Le "Schindler italien" était un collaborateur nazi
Les Italiens connaissent
bien Palatucci.
Des rues portent le nom de ce policier, qui est mort au camp de
Dachau en 1945. Depuis 1990, à Jérusalem, le Mémorial de Yad Vashem considère
Giovanni Palatucci comme un "Juste parmi les nations". Le pape
Jean-Paul II l'a même déclaré "martyr", une étape vers la
béatification. L'ancien fonctionnaire a plusieurs surnoms : "l'ange
protecteur des juifs", "le saint-sauveur de Fiume" et surtout
"le Schindler italien", parce qu'il est parfois comparé à Oskar
Schindler, cet industriel allemand qui a sauvé des centaines de juifs pendant
la guerre.
Depuis longtemps, la
réputation de Palatucci repose sur un chiffre : 5.000. Le nombre de Juifs à qui
il aurait évité la mort, en les prévenant avant les rafles, en fabriquant des
faux papiers, ou en les envoyant dans une autre ville pour qu'ils soient
protégés par son oncle qui était évêque. Pour tout le monde, le policier était
l'incarnation d'une Italie resistante.
Pas pour tout le monde, en
fait.
Depuis quelques années, des historiens ont des doutes. Ils cherchent des
preuves des actions menées par Giovanni Palatucci. Une équipe de spécialistes a
voulu en avoir le coeur net. Elle vient d'éplucher 700 documents qui dormaient
dans les archives de Rijeka, en Croatie. Pendant la guerre, Rijeka était
italienne. Elle s'appelait Fiume. C'était la ville où travaillait Palatucci.
Cette équipe de chercheurs a parcouru les archives dans tous les sens. Sa
conclusion est formelle : Giovanni Palatucci n'était pas un héros. Il était
même le contraire : "un exécuteur consentant des lois raciales, qui, après
avoir prêté serment à la République sociale mussolinienne, a collaboré avec les
nazis".
Vous lirez les détails dans
Le Figaro ce matin, dans l'article de Thierry Portes. Si le policier a été déporté, ce
n'est pas pour son soutien aux Juifs persécutés, mais parce que les Nazis lui
reprochaient de traiter avec les Britanniques. Dès les années 1950, l'oncle de
Palatucci, devenu archevêque, a commencé à bâtir la légende de son neveu. Il
s'est donné lui-même un beau rôle, en affirmant avoir participé au sauvetage
des Juifs. Chacun y a trouvé son compte, à commencer par l'Eglise, accusée de
complicité avec le fascisme et avec le nazisme. Une figure bien pratique aussi
pour l'administration italienne, rangée derrière Mussolini. En quelques années,
après la guerre, le policier déporté est devenu un héros.
La légende disparaît. Est-ce
une mauvaise nouvelle ?
Pas forcément. En travaillant dans les archives, les
historiens découvrent aussi de vrais héros, des hommes et des femmes qui, au
jour le jour, ont sauvé l'honneur de l'Italie, pendant la guerre.
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