Que devient Assa Traoré, un an après la mort de son frère Adama, à Beaumont-sur-Oise ?
Assa Traoré est la sœur d'Adama, 24 ans, mort par asphyxie le 19 juillet 2016 à Beaumont-sur-Oise, lors de son interpellation.
19 juillet 2016, il y a un an exactement, Adama Traoré trouve la mort à Beaumont-sur-Oise, lors de son interpellation après une course-poursuite. Plaqué au sol par trois gendarmes, le jeune homme de 24 ans meurt par asphyxie. Dans les heures qui suivent, la famille d'Adama dénonce une bavure. Et Assa, la sœur de la victime, devient porte-parole de la famille. "Les gendarmes en témoignent eux-mêmes, ils ont dit qu'Adama a été écrasé par le corps de trois d'entre eux. Vous imaginez 240 kilos sur le corps d'un seul homme ? Les coupables, on peut les désigner très rapidement."
Après la mort d'Adama Traoré, des violences éclatent à Beaumont-sur-Oise et dans d'autres communes du Val d'Oise. En parallèle, plusieurs marches blanches sont organisées. Quelques semaines plus tard, comme l'a demandé la famille, l'enquête est dépaysée à Paris. Un an après la mort de son frère, Assa Traoré livre un combat pour la vérité, une lutte difficile et éreintante raconte la jeune femme. "On tient le coup, assure la jeune femme. On est obligé de tenir le coup, si on ne tient pas le coup, on craque. Plus l'acharnement va continuer, plus les répressions vont continuer, plus on aura plus de force. Et nos soutiens grandissent de jours en jours. Donc on est déterminés et c'est un combat qu'on a commencé et on n'est pas prêts de le lâcher tant qu'on n'aura pas eu ce qu'on veut."
Circonstances du décès
Un an après la mort de son frère, Assa Traoré explique: "Il n'est pas mort de cause cardiaque, il n'est pas mort d'infection très grave, il est mort asphyxié, il a pris le corps de trois militaires sur lui, aujourd'hui la vérité elle est là. Il faut que l'Etat, que les gendarmes prennent leurs responsabilités. Qu'ils assument ce qu'ils ont fait et qu'ils soient punis à la hauteur de leur crime." Assa Traoré explique que son combat pour la vérité est difficile. "Tout est compliqué, parce que quand on attaque les policiers, ce n'est pas que les policiers, c'est un système qu'il faut attaquer, c'est un système qui a été construit par l'Etat qu'il faut dénoncer. Pour nous, ils sont protégés et, en plus, même financièrement, tout est pris en charge pour eux. Ça c'est une protection énorme."
"Guerre contre la famille"
Dans le livre qu'elle consacre à l'histoire de son frère (Lettre à Adama, éditions du Seuil), Assa Traoré écrit : "C'est une guerre qu'on a déclarée à la famille Traoré". Elle explique : "Ce que la famille Traoré a subi en huit mois, c'est ce qu'on pourrait subir en plusieurs années. Pression, répression, humiliation, tabassage, emprisonnement... Ça veut dire quoi ça ? C'est de l'intimidation quand on reçoit des menaces de mort, quand on dit à mes frères : 'Dis à ta sœur d'arrêter de faire du bruit', quand on met mes frères en prison pour rien, quand on subit tout ça, quand il y a des contrôles à répétition sur les quartiers..."
Symbole de la lutte contre les violences policières
"Nous avons fait d'Adama un symbole, dit sa sœur. Le combat qu'on mène pour lui représente un mal-être de la France, de cette mauvaise France là. Nous avons une bonne France, mais nous avons aussi cette mauvaise France qui, aujourd'hui, nous attaque. Le combat d'Adama est un combat rassembleur, où tout le monde est là, tout le monde est à nos côtés. C'est un combat qu'on doit mener ensemble." Depuis la mort d'Adama, deux des frères de la famille sont en prison pour des faits de violences, mais pour autant, Assa Traoré estime que cela ne nuit pas à son combat. "C'est leur système. Ils criminalisent d'abord la victime, dès le premier jour, alors que c'est la victime. Les gendarmes deviennent la victime. Après on criminalise les membres de la famille, et c'est ce qu'ils essaient de faire. On pourrait même dire qu'ils seraient capables de fabriquer des preuves contre nous tellement ça va loin. Mais ça ne marche pas."
Ce premier anniversaire de la mort de son frère est difficile à vivre pour Assa et sa famille. "C'est très difficile de se dire que l'année dernière, au même moment, Adama était avec nous. C'est une date d'anniversaire où il aurait dû fêter son anniversaire, mais on ne doit pas fêter sa mort. Et donc ça nous donne encore plus de force pour se battre pour Adama parce qu'on lui doit ce combat. Il faut que le nom d'Adama continue à vivre à travers de belles actions, de beaux projets.
Au début du mois de juillet, une expertise a confirmé la mort par asphyxie du jeune homme mais sans en déterminer l'origine. Samedi, une marche aura lieu à Beaumont-sur-Oise pour commémorer le premier anniversaire de la mort d'Adama Traoré.
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