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Romain Burrel, directeur de la rédaction de Têtu : "Nous revendiquons d’être un magazine communautaire"

Le magazine gay "Têtu" fera son retour dans les kiosques dans une version trimestrielle, après avoir été liquidé en avril 2018 et arrêté une première fois en 2015. Le magazine se relance après une levée de fond par un collectif d'entrepreneurs. Son directeur de la rédaction, Romain Burrel, évoque ce retour sur franceinfo.

Article rédigé par franceinfo, Célyne Baÿt-Darcourt
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Romain Burrel, le directeur de la rédaction du magazine "Têtu". (JEAN-CHRISTOPHE BOURDILLAT / RADIO FRANCE)

Têtu ne s'avoue pas encore vaincu. Avec 130 000 euros de dettes au mois de février, la précédente relance a été un échec. Malgré des difficultés chroniques à éponger ses pertes depuis sa création en 1995, les investisseurs veulent aller de l'avant. Mais peut-on, cette fois-ci, croire à la rennaissance du magazine ?

Le journaliste spécialisé dans les questions LGBT (Lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres) Romain Burrel, nommé directeur de la rédaction, se veut optimiste : "Nous y croyons, assure-t-il. Nous sommes bien entourés cette fois. Des investisseurs du milieu des médias et de YouTube veulent nous aider à trouver un modèle économique différent."

Réfléchir à de "nouveaux formats"

Ce nouveau modèle économique vise à renouveler le magazine, surtout dans un secteur de la presse écrite en perte de vitesse. Pour ce faire, les investisseurs qui ont opéré une levée de fond de 700 000 euros envisagent une "mue numérique", notamment à travers l'arrivée de la vidéo et de podcasts pour le site Internet : "L’idée est de faire un site innovant qui ne soit pas simplement de l’écrit. J’ai l’impression aujourd’hui qu'on ne consomme plus l'information de manière linéaire. On consomme beaucoup de podcasts. L’idée est de réfléchir à de nouveaux formats, de s’adresser à des publics plus jeunes, de leur parler directement." 

Le bimestriel mise également sur un site proposant une partie "freemium" (gratuite) et une partie payante réservée aux abonnés qui souhaitent lire du contenu à valeur journalistique ajoutée comme des reportages, des enquêtes.

Certains objecteront que les médias relaient déjà les revandications de la communauté gay : a-t-on encore besoin, en 2018, d'un magazine LGBT ? "Si vous m’aviez posé la question il y a cinq ans, peu après le mariage pour tous, je vous aurais peut-être répondu ‘avec les droits, plus tant que ça…’, répond Romain Burrel. Mais ce que je vois, c’est que cinq ans après, cela va beaucoup moins bien", constate-t-il. 

"Je pointe clairement du doigt la Manif pour tous"

Le directeur de la rédaction du magazine rappelle les chiffres du rapport 2018 de SOS homophobie, qui fait état d'une augmentation des agressions physiques de l’ordre de 15% sur les personnes LGBT a été relevée.

Romain Burrel regrette cette hostilité grandissante à l'égard des personnes LGBT : "La parole s’est libérée pendant les débats sur le mariage pour tous… Je pointe clairement du doigt la Manif pour tous. Aujourd’hui, on se fait bien plus agresser parce que l’on est homosexuel. Je vois passer, chaque semaine sur les réseaux sociaux des agressions très violentes vis-à-vis des personnes LGBT."

"Un magazine ouvert à tous"

Si Têtu se veut être l’étendard du combat contre l’homophobie, Romain Burrel entend réaffirmer la position du titre sur les sujets de la transphobie, ou encore de la PMA. "Il est possible d’aller plus loin, au-delà des questions d’éthique. Je considère Têtu comme un espace de parole positif où l'on peut parler entre personnes concernées, sans juger les autres. J'en ai déjà parlé dans des magazines généralistes, mais on perd du temps parce que l’on s’adresse à des personnes qui, parfois, ne sont pas concernées par ces choses-là."

Têtu, le magazine de la communauté LGBT, n’en reste pas moins à destination de tous les lecteurs, LGBT ou non : "J’adore le mot "communautaire". La communauté LGBT serait la seule communauté où l’on n’aurait pas le droit de parler de communauté, alors que tout le monde le fait aujourd’hui ? C’est un mot positif, et c’est un magazine qui a toujours été ouvert, poursuit-il. On a reçu énormément de personnes qui étaient des 'alliés', des personnes hétérosexuelles qui portent elles aussi le combat LGBT."

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