Bernard Cazeneuve : "l'interdiction de sortie de territoire pour les majeurs n'est pas arbitraire"
Le projet de loi contre le terrorisme
"Nous sommes face à une menace d'une autre nature. " Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, invité de France Info ce mercredi, justifie le projet de loi contre le terrorisme qu'il s'apprête à présenter en Conseil des ministres par une nouvelle forme de terrorisme, plus insidieuse, car elle vient chercher des jeunes français pour les "retourner" :
"Tous ces jeunes qui partent, qui ont fréquenté une violence épouvantable, avec des tortures, des décapitations, des crucifixions, des meurtres en nombres, et qui reviennent détruits par cette fréquentation de la violence barbare représentent une menace pour notre pays. Ils sont préparés à commettre des actes d'une extrême violence. Il faut donc nous protéger. "
Mais il ne veut pas que ce projet de loi soit interprété comme un texte ciblant les musulmans :
"Cette histoire n'a rien à voir avec l'islam. Ceux qui partent, partent parce qu'ils ont rencontré la violence, pour beaucoup d'entre eux dès leur adolescence dans des opérations de petite délinquance. Puis en prison, ils ont été radicalisés mais ils ne savent rien de la religion musulmane. Ils ne savent pas que ce qu'on leur dit n'est rien d'autre qu'un dévoiement d'une religion de paix et d'apaisement. "
Le projet de loi comprend une mesure phare : l'interdiction de sortie du territoire pour les majeurs convaincus de vouloir se rendre en Syrie notamment ou dans tout autre pays touché par le djihad. Une nouvelle sorte de "lettre de cachet" qui porterait atteinte à la présomption d'innocence ? Il y aura des garanties, répond Bernard Cazeneuve :
"Ce n'est pas quelque-chose de discrétionnaire et d'arbitraire, il faut qu'il y ait un faisceau d'éléments qui montrent qu'une personne est déterminée à se rendre sur un théâtre d'opération djihadiste. La personne est immédiatement inscrite au fichier Schengen et au fichier des personnes recherchées. "
Autre disposition qui pose question au regard des libertés fondamentales, la nouvelle incrimination pénale permettant à la Justice d'atteindre les "loups solitaires", ceux qui s'embrigadent via des sites internet et les réseaux sociaux. Le ministre de l'Intérieur plaide avoir voulu compléter l'arsenal à la disposition des juges, l'incrimination d'association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste n'étant pas suffisante. Mais limiter l'accès à internet, outre les questions éthiques, pose des problèmes techniques. Pour cela, le ministre en appelle à la coopération de tous :
"Il faut bien mesurer ce qui se passe sur internet. Nous avons des groupes qui s'organisent à travers la diffusion de vidéos, de photos, de l'utilisation des réseaux sociaux que ces groupes pénètrent pour recruter. Il faut que les fournisseurs d'accès soient sensibilisés à cette question. Moi je souhaite que nous bloquions ce sites dont nous savons qu'ils sont des sites d'incitation à la haine, à l'antisémitisme et d'incitation au terrorisme. Il faut le faire au plan européen et international ."
Et Bernard Cazeneuve annonce des consultations d'ici l'automne avec les acteurs du web et les autres pays européens, ainsi que les Etats-Unis.
La réforme territoriale
C'est l'autre grand dossier sur le bureau de Bernard Cazeneuve. Il plaide avoir présenté une carte au Sénat qui "n'a pas voulu s'en saisir ". Mais il reste persuadé qu'une majorité se dégagera à l'Assemblée nationale pour voter la réforme, sans exclure des amendements.
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