La vie de Nelly (6/6) : Chez Nelly
Nous arrivons bientôt au bout de l'histoire de Nelly. Je tenais à conclure le récit de sa vie chez elle. Dans sa résidence pour séniors à Saint-Denis. Sans surprise, tout le monde aime Nelly. Son voisin de palier : "Celui qui ne la connaît pas, il rate quelque chose !" Pendant ce temps, Nelly fredonne L'idole des jeunes.
Elle me tire par le bras, elle veut que je parle avec Férial, la secrétaire de la résidence. Férial s'inquiète. Avec l'inflation, elle voit que les résidents ont de plus en plus de mal à boucler les fins de mois. Terminés les loisirs, les petits plaisirs : "Quand ils mangent, c'est bien…" Elle ne comprend pas que les personnes âgées soient rendues "invisibles" dans la France d'aujourd'hui comme "s'il y avait une date de péremption". Nelly se marre et hausse le ton : "C'est pour ça qu'il faut gueuler !"
Ça y est, nous sommes dans l'appartement de Nelly, qui se fait un plaisir de me montrer tous ses "objets Johnny". Je demande des nouvelles du verre à brosse à dents à l'effigie du rocker, dont elle était si fière. "Cassé." Ma déception est immense. Nelly : "Ça faisait longtemps que je n'avais pas pleuré comme ça pour un verre."
Les photos jaunies d'une mère célibataire
Mais chez Nelly, il n'y a pas que des photos de Johnny. Il y a aussi des photos jaunies. Elle nous présente sa famille, ses parents, l'occasion de nous rappeler que Nelly est une fille du Nord, issue du milieu ouvrier. Il y a une autre photo, où on voit un homme barbu.
"Le barbu, c’est le papa de mon fils, le papa toujours jamais là."
Nellyà franceinfo
Nelly veut bien qu'on en parle. Un père absent, inconstant, fidèle au bar du coin mais moins fidèle avec sa famille. Elle raconte sa vie, à dormir sous les toits, au-dessus d'un café. Sans salle de bains, à se laver "à l'ancienne", au lavabo. Ça dure neuf ans. Le petit grandit. Elle craque, quitte cet homme. Il disparaît pendant dix ans. Nelly mère célibataire, qui enchaîne les petits boulots mais qui ne se plaint pas. Elle a pris sa vie en main. Pour Johnny, elle a toujours des larmes. Pour le père de son fils, aucune. Il a fallu "s'endurcir", pour préserver son fils : "Il n'avait pas à subir." Heureusement Johnny est là. Son "défouloir", "son sac de frappes comme à la boxe", pour évacuer les mauvaises ondes.
Nelly ne regrette rien, "j'en parlerai au diable", pour reprendre le titre d'une chanson de son chanteur préféré. Si elle avait une question à poser au diable : "Il est là Johnny ?" Et encore une fois, elle se marre. Ma dernière question : "S'il y avait une chanson pour résumer votre vie ?" Sans hésitation : "Les coups ! Quand ils vous arrivent oh oui ! Ça fait mal." Elle ajoute : "Mais on s'en sort toujours." Nelly me claque une bise, me lance un dernier "rock'n'rollllll", et laisse chanter Johnny.
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