Premier anniversaire du podcast "Crime Story" : "Un fait divers dit toujours quelque chose de la société dans laquelle on vit", selon ses auteurs

"Le Parisien" explore d'anciennes affaires criminelles à travers ce contenu audio aux 350 000 écoutes mensuelles. "Il y a 20, 30 ans, c’était un peu honteux d’aimer les faits divers", selon le chef du service police-justice du quotiden. Désormais les amateurs d’affaires criminelles ont l’embarras du choix.
Article rédigé par Célyne Baÿt-Darcourt
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Clawdia Prolongeau (à gauche) et Damien Delseny (à droite) auteurs du podcast "Crime Story", le 14 décembre 2023. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

La journaliste Clawdia Prolongeau et le chef du service police-justice du Parisien, Damien Delseny, sont les voix de "Crime Story", un podcast du journal consacré aux faits divers et mis en ligne chaque samedi dans un format deux fois 15 minutes. Cela fait un an qu’ils reviennent sur d'anciennes affaires criminelles, oubliées pour certaines, ou complétées par une mise à jour et qu’ils réussissent à intéresser 346 000 paires d’oreilles chaque mois. Une belle audience dans le paysage audiovisuel qui ne manque pas d’émissions dédiées aux faits divers. 

franceinfo : Il y a je ne sais pas combien de contenus audiovisuels sur les faits divers entre les "Faites entrer l'accusé", "Hondelatte raconte", "L'heure du crime", "Chronique criminelle" et j'en passe. Pourquoi le Parisien s'est engouffré sur ce créneau ultra concurrentiel ? 

Clawdia Prolongeau : Le traitement des faits divers fait partie de l'ADN du Parisien depuis longtemps. Le Parisien s'était déjà positionné sur le marché du podcast avec un podcast d'actualité, "Code Source", et donc c'était assez logique au moment de créer un autre podcast thématique, de partir sur les faits divers. 

Damien Delseny, vous, qui travaillez et dirigez le service police Justice, vous n'arrivez pas à tout caser dans le journal ? 

Damien Delseny : Là, l'idée, c'était quand même de revenir sur des affaires un peu plus anciennes qu'on a traité parfois il y a 20 ans, 25 ans et sur lesquelles on a beaucoup d'archives. Ce qui est intéressant, c'est parfois de se replonger dedans et de découvrir des choses qu'on avait nous-mêmes oubliés... Alors, une affaire en chasse l'autre très souvent... Et de revenir, de redécouvrir, de relire des affaires, même si on n'invente rien, c’est intéressant.  

En quoi vous différenciez-vous des autres émissions ? 

"Je ne crois pas qu'on ait la prétention de réinventer l'histoire, mais le podcast ‘Crime Story’ permet une narration un tout petit peu différente."

Damien Delseny, chef du service police-justice du Parisien.

à franceinfo

Damien Delseny : On est souvent frustrés en presse écrite et aussi en presse radio de raconter des histoires de manière un peu courte. On a toujours envie d'écrire plus et de dire plus. Là, c'est vrai que ça nous offre quand même une liberté, un champ qui est plus important. 

Comment expliquez-vous que les Français se passionnent pour les affaires criminelles, pour les faits divers ? 

Damien Delseny : Quand j'ai démarré ce métier, je pense qu'il y avait déjà autant de gens qui étaient fans de faits divers mais qui ne le disaient pas, c'était un peu honteux. Et c'est ce qui a fondamentalement changé. Aujourd'hui, on assume de dire que oui, on est passionnés par les faits divers. Je pense qu'un fait divers qui fonctionne et qui marche bien, c'est un fait divers qui est concernant, quand chacun peut se retrouver dans une partie d'une histoire comme une disparition d'enfant, là ça parle beaucoup. Un fait divers qui est trop loin de notre univers quotidien, ça ne ça ne fonctionne pas. Ce qui fonctionne, c'est quand on peut se dire : "Tiens, ce qui est arrivé à cette personne, ça peut être ma sœur, ça peut être mon voisin" et dans ces cas-là, il y a une identification et c'est comme ça que le fait divers marche. 

Est-ce que les journalistes traitent différemment les faits divers par rapport à il y a dix ou 20 ans ? 

Clawdia Prolongeau : Oui, je pense. 

Damien Delseny : D'abord, on est aussi plus nombreux à le faire. J'ai connu une époque où on n'était pas si nombreux que ça et on était un peu les parias de la presse, et puis c'était surtout un petit monde. Au Parisien, on fait cela depuis des décennies, mais il y a plein de médias qui se sont positionnés sur ce vecteur-là et effectivement, ça crée sans doute une façon d'appréhender les choses un peu différente. 

Est-ce que les médias, à travers une histoire sordide, tentent de dire ce que ça révèle de notre société ? Maintenant dans les faits divers, il y a un côté sociétal qui n'existait peut-être pas il y a quelques années. 

Damien Delseny : Un fait divers dit toujours quelque chose de la société dans laquelle on vit. On a parlé beaucoup ces derniers temps d'ultra-violence sur un certain nombre de faits divers. Ça dit des choses comme ça. Je ne pense pas que ça ait fondamentalement changé, mais pour qu’un fait divers ne reste pas qu'un fait divers, à un moment donné, ça doit sortir de son champ et ça doit raconter quelque chose de l'époque dans laquelle on vit. C'est pour cela que ça s'est un tout petit peu démocratisé. 

Votre grand frère "Code Source", le podcast d'actualités du Parisien avec plus de 800 000 téléchargements, traite parfois des faits divers et son présentateur Jules Lavie, qui est aussi votre rédacteur en chef, nous disait que sept des dix meilleures audiences étaient sur des dossiers criminels. Du coup, marchez-vous sur ces plates-bandes ? 

Clawdia Prolongeau : Alors non, c'est très clair. Nous, on traite des affaires qui sont terminées et auxquelles on peut apporter une fin, alors que lui traite les affaires qui sont en cours. 

Sur quoi portera le prochain numéro de "Crime Story" samedi prochain ? 

Clawdia Prolongeau : Oui, ce sera sur l'affaire Yves Dandonneau qu'on appelle aussi le mort vivant. 

Damien Delseny : C'est une vieille affaire très connue et c'est vraiment un sujet de film. Et avec des personnages parce que ce que j'ai oublié de dire, c'est que le fait divers fonctionne aussi beaucoup grâce à des personnalités et des personnages. Quand il n'y a pas de personnages, il n'y a pas de faits divers.

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