiplient. Ainsi soumis à la loi de la nécessité, nous perdons notre liberté. Nous perdons notre vie. Voici ces derniers conseils. Les humains ont besoin d’avoir plus de temps libre, estime-t-il, d’être plus enracinés. Donner un sens à leur vie. Lutter pour le bonheur, pas pour la richesse. Car la vie est belle. Ce qui différencie les humains des autres animaux, c’est que la capacité de trouver un but. Enquêter, jouer de la musique, faire du sport, lire, écrire, trouvez ce qui remplit l'existence. S'ils ne le trouvent pas, le marché leur fera payer des factures jusqu'à la fin de leurs jours. S'ils le trouvent, ils auront une raison de vivre. 

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