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Édito
Violences urbaines : pourquoi Marine Le Pen reste-t-elle si silencieuse ?
Politiquement, ce qui frappe dans cette crise après la mort de Nahel, 17 ans, tué à Nanterre, c’est la discrétion, une fois de plus, de Marine Le Pen. Mardi 27 juin, juste après la mort du jeune conducteur, la cheffe de file du RN avait attendu 24h pour réagir. Elle l’a fait en deux temps, et sobrement : d’abord, pour s’étonner des propos d’Emmanuel Macron qui avait qualifié les faits d'"inexcusables".
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"C'est à la justice de répondre", expliquait alors Marine Le Pen, drapée dans ses habits d’opposante responsable. Et, ensuite, pour réclamer dans une courte vidéo que les groupes politiques soient reçus par le président. L’époque des propos outranciers et des appels permanents à la démission semble bien révolue.
Et Marine Le Pen passerait presque pour pondérée quand ses adversaires, Eric Zemmour et les Insoumis se déchaînent en vain pour essayer de récupérer les événements. Or, ce silence s'explique : Marine Le Pen soigne sa posture présidentielle. L'enjeu est désormais d’adoucir son image, et de se recentrer pour élargir son spectre - elle a longtemps fait peur.
Parler ou le risque du faux pas
Et puis, pourquoi s’exprimer : les faits parlent pour elle, se dit-elle. Cette crise est un condensé de ses sujets de prédilection : insécurité, ensauvagement. Mais il y a aussi le fait que ce n’est pas facile de critiquer un président qui a plutôt bien géré les émeutes. Alors, la députée RN laisse les mots, souvent radicaux, à son fidèle Jordan Bardella. Et elle laisse les erreurs aux autres. Marine Le Pen se tait, car parler, ça serait prendre le risque de commettre un faux pas.
Et l’exécutif redoute justement qu’elle n’ait plus besoin de parler pour convaincre les Français. La crainte au sommet de l’Etat, c’est, qu’au final, ce soit Le Pen qui gagne. Un sondage Elabe révélé le 4 juillet montre ainsi, qu’aujourd’hui, c’est Marine Le Pen qui se détache, et pas les Insoumis malgré leur activisme. Et ce n’est pas seulement parce qu’elle ne joue pas de fausse note. Il y a d’autres signes qui inquiètent la majorité : une société qui se radicalise, des Français à bout face aux violences, prêts à se faire justice eux-mêmes, réclamant des mesures radicales... La cagnotte pour le policier mis en examen en dit long avec ces quelque 1,5 million d’euros récoltés en quelques jours.
Et l'exécutif est comme pris en étau. Difficile de rester dans une réponse purement sécuritaire, de se contenter de menacer de punir financièrement les parents, mais délicat, aussi, de répondre en milliards d'euros pour un plan destiné aux banlieues. La macronie est tiraillée, et celle qui en profite, mais en silence, c’est bien Marine Le Pen.
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