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Les Républicains peuvent-ils survivre sans être fongibles ?

Balayés lors de la présidentielle, le parti les Républicains souhaite siéger dans un groupe indépendant après les législatives. Derrière les discours d'unité, quelques divergences. 

Article rédigé par franceinfo
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Clément Viktorovitch dans Entre les lignes, sur franceinfo, le 19 avril 2022. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Lors d’un conseil stratégique, les responsables des Républicains ont arrêté mardi 26 avril une ligne : aucune alliance locale aux législatives, ni avec le Rassemblement national, ni avec Reconquête, ni, surtout, avec La République en Marche. Les députés élus siégeront dans un groupe indépendant. Une position commune… mais derrière laquelle pointe déjà la discorde.

Pour s’en convaincre, il suffit de s’en remettre aux doyens ! Depuis mardi, les anciens ministres de Nicolas Sarkozy écument les plateau pour tenter d’expliquer la position de leur parti. Alors, en apparence, tout va bien !  Brice Hortefeux sur franceinfo déclare ainsi: "Nous sommes tous unis autour d'un objectif commun, c'est celui d'être utile aux Français et à notre pays." "Je réfléchis comme d'autres, note pour sa part Jean-François Copé sur Public Sénat à savoir comment on peut être utiles aux Français pendant ce quinquennat." Même tonalité dans les propos de Nadine Morano sur LCI : "Ce sont des députés utiles, il faut être utile." Ils veulent être utiles aux français, alors, merci beaucoup, c’est très louable de leur part. Oui mais… qu’est-ce que cela veut dire "être utile" ? Réponse… rien ! Aucun responsable politique, jamais, nulle part, n’a revendiqué fièrement vouloir être inutile. C’est évidemment un mot totalement creux, un pur élément de langage, qui permet de maintenir l’illusion de l’unité, sans rien dire sur le fond.

 Des objectifs pas toujours identiques

En apparence, leur position est commune. Les Républicains ont pour objectif d’obtenir le plus de députés possible lors des élections législatives. Notez que, là aussi, le contraire serait étonnant… Et encore ! En filigrane, vous allez voir qu’on sent déjà poindre quelques discordances. "Notre ambition, c'est de créer un groupe parlementaire", indique Brice Hortefeux. "Plus on aura de députés LR qui seront élus, plus on sera en situation de peser", assure Jean-François Copé. "Il faut une majorité pour Les Républicains, poursuit Nadine Morano. [Il faut que] nous soyons le groupe majoritaire à l'Assemblée nationale, et là on aura un gouverment de droite." 

Il faut se mobiliser pour la bataille législative donc, mais à quelle fin ? Brice Hortefeux reste factuel : conserver un groupe parlementaire. Il n’est pas très explicite sur le rôle qu’il aurait dans la prochaine législature… Jean-François Copé, lui, mâche moins ses mots : avoir le plus de députés possibles pour "peser". Mais peser, comment ? Eh bien, de la seule manière possible si Emmanuel Macron obtient sa majorité, peser au sein d’une alliance de gouvernement. C’est très différent de ce que nous dit Nadine Morano. Elle souhaite obtenir une majorité pour, non pas peser, mais imposer un gouvernement de droite. C’est exactement la même rhétorique que celle de Jean-Luc Mélenchon… mais avec quatre fois moins de votes à la présidentielle. Preuve qu’elle ne se soucie aucunement du réalisme de son propos. Tout ce qu’elle souhaite, c’est indiquer qu’elle n’entend, en aucun cas, s’inscrire dans une stratégie d’alliance.

Un désaccord masqué 

Il y a bien une ligne de clivage au sein des Républicains et sans surprise elle se cristalise autour d'une pomme de discorde : Emmanuel Macron. "Je ne suis pas dans cette approche qui consiste à dire tout est nul dans ce qui est fait par Monsieur Macron même si on a des divergences majeures. On peut parfaitement apporter pendant deux, trois ans, un certain nombre de réformes, assure Jean-François Copé. "Je considère que son programme n'est pas bon pour la France, et je considère que son bilan est nul pour la France", déclare de son côté Nadine Morano. "Nous nous voulons être constructifs, nous ne voulons pas être destructifs", selon Brice Hortefeux. 

Pour l’une, tout ce qu’a fait Emmanuel Macron est nul. Pour les autres, il est possible au contraire d’être dans une attitude constructive, voire, de porter des réforme : voilà la ligne de clivage qui existe aujourd’hui au sein des Républicains. Un désaccord masqué derrière des éléments de langage, mais qui affleure très vite derrière le discours. Un désaccord caché sous le tapis d’ici les législatives, mais qui ne manquera pas de ressurgir dès celles-ci passées. Dans le texte adopté mardi soir, les Républicains affirment que leur mouvement ne serait pas fongible dans le macronisme, ni dans le lepénisme. Mais peut-il encore assurer sa pérennité sans fongibilité ? La question est désormais posée.   

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