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Cédric Van Styvendael (Housing Europe) : "Le ministre du budget veut faire les poches du mouvement HLM"

Cédric Van Styvendael, président de Housing Europe, la fédération européenne du logement social, a dénoncé mardi "le coup de sabot" administré aux allocations logement par le gouvernement.

Article rédigé par franceinfo, Jean Leymarie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Cédric Van Styvendael, président de Housing Europe. (RADIO FRANCE)

Alors que le gouvernement doit dévoiler son plan logement mercredi 20 septembre, Cédric Van Styvendael, président de Housing Europe, la fédération européenne du logement social, a prévenu sur franceinfo que les organismes de HLM ne sont "pas prêts à se faire faire les poches par le ministre du Budget". 

Bercy leur demande de réduire leur loyer pour compenser la baisse des APL. "1,5 ou 2 milliards d'euros, c'est colossal (...) Ces sommes considérables vont nous empêcher de faire correctement notre travail", a ajouté Cédric Van Styvendael.

Mercredi 20 septembre, le gouvernement va dévoiler son plan pour le logement, et on sait qu'il veut vous forcer à baisser les loyers pour permettre à l'Etat de compenser la baisse des APL. Allez-vous le faire ?

Cédric Van Styvendael : Pour l'instant on parle de diminuer les APL, pas de diminuer les loyers. Cela supposerait une loi. J'attends de voir comment le gouvernement va proposer cela. Pour l'instant on nous dit qu'il va falloir faire des "remises sur quittance". Si on pouvait baisser les loyers, je suis certain qu'il s'attaquerait aux loyers du privé. Or, c'est extrêmement difficile et il se tourne vers le logement social. 

C'est un jeu de dupes pour les locataires, puisque cela ne va avoir aucun impact sur leur vie quotidienne, leur pouvoir d'achat. Mais ce sera un très bon exercice budgétaire pour le gouvernement actuel, et c'est ce qui nous paraît inquiétant.

Cédric Van Styvendael, président de Housing Europe

à franceinfo

Il faut être ministre du Budget mais aussi ministre des Français, y compris les plus fragiles. Nous, on a à perdre une somme de l'ordre de 1,5 ou 2 milliards d'euros. C'est colossal. On nous annonce à l'été moins cinq euros sur les APL, un coup de rabot. Là on est passés à 50 ou 60 euros, ce n'est plus un coup de rabot, c'est un coup de sabot pour le monde du logement social. Et cette perte se retrouvera dans nos exercices budgétaires chaque année. Ces sommes considérables vont nous empêcher de faire correctement notre travail.

Qu'est-ce que cela menace directement ?

Cela menace directement notre capacité à réinvestir les résultats de notre exploitation annuelle, la différence entre les loyers et ce que l'on dépense. Cette différence aujourd'hui ne rémunère pas l'actionnaire ! Elle est réinvestie dans la production ou l'entretien du patrimoine. Aujourd'hui on parle de supprimer 80% de cette capacité d'investissement. C'est colossal. On y va très brutalement sans avoir de mesure en face qui vienne compenser.

Mais l'État dit que vous pourrez emprunter plus facilement pour continuer à développer vos programmes, que c'est peut-être l'occasion de vendre davantage de vendre des logements HLM à leurs occupants... Veut-il vous stimuler ?

C'est un gouvernement qui se prétend jeune et qui ressasse de vieilles idées. On a fait cela il y a 30 ans au Royaume-Uni avec Margaret Thatcher. On permet à tous les locataires d'acheter, on diminue en 15 ans le stock de logements sociaux de  75%. Dans le même temps on diminue les subventions au monde du logement social en matière de production. Donc : fragilisation des opérateurs, report de la production uniquement sur un tissu associatif fragile... Que se passe-t-il ? En 2010, 33 000 logements construits en Angleterre, et cette année, 960.

Le gouvernement est convaincu que vous avez les moyens de faire un effort. Combien avez-vous dans vos caisses ?

On a une espèce de mythe sur la trésorerie du monde du logement social. Elle est estimée aux alentours de cinq à sept mois de fonctionnement. Ce n'est pas simplement notre argent, c'est aussi celui des locataires, et l'ensemble des dépôts de garantie. On peut sembler comme étant un secteur sur lequel il y a des possibilités d'optimisation financière. On est prêts à les discuter, on n'est pas prêts à se faire faire les poches par le ministre du Budget. Cet argent, c'est aussi celui des locataires. Nous, on interpelle les pouvoirs publics en disant : "Est-ce qu'on peut se remettre tous autour de la table ?". Bercy, mais aussi le ministre de la Cohésion des territoires. Parce que dans cinq ans, quand il faudra faire le bilan, et qu'on n'aura plus produits de logements sociaux, qu'on n'aura pas réhabilité, qu'on n'aura pas répondu au défi de la consommation énergétique, ce sera l'ensemble des ministres qui seront responsables, et pas uniquement celui du Budget.

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