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"État d’urgence migratoire" : Frontex vole au secours de Chypre où le nombre de demandeurs d'asile explose

Près d’un millier d’exilés est entré sur l’île depuis le début de l’année pour déposer une demande d’asile. Avec seulement un million d’habitants, le plus petit pays de l’Union européenne dit aujourd’hui être en "état d’urgence migratoire".

Article rédigé par franceinfo - Noé Pignède
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Des réfugiés syriens dans le village de Chloraka, à Chypre, le 31 janvier 2022. (CHRISTINA ASSI / AFP)

L'appel de Chypre a finalement été entendu : le directeur de l’agence européenne chargée de la surveillance des frontières de l’Union a annoncé, jeudi 17 février, depuis Nicosie, le renforcement de sa présence dans le petit pays européen. Chaque jour, des dizaines d’exilés entrent illégalement dans la République de Chypre pour venir déposer une demande d’asile. À un point tel que le pays dit aujourd’hui être en "état d’urgence migratoire".

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Il suffit de regarder les chiffres pour comprendre : depuis le début de l’année, près d’un millier d’exilés est entré sur l’île, qui est le plus petit pays de l’Union européenne et ne compte qu'un million d’habitants. L’an dernier, le nombre de demandeurs d’asile a augmenté de 123 % et les autorités assurent que les choses ne vont pas s’arranger en 2022.

Les réfugiés entrent par la partie turque de l'île

L'affaire est compliquée par la situation géopolitique de l’île de Chypre, coupée en deux : une partie grecque et une partie sous influence turque. Depuis 1974, la République de Chypre, grecque donc, exerce son autorité seulement sur la partie sud de l’île. Tout le nord-est depuis placé sous contrôle d’un pouvoir soutenu par la Turquie, pas reconnu par la communauté internationale. Il n’y a donc pas de frontière officielle entre les deux, mais une zone tampon très facile à traverser.

Selon les chiffres de la République de Chypre, 80 % des exilés rentrent par la zone dite turque. "Je suis venu au nord de Chypre, explique ainsi Jean-Marc, 54 ans, qui était pasteur au Congo. Et là il n'y avait pas de problème de visa parce que si tu t’inscris seulement dans une université, il te laisse marcher sur leur sol." Jean-Marc a dépensé près de 6 000 dollars pour devenir une sorte d’étudiant fantôme. Camerounais, Pakistanais, Indiens : tous racontent la même histoire. La République de Chypre accuse la Turquie d'Erdogan d’utiliser une nouvelle fois ces réfugiés pour mettre la pression sur l'île et donc sur l’Union européenne.

Une fois à Chypre, ils se retrouvent coincés

Les arrivées en bateau, parallèlement, sont aussi de plus en plus nombreuses. Cette fois, les exilés partent du Liban ou de la Syrie. Tous fuient l’effondrement de leurs pays. Les passeurs leur promettent une vie facile en France, en Allemagne, ou encore au Pays-Bas. Dès le départ, la promesse est mensongère : Chypre ne fait même partie de l’espace Schengen et ne permet pas de libre circulations vers la continent. Une fois sur ce sol en fait, ils se retrouvent tous coincés dans un camp saturé. "Ce camp, c’est le pire camp du monde, j’ai peur de mourir, confie Fahed, un Syrien de 50 ans. Si j’avais sûr, je ne serais jamais venu. Les passeurs nous ont vendu du rêve : on nous a dit : là-bas, tu vas travailler et gagner 100 euros par jour. J’ai tout quitté pour venir. Mais en fait, ici, c’est pire qu’en Syrie. Je dis à tout le monde : ne venez pas ici ! Allez directement sur le continent. Chypre, ce n’est pas vraiment l’Europe."

Submergées, les autorités chypriotes ont obtenu le renforcement de la présence de Frontex pour ralentir l’arrivée des exilés. Elles demandent maintenant aux autres États membres de l’Union de faire preuve de solidarité, en accueillant une partie des réfugiés déjà sur leur sol.

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