Le Ceta, l'accord de libre-échange avec le Canada, est dans le collimateur des sénateurs

La colère des agriculteurs a mis sur le devant de la scène la question des traités de libre-échange. Le Ceta, l'accord commercial entre l'Union européenne et le Canada, va donner lieu à une bataille entre les sénateurs et le gouvernement le jeudi 21 mars
Article rédigé par Aurélie Herbemont
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Députés européens de droite opposés au Comprehensive Economic Trade Agreement (Ceta), lors d'un vote au Parlement européen à Strasbourg, le 15 février 2017. (PATRICK SEEGER / MAXPPP)

Le Comprehensive Economic and Trade Agreement (Ceta), l'accord commercial entre l'Union européenne et le Canada, s'applique en France "de façon provisoire" depuis six ans. Et pourtant, le Sénat ne l'a jamais ratifié, contrairement à l'Assemblée nationale qui l'a voté en 2019. Un "problème démocratique" selon les sénateurs communistes, qui ont donc mis le Ceta à l'agenda du palais du Luxembourg jeudi 21 mars prochain. Une manière pour les amis de Fabien Roussel de surfer sur la colère des agriculteurs, tout en réaffirmant leur opposition aux traités de libre-échange en pleine campagne pour les élections européennes. L'objectif des communistes est clairement de faire rejeter le Ceta.    

Communistes, socialistes et écologistes feront front commun au Sénat, et ils trouveront du renfort chez LR, car il y a des sénateurs de droite tout aussi décidés à faire capoter le Ceta. "On ne veut plus importer ce qu'il est interdit de produire en France, et les Canadiens utilisent des pesticides interdits chez nous", argue l'un d'eux, afin de joindre les actes "aux grandes déclarations vis-à-vis des agriculteurs".

La pression des syndicats agricoles

Il y a donc un risque que le Ceta soit rejeté par les sénateurs. "Ça me sidère que certains LR suivent les communistes au détriment de nos agriculteurs et de nos entreprises", riposte le ministre chargé du Commerce extérieur Franck Riester, qui "ne désespère pas de les convaincre". Car le gouvernement a des arguments à faire valoir, chiffres à l'appui : l'accord avec le Canada a déjà rapporté près de 400 millions d'euros à l'agriculture française, surtout aux filières laitière et viticole. "La FNSEA le sait, mais ne dira rien, peste un sénateur favorable au Ceta, car elle est sous pression des autres syndicats agricoles... sauf que si ça tourne mal, ça peut coûter bonbon à tous les secteurs qui exportent au Canada et pas qu'à l'agriculture !"

Si jamais les sénateurs mettent en échec le Ceta, le gouvernement pourrait très bien faire comme si de rien n'était en ne convoquant pas de commission mixte paritaire, chargée de trouver un accord entre Sénat et Assemblée. Le Ceta continuerait ainsi à être appliqué "de façon provisoire". A moins qu'à l'Assemblée un groupe d'opposition ne remette aussi le Ceta à l'ordre du jour. En majorité relative, ce n'est pas gagné pour l'exécutif : le gouvernement préférerait donc éviter un vote négatif des sénateurs.

Dans ce dossier, le gouvernement a reçu un soutien extérieur. L'ambassadeur du Canada en France a écrit aux sénateurs lundi 11 mars. Dans ce mail que franceinfo a pu consulter, il leur explique qu'un éventuel rejet du Ceta "affecterait nos relations bilatérales". L'ambassadeur canadien vante lui aussi les bénéfices qu'en tirent les agriculteurs français : "Imposer le retour de barrières tarifaires entre leurs fromages, leurs vins et tant d'autres produits savoureux, et 40 millions de consommateurs canadiens leur serait préjudiciable". Un élu communiste dénonce cette "pression exercée par un pays étranger sur des parlementaires". Bref, le débat s'annonce houleux... Et suivi jusqu'à Ottawa.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.