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Mineurs non accompagnés : la ville de Bordeaux innove dans la lutte contre la délinquance des jeunes étrangers

Confrontées à une forte hausse des violences commises par ces adolescents venus seuls d'Algérie ou du Maroc, les autorités locales ont mis en place une cellule de police dédiée et des maraudes sont menées par des médiateurs et psychologues.

Article rédigé par franceinfo, Gaële Joly
Radio France
Publié Mis à jour
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Le commissariat central de Bordeaux (Gironde), le 25 février 2021. (FABIEN COTTEREAU / MAXPPP)

C'est un phénomène qui inquiète les grandes métropoles. Après Paris et son quartier de la Goutte d'or, Bordeaux, Nantes, Montpellier, Rennes, ou Lyon sont confrontées à la délinquance de mineurs étrangers non accompagnés. Vol à la volée, cambriolage, agression au couteau... Ils seraient près de 3 000 jeunes livrés à eux-mêmes, souvent drogués et auteurs de violences.

Onze enquêteurs dédiés

À Bordeaux, l'été dernier, la police a recensé une attaque au couteau par jour dans l'agglomération. Sur l'année 2020, 40 % des faits de délinquance commis dans la ville sont imputables à des mineurs non accompagnés, selon la préfecture de Gironde, contre 24 % seulement il y a deux ans. Les pouvoirs publics locaux ont pris le phénomène à bras le corps et servent aujourd'hui d'exemple. Le commissariat central de Bordeaux a mis en place une cellule dédiée à ces jeunes arrivés clandestinement en France.

Onze enquêteurs sont mobilisés jour et nuit, sous les ordres du Major Jean-Marc Caillava : "Il y a des gamins qui reviennent très très régulièrement en garde à vue pour des faits différents. Ils donnent de faux noms, sont souvent sous l'influence de psychotropes. C'est très, très compliqué à gérer. Souvent ils refusent toute prise d'empreintes, explique le policier. Souvent on fait une photo de l'individu, on fait une reconnaissance faciale qui nous permet, quand ils sont connus, d'avoir une identité différente et on peut prouver comme ça que cet individu a un autre alias et est majeur."

Désorganiser les réseaux

La cellule de la police bordelaise tente de mieux identifier ces jeunes étrangers mais aussi de les sortir des réseaux de trafiquants qui les exploitent. Et dans ce domaine elle a récemment obtenu des résultats. Céline Plumail, commissaire divisionnaire, détaille l'une de ces affaires : "Six personnes ont pu être interpellées. On a identifié deux établissements qui étaient en fait un soutien pour le receleur en chef, raconte la commissaire. Un bar dans lequel avaient lieu les échanges d'objets, de butin avec les voleurs et également un magasin de téléphonie. On sent que ça calme les choses. On a vraiment senti, suite à nos opérations, qu'on a désorganisé le système mis en place. On a quand même moins de mineurs non accompagnés ou se disant comme tel sur Bordeaux".

"Ils commencent à avoir un peu peur de la police bordelaise et ils prennent le train pour aller un peu plus loin, dans des villes de la région sud-ouest." 

Céline Plumail, commissaire divisionnaire

à franceinfo

Et quand les trafiquants tombent, c'est un appui pour les associations car cela permet de convaincre ces jeunes plus facilement de revenir dans le droit chemin.

Une deuxième méthode, plus sociale

En parallèle de l'action policière, la mairie de Bordeaux tente une nouvelle approche avec ces jeunes insaisissables. C'est le cas dans le quartier Saint-Michel, connu notamment pour ses points de deal et de recel de drogue. Un quartier de survie pour ces mineurs délinquants. C'est là qu'ils revendent colliers arrachés, sacs, portables, ou cannabis. Sid, médiateur, tente de créer le lien avec ces jeunes. Ce jour-là nous le rencontrons en présence d'Hamid, originaire d'Algérie. Ce dernier explique qu'il est arrivé en France il y a huit ans, qu'il a vécu à Toulouse et Bordeaux "pour le travail" et reconnaît avoir "vendu".

À Bordeaux, Ils seraient une centaine de mineurs étrangers non accompagnés. Les plus jeunes ont 13 ans, venus d'Algérie ou du Maroc. Ils volent pour financer les nuits en squat et refusent la main qu'on leur tend, affirme le médiateur Sid.

"Ce sont des savons, ils glissent entre les mains de toutes structures et organismes donc on essaie, nous, de leur trouver un chemin à prendre dans la mesure du possible". 

Sid, médiateur

à franceinfo

Bien qu'arrivés de façon illégale en France, ces jeunes maghrébins, parce que mineurs, ne peuvent pas être expulsés. Ils sont protégés par la Convention internationale des droits de l’enfant de 1989.

Des "pilules courage" ou "bien-être"

Ces jeunes sont, la plupart du temps, drogués, ajoute Sid : "Ils vont prendre des anti-dépresseurs mélangés à des opiacés avec ce que l'on appelle de la prégabaline. C'est ce qui désinhibe de toute conscience, qui les aide, entre guillemets, à vivre leur vie à eux." Des "pilules courage" qui peuvent aussi être absorbées pour éprouver "un bien-être", explique le médiateur. Theresa, psychologue, intervient aussi auprès de ces mineurs : "Ils n'ont pas de papiers, ils n'ont pas une bonne situation, ils ne peuvent pas envisager quoi que ce soit derrière ou pour l'avenir. C'est très difficile de leur faire arrêter [la drogue]".

Grâce à ces maraudes, dites pluridisciplinaires, la mairie de Bordeaux touche du doigt quelques victoires. Des mises à l'abri de quelques mois dans des foyers de l'aide social a l'enfance (ASE) qui ne parvenait pas à convaincre ces mineurs jusqu'ici. Une façon de faire qui intéresse d'autres agglomérations. Récemment les villes de Nantes et de Lyon, qui connaissent le même phénomène, sont venues chercher des conseils auprès de Bordeaux.

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