Édito
Discours de politique générale :"L'alliance de la droite républicaine et de la gauche réaliste" prônée par François Bayrou est-elle encore possible ?

Pour éviter la censure, le Premier ministre doit arriver à rassembler les bonnes volontés du centre, de la droite et de la gauche. S'il est convaincu du bien fondé de cette stratégie, passer des paroles aux actes, dans le contexte actuel, semble périlleux.
Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
François Bayrou s'exprime lors d'une séance de questions au Premier ministre à l'Assemblée nationale, le 26 novembre 2024. (ALEXIS SCIARD / MAXPPP)

Jour J pour François Bayrou. Il prononce, mardi 14 janvier à 15 heures à l’Assemblée son discours de politique générale. Un exercice à hauts risques puisque le Premier ministre doit se ménager les bonnes grâces de la droite et de la gauche hors LFI pour échapper à la censure sans dépendre du RN. 

Trente ans qu’il en rêvait. Trente ans que de livres en meetings, François Bayrou prône le rassemblement des bonnes volontés du centre, de la droite et de la gauche. Voici enfin le temps des travaux pratiques avec ce discours de politique générale qu’il peaufine, seul, depuis des jours. Pour en arriver là, François Bayrou l’obstiné a brûlé ses vaisseaux, traversé des déserts, surmonté bien des humiliations. Résisté aux pressions de Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy qui voulaient l’empêcher de débarrasser le centre de la tutelle de la droite.

Depuis 30 ans, il plaide sans relâche pour "l’alliance de la droite républicaine et de la gauche réaliste" afin, répète-t-il, de "faire émerger le bloc central de la société française". Enfin aux manettes, à Matignon, François Bayrou peut passer du discours aux actes, mais c’est sans grand espoir…
 
La gauche l’accuse de ne rien lâcher quand la droite lui reproche déjà de trop céder à la gauche. En particulier sur les retraites, ce dossier emblématique des fractures françaises, sociales et politiques. Le vieillissement de la population, l’ampleur des déficits publics, le niveau des pensions, ces contraintes qui s’imposent à tous les partis devraient les conduire à faire preuve de pragmatisme. Depuis des années, plus encore depuis 2022, il se produit l’inverse. Et quand bien même François Bayrou échapperait cette semaine à la censure, ce qui n’est pas acquis, il ne s’offrirait qu’un répit de quelques mois.

Le débat en ruines à l'Assemblée nationale

Un compromis solide et durable au centre, ce n’est pas imaginable parce que c’est sans doute trop tard. Ce n’est plus d’époque. De moins en moins. Depuis 2022, et plus encore depuis les législatives de juillet dernier, les colères conjuguées des insoumis et du RN transforment l’Assemblée en chaudron. On n’écoute plus l’adversaire, on le disqualifie, on s’invective, comme on le verra encore aujourd’hui. Les réseaux sociaux submergent l’hémicycle, le débat public vire à l’hystérie, et sur ce champ de ruines, la plupart des ténors ne pensent plus qu’à leur petit ego de présidentiable auto-proclamé en vue de 2027. Il y a 35 ans, un trio d’intellectuels prestigieux - Jacques Julliard, Pierre Rosanvallon et François Furet - prophétisait l’avènement de "la République du centre". Elle cède peu à peu la place à la République des extrêmes…

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