Édito
"Arc républicain" : le hold-up de Marine Le Pen et du RN

Premier grincement dans la mécanique précaire censée permettre au gouvernement d'éviter la censure : le nouveau ministre de l'Économie Antoine Armand a dû rétropédaler mardi face à Marine Le Pen qui lui reprochait d'avoir exclu de travailler avec le RN.
Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
La députée Marine Le Pen, leader du Rassemblement national, à son bureau à l'Assemblée nationale, le 17 septembre 2024. (LP/OLIVIER LEJEUNE / MAXPPP)

Michel Barnier a appelé, mardi 24 septembre, Marine Le Pen pour démentir les propos d’un des membres de son gouvernement. Le coupable, le ministre macroniste de l’Économie, Antoine Armand, avait osé exclure l’extrême droite de "l’arc républicain", ajoutant que c’est la raison pour laquelle il n’entendait pas consulter les députés RN. Patatras ! Ce n’est pas du tout la consigne du Premier ministre. Michel Barnier l’a vite rappelé à l’ordre. Il a même téléphoné à Marine Le Pen pour s’excuser platement. Et voilà donc la cheffe de file de l’extrême droite officiellement érigée en arbitre des élégances gouvernementales. 
 
Pourquoi un tel pataquès ? Parce qu’Antoine Armand a deux mois et demi de retard. Il en est resté au 7 juillet, la date du deuxième tour des législatives. À l’époque, le RN était infréquentable. Il se situait bien hors de "l’arc républicain". La preuve, dans les urnes, c’est le front républicain qui avait repoussé le danger de l’extrême droite. Sauf que déjà, LR en avait tiré profit sans appeler au front républicain. Quelque 80 jours plus tard, pas question de donner un prétexte aux députés RN de voter la motion de censure que va déposer la gauche. D’où les ronds de jambe du Premier ministre. Quand aux macronistes, les voilà écartelés entre la cohérence politique d’un côté et la solidarité gouvernementale de l’autre.

Lundi, sur France 5, la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a clairement choisi la première contre la seconde. Elle soutiendra, par exemple, la position du groupe Ensemble à l’Assemblée s’il s’oppose à un texte sur l’immigration porté par son collègue ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau. Un pied dedans, un pied dehors, ce "en même temps" là pourrait bien engloutir les macronistes. Quant à Michel Barnier, qui prétend consulter Marine Le Pen au nom du "respect dû à ses électeurs", il tombe à pieds joints dans le piège du RN.

La stratégie de la victimisation 

Quand le RN ou la gauche attaquent, et souvent très durement, Emmanuel Macron, personne ne les accuse d’insulter les électeurs du chef de l’État. Marine Le Pen, elle, se victimise au point de réussir un sacré hold-up. L’attaquer, critiquer son projet ou les dirigeants de son parti, ce serait mépriser les gens qui votent pour elle. Et hop, comme dans Koh-Lanta, la voilà qui brandit son totem d’immunité. Intouchable ! Marine Le Pen serait même devenue incontournable. Dans l’opposition certes, mais consultée à tout bout de champ. Indispensable pour assurer un certain temps la survie du gouvernement, jusqu’au moment où elle décidera de baisser le pouce. 

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