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À quoi joue Emmanuel Macron ?

Le ministre de l’Économie commence à exaspérer une bonne partie de son camp. Il est actuellement au Japon où il a vanté les réformes offensives lancées par son gouvernement pour renforcer la compétitivité de la France.
Article rédigé par Olivier Bost
Radio France
Publié Mis à jour
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Il a dit qu’il fallait encore accélérer ces réformes, réduire les dépenses publiques, lever les blocages. Si vous ajoutez à cela le fait qu’il ne se passe 15 jours sans qu’Emmanuel Macron répète qu’il faut assouplir les 35 heures et qu’il est régulièrement aidé par le ministre du Travail, François Rebsamen, sur ce même sujet. Eh bien, c’est à Paris, que cela commence à faire jaser et à sérieusement agacer.

 "Macron, il va falloir qu’il se calme ", m’a confié un ministre, il y a très peu de temps. Ce qui ne passe pas, ou plus, c’est que le ministre de l’Économie ne veuille passer son temps qu’à bousculer des dogmes de la gauche. Ce qui a vraiment énervé ces derniers temps, au-delà de ses attaques sur les 35 heures : c’est la libération du travail du dimanche, sans contrepartie. C'est-à-dire sans supplément de salaires dans les entreprises de moins de 20 salariés. C’est la dernière idée d’Emmanuel Macron pour la loi qu’il doit présenter dans deux semaines en conseil des ministres et qui sera en discussion au parlement en février.

Mais quel est le but du ministre de l’économie ?

Il y a deux motivations qui animent et qui guident Emmanuel Marcon. La première, c’est qu’il répond précisément à un cahier des charges. François Hollande et Manuel Valls l’ont placé à Bercy pour porter des réformes. C’est pour cela qu’il a été choisi et c’est pour ça qu’il a accepté ce poste. Il a donc repris la loi Montebourg sur les professions réglementées pour l’élargir à bien d’autres sujets. À défaut d’être populaire, c’est le raisonnement à l’Elysée. L’exécutif réforme pour laisser quelque chose du quinquennat.

La deuxième motivation d’Emmanuel Macron et du gouvernement est moins affichée. Il s’agit de donner des gages à Bruxelles. La France a encore obtenu un délai pour apporter les preuves que Paris fait beaucoup d’effort et ce délai va jusqu’à février ou mars. C'est-à-dire jusqu’à la discussion de la loi Macron. Cette loi "activité et croissance" est l’ultime chance de répondre aux injonctions de la commission européenne.

Mais est-ce que les députés socialistes suivront ? C’est toute la question.

Un ministre prévient : "Si vous mettez dans la loi Macron la chute de tous les tabous de la gauche,  C’est Macron qui va chuter à l’Assemblée ". "Il ne s’agit pas là seulement des célèbres râleurs… des députés frondeurs qui vont s’en prendre à Emmanuel Marcon ", prévient un député socialiste influent.

Il y a deux contextes à prendre en compte. Le premier, c’est que ces discussions vont arriver avant un scrutin très compliqué pour la gauche. Les députés cumulards n’ont pas envie d’avoir à s’expliquer sur le terrain quelques jours avant les élections cantonales. Des initiatives d’Emmanuel Macron pour lever les blocages, comme il dit.

Deuxième contexte : il s’agit d’une simple loi et non d’un budget. Les députés seront plus libres de voter pour ou contre car il n’y a pas de risque de faire tomber le gouvernement, juste d’affaiblir terriblement le jeune ministre de l’Économie, voire de le griller durablement. Pour arrondir les angles, préparer le terrain et se muscler sur le plan politique. 

Emmanuel Macron rencontre d’ailleurs régulièrement, sans l’afficher, des députés de la majorité. Il leur dit qu’il convient à Bercy. Car cela n’a échappé à personne. Le ministre de l’Économie n’a jamais été élu et n’a jamais été franchement confronté à l’arène de l’Assemblée nationale. Un conseiller de l’Elysée confie que tout cela n’a pas échappé à François Hollande.

"La loi Macron sera un moment difficile", on pourrait ajouter un de plus.

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