Quand Céline ne voulait pas "goncourtiser"
Retour le 7 décembre 1932…Malheureusement pas d’archives de cette incroyable journée de remise du prix Goncourt. Mais bien des années plus tard en 1968, le vainqueur du célèbre prix littéraire se souvient...
J'étais en train de travailler. Il était, je crois, midi, j'étais en train d'écrire, quand je reçois un coup de téléphone: "Mazeline, vous avez le Goncourt". Je dois vous dire que je ne m'y attendais pas, ou je l'espérais sans l'espérer...
Son nom, vous ne connaissez probablement pas, Guy Mazeline, son roman, vous ne l’avez probablement pas lu, "Les Loups" …
Ce que ne raconte pas ici Mazeline c’est que l’ambiance est électrique chez Drouant où le jury s’est réuni comme il le fait depuis 1914. Le sanguin membre de l’Académie Goncourt Lucien Descaves a claqué la porte du restaurant outré parce ce qu’il considère être une trahison.
La veille on s’était mis d’accord pour accorder le prix à un jeune inconnu, Louis-Ferdinand Céline pour son singulier "Voyage au Bout de la Nuit ", et voici que le conformisme l’emportait. C’en est trop pour Descaves.
Pour François Nourissier, qui dirigera l’Académie Goncourt dans les années 1990, c’est le plus grand "scandale" de son histoire.
Et Céline ? Sa haine des élites et des manœuvres aura été renforcée par cette affaire de 1932. Au point d’en inventer un mot, un formidable néologisme, remarqué par le futur académicien Maurice Rheims dans son "Dictionnaire des mots sauvages" publié en 1969…
Céline détestait évidemment l'Académie Goncourt. Dans "Goncourtiser", il y à Goncourt et courtiser. Courtiser pour avoir le Goncourt.... "Goncourtiser" !
Un an après le ratage de 1932, l’Académie Goncourt retrouvera l’unanimité et le soutien de la presse en récompensant Malraux et "La Condition Humaine" .
Mais chaque année, en novembre, plane le souvenir de 1932, un souvenir en guise d’avertissement…
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