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En Espagne, des octogénaires accusés de blanchir de l’argent d’un trafic de cocaïne

Ces six paisibles retraités étaient utilisés par un avocat véreux comme hommes de paille pour blanchir l’argent d’un trafic international de drogue.

Article rédigé par Mathieu de Taillac
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
L'"Opération beautiful" a permis l'arrestation de 135 personnes suspectées d’importer de la cocaïne d’Amérique du Sud pour la vendre à travers l’Europe. (CAPTRUE D'ÉCRAN POLICE NATIONALE ESPAGNOLE)

L’histoire est étonnante : de paisibles grands-pères espagnols, tous âgés de plus 80 ans, et accusés de blanchir des centaines de milliers d’euros provenant du trafic de drogue. S’agit-il pour autant d’un gang d’octogénaires, de papis investis dans le crime organisé ? Oui et non ! Oui, parce qu’ils sont bien accusés de blanchiment. Et non, parce qu’a priori ce ne sont pas ces personnes âgées qui sont à l’initiative. Ils ont été recrutés par un avocat, Juan Ramón García Crespo, accusé de complicité avec un trafiquant de drogue, Juan Andrés Cabeza, et utilisés pour jouer les hommes de paille dans la Communauté valencienne. Six hommes qui vivent chichement, certains dans des maisons de retraite publiques, d’autres dans des logements sociaux, touchant parfois le minimum vieillesse.

Bénéficiaire de l’aide sociale mais titulaire de 44 comptes

Prenons Genaro, par exemple, 84 ans. Le journal El País, qui a eu accès au dossier, nous dit qu’il touche 286 euros par mois d’aide sociale et pourtant, le voilà, en tout cas sur le papier, titulaire de 44 comptes en banque, et il figure dans l’organigramme de 25 entreprises. Et notamment une société immobilière au capital de 3,5 millions d’euros, qui contrôle 28 logements, des places de parking ou encore un local commercial dans un quartier chic de Madrid.

Pour le moment, on ne sait que ce que ces prête-noms ont bien voulu dire aux enquêteurs et à la presse. Au journal El País, qui a appelé les octogénaires, l’un d’entre eux, Jose Luis, accusé d’avoir blanchi 314 000 euros, a reconnu que l’avocat supposément véreux les payait pour les accompagner signer des papiers chez le notaire. Et aux policiers, l’un des accusés a mis un chiffre sur cet échange : 100 euros pour aller chez le notaire. Un tarif à comparer aux sommes en jeu. Les enquêteurs accusent l’avocat d’avoir blanchi plus de deux millions d’euros dans le dossier du trafiquant Cabeza. C’est un sacré coup de filet qu’a effectué la police espagnole en 2019 à Alicante, probablement la plus grande opération anti-drogue de la région de Valence.

135 personnes mises en examen

Appelée par les agents de police "Opération beautiful", elle a permis la mise en examen de 135 personnes. Il s’agissait d’importer de la cocaïne d’Amérique du Sud pour la vendre à travers l’Europe : le dossier d’instruction évoque 4 000 kilos de cocaïne, un réseau hiérarchisé avec des ramifications en Colombie, au Portugal, en Suède et en Roumanie. Le recours au troisième âge peut prêter à sourire, mais porte la marque de professionnels du trafic de drogue : l’homme suspecté d’être à la tête de l’organisation conservait chez lui un million et demi d’euros en liquide dans des boîtes à chaussures.

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