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Le retour des couacs au gouvernement

Un article dans la loi Macron qui attaque la loi Evin a réveillé les cafouillages dans le gouvernement. Quand des ministres ne sont pas d’accord entre eux et que le Premier ministre a d’autres soucis, la situation rappelle d’autres époques, celle des couacs.
Article rédigé par Olivier Bost
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
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Dans une loi, la loi Macron, qui ratisse déjà très très large, 115 articles qui vont du travail du dimanche en passant par les prud’hommes, les transports en car, les professions réglementées, l’accès au permis de conduire, les sénateurs puis les députés jeudi soir sont venus ajouter un article qui n’a l’air de rien. Un petit article qui ouvre une brèche dans la loi Evin et qui va, selon ses détracteurs, autoriser les publicités pour l’alcool de manière beaucoup plus large qu’aujourd’hui. 

Un article au milieu de la nuit

La nuit dernière aux alentours d’une heure et demie du matin l’article tant critiqué est devant les députés réunis en commission, et là, le ministre Emmanuel Macron leur demande de voter contre, mais il n’a pas pu lutter. L’article est adopté. Dans son entourage, on explique que le ministre de l’Economie subit un sujet qui n’a rien à voir avec sa loi. Le ministre défend, malgré lui, une position dont il n’est pas un acteur. Tout cela concerne l’agriculture, le tourisme et la surtout la santé. La ministre de la Santé, Marisol Touraine, n’a pas caché sa colère et a parlé d’"un coup dur porté à la santé publique ". Un vraie colère d’autant qu’elle pense avoir sur ce sujet le soutien plein et entier de Manuel Valls et de François Hollande. 

La naissance d’un couac

Il y eu des alertes et des petits arrangements. Claude Evin, le père de la loi, s’en était inquiété en début de semaine, on allait attaquer sa loi. Lundi, Emmanuel Macron avait expliqué pour rassurer qu’il attendait un arbitrage. Mais soit l’arbitrage n’est pas venu, soit il y a eu des doubles jeux à la tête de l’Etat, explique-t-on, dans certains ministères. Ou alors, autre hypothèse, les soucis d’aller-retour à Berlin pour un match de foot ont fait cafouiller les prises de décisions à Matignon.

En tout cas, le résultat, c’est qu’Emmanuel Macron n’a pas pu contrer les députés. Dans le gouvernement, ça n’agace pas que chez Marisol Touraine, le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll l’a soutient. Un autre ministre nous a confié que tout cela était très malvenu, c’est selon lui le résultat d’un travail de fond du lobby viticole, un lobby instrumentalisé par des lobbys publicitaires. 

Le gouvernement est-il vraiment au clair sur cette question ?

Le patron des députés socialistes, Bruno Leroux, n’est pas opposé à l’article mais veut que les députés en débattent de nouveau, dans un autre cadre que celui de la loi Macron. Et pour ne rien arranger et ajouter à ces tiraillements, une autre force dans le gouvernement aide le lobby de l’alcool. Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères, est aussi chargé du tourisme. Donc entre toutes ces positions, il y a bien du cafouillage, ce qu’à une autre époque on aurait appelé un couac.

 

Comment ça va se finir ? François Hollande va inaugurer dimanche le salon Vinexpo à Bordeaux. Devant la vitrine mondiale du vin, le chef de l’Etat sera forcément interrogé sur le sujet, même l’endroit n’est pas le plus simple pour s’exprimer clairement. Ensuite, la loi Macron n’a pas fini ses allers-retours entre l’Assemblée et le Sénat. Et à la fin, il reste le 49-3 pour tout bloquer. Ce ne sont pas les attaques contre la loi Evin qui justifieront le recours au 49-3, au passage en force, mais ça pourrait être très pratique. Très pratique pour mettre fin à ce qu’il faut bien appeler un couac.

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