"L'appareil d'État est délabré" : la réforme de l'État, mère des réformes ?
Le gouvernement rend public ce mercredi son "baromètre de l’action publique", un tableau pour connaître l’état d’avancement de chaque réforme. En privé, des ministres, désabusés, évoquent eux une "force d’impuissance".
En échangeant avec certains ministres, il faut résister à l’envie de se pincer pour vérifier que ce que l’on entend est bien réel. "Vous appuyez sur des boutons, mais il ne se passe rien derrière", décrit l’un d’eux. Un autre : "C'est comme si on avait un tableau de bord, mais que les fils étaient déconnectés." "Et c'est pareil à l'Elysée", confesse même un ancien du Palais.
"L’appareil d'État est délabré", constate un membre du gouvernement, qui raconte avoir dû batailler un an contre son administration pour valider une nomination qui est normalement du seul ressort du politique. Trois ministères échappent à cette grille de lecture : l’Intérieur, l’Armée et Bercy, le super ministère de l’Economie.
"Un État dans l'État"
À l’inverse, le bonnet d’âne est décerné à la Santé, perçue au cœur du pouvoir comme "un Etat dans l'Etat". Un ministre raconte comment le président "a dû botter le train des agences régionales de santé et des directeurs d’Ehpad qui, sur la vaccination, disaient ne rien pouvoir enclencher avant le 11 janvier". "Olivier Véran est le jouet de son administration", tranche dans Le Point l’un des détracteurs du ministre de la Santé. La charge est sévère…
Dans l’immédiat, l’exécutif essaye plutôt de calmer le jeu avec l'administration. Emmanuel Macron ce mardi en déplacement dans l'Eure a glissé à des journalistes que "l'administration a été au rendez-vous", en prenant l’exemple des commerces accompagnés par l'État. Bercy, l'un de ces ministères qui fonctionnent bien donc.
Agilité et bureaucratie
Olivier Véran, à l’Assemblée Nationale, a lui rendu hommage aux agences régionales de santé et aux préfets, qui dixit un élu local "en prennent plein la gueule alors qu’ils ne sont associés à rien". En privé, des ministres poussent à relancer la réforme de l'État souhaitée par le candidat Macron.
"L’agilité promise par le président est nécessaire, cette crise en est la preuve", fait valoir un dirigeant. Le hic, c’est qu’à trois reprises au moins, le chef de l’Etat a promis de s’attaquer à "l'excès de bureaucratie" : après les "Gilets jaunes", après le premier confinement et encore à l’automne dernier. En vain.
Un thème de campagne ?
"Le premier qui arrive à 'détechnocratiser', je lui tire mon chapeau", ironise même un directeur de cabinet ministériel. "Pour ce quinquennat, c’est mort, analyse un président de région, mais Macron peut rebondir là-dessus lors de la campagne présidentielle."
À droite on y croit peu car, me dit-on, "Macron est l’incarnation même de cet État. Un énarque entouré d’énarques". Référence au Premier ministre Jean Castex, à son directeur de cabinet Nicolas Revel, et au secrétaire général de l’Elysée Alexis Kohler. Tous issus de l’Ecole Nationale d'Administration.
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