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Édito
Mercosur : pourquoi tous les politiques caressent les agriculteurs dans le sens de la colère ?
Un débat consacré au Mercosur suivi d’un vote aura lieu à l’Assemblée nationale mardi 26 novembre. Enfin un vote qui dégagera une majorité claire, c’est rarissime dans cet hémicycle, et même une probable unanimité car tous les groupes, du NFP au RN, du bloc central macroniste à la droite affichent leur hostilité à cet accord commercial négocié entre l’Union européenne et cinq pays d’Amérique latine. Tous, même Emmanuel Macron et Michel Barnier, qui répètent tous les deux qu’il est hors de question que la France signe ce traité en l’état. Voilà pourquoi le gouvernement a proposé l’organisation de ce débat, histoire de bâtir une sorte d’union nationale pour conforter la position d’une France isolée en Europe.
Cette unité se construit autour de la cause paysanne ce qui est très souvent le cas. Lorsqu’ils se mettent en mouvement, les agriculteurs sont la seule corporation à jouir d’un tel soutien, dans l’opinion comme chez les politiques. Les grèves des cheminots, des pilotes de ligne ou des enseignants divisent ; le fonctionnaire exagère, le paysan, lui, ne ment pas. Ses revendications sont jugées légitimes et sa mobilisation applaudie de toutes parts, y compris par le pouvoir en place qu’elle bouscule. Même les accès de violence sont pardonnés, le lisier déversé devant les préfectures, l'accueil violent réservé à Emmanuel Macron au salon de l'Agriculture en février ou, jadis, le saccage du bureau de la ministre de l'Environnement Dominique Voynet, semblent faire partie d’un folklore toléré. Cette mansuétude peut surprendre au regard du faible poids démographique de cette corporation, il n’y a plus que 380 000 exploitations. Les retraités peuvent faire basculer une élection, pas les paysans.
Le mythe d'un monde disparu
Tant de bienveillance s'explique par l'histoire d'abord. Celle de "ces paysans qui ont fait la France", une France rurale vantée par de nombreux auteurs, de Balzac à George Sand en passant par les historiens Marc Bloch ou Leroy-Ladurie. Il y a aussi, le mythe de la Terre nourricière et de ces paysans qui ont nourri les Français au moment de la reconstruction après-guerre. Au-delà de cette reconnaissance légitime, le souci du traitement de faveur accordé aux paysans, c’est qu’il les entretient dans l’illusion d’un monde disparu. Un monde sans concurrence internationale, où l’enfer a pour nom Bruxelles, l’Europe est forcément néfaste, et les accords commerciaux toujours nuisibles. Hier, le Ceta conclu avec le Canada fut diabolisé sans nuance. Aujourd’hui, c’est au tour du Mercosur d’être démonisé à son tour sur tous les bancs de l’Assemblée. Les élus cèdent volontiers à ce genre de facilités démagogiques pour caresser les paysans dans le sens de la colère. Sans jamais réussir à enrayer le déclin d'une profession en voie de disparition.
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