Albanie : l'interdiction de TikTok annoncée par le gouvernement ne fait pas l'unanimité

Fin décembre 2024, le Premier ministre albanais a annoncé la fermeture prochaine du réseau social chinois pour un an. Les autorités expliquent vouloir protéger les mineurs, mais l'opposition et les plus jeunes ne sont pas convaincus.
Article rédigé par franceinfo - Louis Seiller
Radio France
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Fin décembre 2024, le Premier ministre albanais a annoncé vouloir fermer le réseau social TikTok pour un an. Photo d'illustration. (ANTONIN UTZ / AFP)

Un peu partout autour de la planète, le réseau social TikTok et ses vidéos ultracourtes, regardées à la chaîne, sont de plus en plus dans le viseur des gouvernements. Dernier pays en date, l’Albanie qui a décidé de bloquer cette plateforme chinoise, très populaire au sein de la jeune génération. Cette interdiction a été annoncée fin décembre 2024 par le Premier ministre albanais et fait suite à un événement qui a traumatisé le pays.

C’est au cours d’une conférence devant un parterre d’enseignants que le Premier ministre socialiste, Edi Rama, a annoncé la fermeture prochaine de TikTok pour une durée d’un an. Une décision qui a été prise quelques semaines après le meurtre d’un collégien de 14 ans, tué au couteau près d’une école du centre de Tirana. L’affrontement fatal a eu lieu après un conflit sur les réseaux sociaux. Ce meurtre a profondément choqué la société albanaise et il a poussé les autorités à réagir. Le Premier ministre a assuré que l’interdiction de TikTok était une décision "mûrement réfléchie" et le résultat de multiples concertations menées auprès des parents d’élèves et de l’administration scolaire.

L'application la plus utilisée par la jeunesse

Mais cette fermeture annoncée ne fait pas que des heureux, et notamment parmi la jeunesse albanaise. Comme dans de nombreux pays du monde, TikTok est devenu l’un des réseaux sociaux les plus populaires du pays. Selon la société de conseil Kepios, en Albanie, TikTok compterait plus de 1,5 million d’utilisateurs, sur une population totale de 2 400 000 habitants.

Avec son algorithme très individualisé, elle est de loin l’application la plus utilisée par la jeunesse qui passe plusieurs heures par jour à regarder ses vidéos ultracourtes. C’est le cas d’Ortensja, une étudiante de 22 ans : "Moi, je ne voudrais pas que TikTok soit interdit, parce que, pour nous, c’est un moyen de s’informer, même si c’est vrai que ça a un impact négatif sur les adolescents. Mais je ne pense pas qu’il faut prendre une décision aussi grave que de la bloquer totalement."

L'opposition dénonce une "censure"

Depuis son annonce, cette interdiction alimente les polémiques au sein de la société albanaise. La décision du Premier ministre suscite évidemment beaucoup de débats. Il y a déjà les entrepreneurs qui font la promotion de leurs produits ou de leurs services sur TikTok et qui redoutent bien sûr des pertes de revenus. Mais les critiques viennent surtout du côté des partis d’opposition et de la société civile qui accusent le gouvernement d'entraver la liberté d’expression.

Surtout que la mesure devrait entrer en vigueur alors que d’importantes élections parlementaires auront lieu début mai. "C’est de la pure censure, car le Premier ministre contrôle les médias traditionnels et il peut manipuler les autres réseaux comme Facebook ou Instagram, dénonce Redi Muçi, un des militants du Mouvement Ensemble, un parti de gauche qui dénonce l’autoritarisme du Premier ministre Edi Rama et qui est particulièrement actif sur TikTok. Le seul réseau sur lequel il n’a pas d’influence, et qui est très apprécié du public, c’est TikTok, et il décide de le bloquer."

Le gouvernement a assuré que le blocage de TikTok ne devrait durer qu’une année, le temps de trouver une solution technique pour empêcher son utilisation par les moins de 18 ans.

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